Le secteur industriel demeure au zénith de sa popularité, tandis que la dynamique des bureaux, déjà très défavorable aux propriétaires, risque d’empirer avec le risque d’une possible récession et des compressions de personnel à venir dans le secteur de la technologie.

Des locaux industriels d’une superficie totale de près de 1 million de pieds carrés ont été livrés au 4trimestre 2022, indique un récent rapport de l’agence CBRE. Le taux de disponibilité reste inchangé à 1,2 % dans la région montréalaise, ce qui place les propriétaires en position de force face aux locataires manufacturiers.

Cela dit, le marché semble répondre à l’appel de la forte demande. Des bâtiments de 3,8 millions de pieds carrés sont actuellement en construction et seront livrés dans le courant de 2023. Du lot, environ les deux tiers sont construits sans accord de location préalable.

« En 2022, les entreprises de services logistiques (3PL) ont pesé sur la demande de locaux pour gérer les stocks que l’on a attendus pendant les deux premières années de la pandémie. Il sera intéressant de voir leur réaction dans les prochains mois maintenant que le rattrapage a été effectué », observe, dans un entretien, Ruth Fischer, première vice-présidente et directrice générale de CBRE au Québec.

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Ruth Fischer, première vice-présidente et directrice générale de CBRE au Québec

« Si ce qui se passe aux États-Unis nous sert d’indication, il ne faudra pas se surprendre que ces entreprises retournent des locaux sur le marché à plus ou moins brève échéance. Advenant que ça soit le cas, le déséquilibre entre l’offre et la demande deviendrait moins important », ajoute-t-elle.

Ce facteur, jumelé à l’ajout significatif de l’inventaire et au ralentissement attendu de l’activité économique, devrait logiquement tempérer les ardeurs des propriétaires quant aux hausses de loyer à venir.

À ce sujet, le mal est déjà fait si on prend le point de vue des utilisateurs de locaux industriels, puisque le loyer net demandé (avant les frais et les taxes) dépasse maintenant les 15 $ du pied carré. Il y a deux ans à peine, rappelons-le, le loyer demandé se situait sous la barre des 8 $ du pied carré.

Le secteur industriel tourne à plein régime en raison de la part de marché grandissante occupée par le commerce électronique. Si les ventes en magasin sont bonnes pour les centres commerciaux, les ventes en ligne demandent davantage d’espaces d’entreposage dans les parcs industriels.

On cherche le positif dans le bureau

Le taux d’inoccupation des bureaux a encore augmenté au 4e trimestre dans la région montréalaise. Selon CBRE, il se situe maintenant à 17 % : 16 % au centre-ville et 18,3 % en banlieue.

Un marché en équilibre, qui ne favorise ni les propriétaires ni les locataires, est un marché où le taux d’inoccupation des bureaux se situe entre 8 et 10 %. Au-dessus de cette zone, le marché favorise clairement les locataires. Dans ce contexte, le loyer demandé fait du surplace, et les propriétaires se montrent généreux dans les douceurs qu’ils offrent aux locataires potentiels.

« Le secteur des bureaux devra faire face à une année 2023 mouvementée, car il devra faire face à une récession potentielle, à une restructuration du secteur technologique et à une incertitude persistante quant à l’impact des modes de travail hybrides », indique Paul Morassutti, président de CBRE, dans un communiqué.

La responsable de CBRE au Québec y voit quand même matière à garder le moral. « Même si l’inoccupation monte encore, le marché des bureaux suscite encore de l’intérêt, notamment sur le marché de la sous-location, indique Mme Fischer. Les entreprises locataires apprécient la possibilité d’occuper rapidement des bureaux clés en main dans la catégorie des plus beaux immeubles (catégorie A), parce que le risque lié au coût d’aménagement des bureaux est ainsi réduit au minimum. »

À plus long terme, les perspectives demeurent franchement négatives à Montréal. Les spécialistes du Groupe Altus prévoyaient en novembre dernier que l’inoccupation continuerait d’augmenter jusqu’à 24 % d’ici 2025 à mesure que la Banque Nationale prendra possession des bureaux de son nouveau siège social et qu’elle libérera ses locaux actuels.