Gabrielle* s’est mise à épargner sérieusement pour sa retraite un peu sur le tard. Elle a été bien disciplinée depuis et elle voit maintenant les résultats dans ses projections à la retraite. Petit bémol tout de même : elle doit rester réaliste par rapport au rendement de ses placements.

La situation

Gabrielle a 58 ans et est cadre supérieure dans une grande entreprise. Elle prévoit prendre sa retraite dans quatre ans, mais elle craint que ce ne soit pas réaliste. Célibataire, elle est mère de deux enfants maintenant adultes. Lorsqu’ils étaient aux études, elle n’a pas réussi à épargner beaucoup pour ses vieux jours.

« Mais, à 40 ans, après une séparation difficile, j’ai constaté que je n’étais pas sur la bonne voie pour ma retraite, raconte-t-elle. J’ai donc mis les bouchées doubles. J’ai acheté ma maison en 2008 et j’ai commencé à cotiser de façon plus disciplinée à mes régimes enregistrés d’épargne-retraite [REER]. »

Sa stratégie pour arriver à cesser de travailler dans quatre ans est de régler ses dettes (son prêt hypothécaire et sa marge de crédit), de se constituer un fonds d’urgence et de cotiser le plus possible à ses REER. En ce moment, elle cotise 14 % de son salaire au REER collectif de son employeur et ce dernier cotise 4 %. Gabrielle investit aussi 5000 $ par année dans des REER de fonds de travailleurs (FTQ ou CSN). Elle a tout de même encore 180 000 $ de droits de cotisation REER non utilisés.

« Je ne cotise pas à mon compte d’épargne libre d’impôt [CELI], parce que mes lectures démontrent qu’il est préférable que j’utilise tous mes droits de cotisation REER avant », précise-t-elle.

Gabrielle évalue avoir besoin de seulement 31 000 $ net par année à la retraite, alors qu’elle n’aura plus de dettes. Elle aime beaucoup voyager, mais elle adaptera ses dépenses dans le domaine en fonction de ses capacités.

En ce moment, elle a près de 420 000 $ investis principalement dans des actions. « J’ai fait des simulations avec le rendement que j’obtiens présentement qui est de plus de 9 % et cela me dit que j’aurai environ 700 000 $ dans quatre ans, indique-t-elle. Je prévois attendre à 70 ans avant de demander mes pensions de la Sécurité de la vieillesse et du Régime de rentes du Québec [RRQ] pour profiter de la bonification. »

Elle calcule que cela lui donnerait environ 55 000 $ brut par année de 62 à 90 ans. « Est-ce réaliste, demande-t-elle, ou suis-je trop optimiste ? »

Les chiffres

  • Revenu annuel : 188 000 $
  • RRQ : 1359 $ mensuellement prévus à 65 ans
  • REER collectif : 302 590 $
  • Compte de retraite immobilisé (CRI) : 70 700 $
  • REER dans les fonds de travailleurs : 26 945 $
  • REER : 4315 $
  • Actions de l’employeur : 13 425 $
  • Maison : valeur de 400 000 $
  • Prêt hypothécaire : 80 000 $
  • Marge de crédit hypothécaire : 28 000 $
  • Autre terrain : valeur de 45 000 $ et ne sera pas vendu

Les conseils

Tout d’abord, Mylène Lapointe, planificatrice financière et représentante en épargne collective rattachée à Services en placements PEAK, tient à féliciter Gabrielle pour sa décision à 40 ans de commencer sérieusement à investir dans ses REER.

« C’était la bonne chose à faire parce que son salaire est très élevé, donc cela lui permet de réduire sa facture fiscale et aussi d’épargner pour avoir une retraite confortable », affirme-t-elle.

Réajuster le taux de rendement et l’espérance de vie

L’experte croit tout de même important d’ajuster deux éléments dans ses prévisions. D’abord, le taux de rendement utilisé pour faire ses simulations qui est de 9 %.

PHOTO DENIS GERMAIN, ARCHIVES LA PRESSE

Mylène Lapointe, planificatrice financière et représentante en épargne collective rattachée à Services en placements PEAK

« C’est trop optimiste, affirme Mylène Lapointe. Ce n’est pas parce qu’elle fait 9 % en ce moment que ça va être la même chose dans les années à venir. Il est préférable d’être plus pessimiste et d’être très contente si, finalement, les choses vont mieux que prévu. Elle ne veut surtout pas se retrouver à manquer d’argent parce que les rendements ne sont pas au rendez-vous. »

Pour faire des simulations pour un portefeuille équilibré croissance, l’Institut de planification financière conseille de prendre un taux de rendement d’environ 4 %.

« Gabrielle devrait aussi s’assurer qu’elle est toujours à l’aise avec le niveau de risque de son portefeuille, conseille Mylène Lapointe. En ce moment, elle a presque uniquement des actions, mais bien des gens en vieillissant sont plus à l’aise d’avoir une partie d’obligations afin de réduire la volatilité. »

De plus, la planificatrice financière évalue qu’il serait plus prudent d’évaluer l’espérance de vie à au moins 94 ans plutôt que 90.

« Avec ces ajustements, Gabrielle aurait plutôt 42 000 $ net par année, précise-t-elle. Elle arriverait quand même très bien avec son train de vie de 31 000 $ net et elle pourrait aussi s’allouer un bon budget supplémentaire pour les voyages. »

Dans ces scénarios, la vente de la maison n’a pas été considérée. « Par contre, si elle la vend, disons à 84 ans, à un prix assez pessimiste de 572 000 $, elle pourra se permettre ensuite de dépenser 74 000 $ net par année, indique la planificatrice financière. Ce sera amplement suffisant pour se payer un loyer ou une résidence pour personnes âgées. »

Envisager le CELI

Si la stratégie d’investissement à 100 % dans les REER a été très intéressante depuis 20 ans pour Gabrielle qui a un salaire très élevé, Mylène Lapointe lui conseille tout de même d’investir un peu dans son CELI.

« Elle n’en a pas du tout en ce moment et une fois qu’elle sera à la retraite, il pourrait être avantageux fiscalement parfois de décaisser certaines sommes de son CELI plutôt que de son REER afin de ne pas trop faire augmenter son revenu imposable. »

La planificatrice financière explique que lorsque son revenu imposable sera moins élevé à la retraite, Gabrielle aura avantage à utiliser chaque année avec son conseiller financier les courbes de Laferrière pour voir ce qui sera le plus avantageux pour sa stratégie de décaissement.

« Parce que les aides gouvernementales, comme les crédits d’impôt pour solidarité, pour la TPS et pour le maintien à domicile des aînés, sont calculées à partir du revenu imposable, indique Mylène Lapointe. Donc parfois, il est mieux de puiser une partie de ce dont on a besoin dans son CELI afin de ne pas faire trop augmenter son revenu imposable. »

Tout de même, elle souligne que Gabrielle peut être très fière de ce qu’elle a accompli dans les dernières années. « Elle a pris les bonnes décisions et elle peut prendre sa retraite dans quatre ans comme elle le souhaite sans s’inquiéter. »

* Bien que le cas mis en lumière dans cette rubrique soit réel, le prénom utilisé est fictif.

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