(Ottawa) Les Canadiens ont moins d’argent à dépenser même s’ils s’endettent davantage, a rapporté mercredi Statistique Canada, alors que les taux d’intérêt se trouvent à leur niveau le plus élevé en quelques décennies.

Sur une base désaisonnalisée, la dette des ménages sur le marché du crédit, exprimée en proportion du revenu disponible des ménages, est passée à 184,5 % au premier trimestre, alors qu’elle était de 181,7 % au quatrième trimestre 2022, a précisé l’agence fédérale.

Autrement dit, il y avait 1,85 $ de dette sur le marché du crédit pour chaque dollar de revenu disponible des ménages au premier trimestre.

« Les frais de service de la dette devraient continuer d’augmenter rapidement au cours de l’année et culminer au second semestre de 2024, car les taux d’intérêt devraient maintenant augmenter et rester élevés plus longtemps », a affirmé l’économiste Maria Solovieva, de la Banque TD, dans une note.

« Cela créera des vents contraires supplémentaires pour les ménages très sensibles aux taux d’intérêt (comme les titulaires d’hypothèques à taux variable) et pourrait entraîner des taux de délinquance plus élevés à l’avenir », a-t-elle prévenu.

Le ratio du service de la dette des ménages, mesuré comme le total des paiements obligatoires du principal et des intérêts sur la dette du marché du crédit en proportion du revenu disponible des ménages, était de 14,9 % au premier trimestre 2023, contre 14,4 % au quatrième trimestre 2022.

Ce ratio devrait atteindre des niveaux record, potentiellement au deuxième trimestre, alors que l’impact à la traîne de la hausse des taux d’intérêt continue de se répercuter sur les coûts d’emprunt des ménages, a observé l’économiste en chef adjoint de la Banque Royale du Canada, Nathan Janzen, dans une note.

« La combinaison de la hausse de l’inflation et des paiements de la dette a déjà absorbé toute la croissance des revenus après impôt des ménages l’année dernière, et devrait le faire à nouveau en 2023 », a estimé M. Janzen.

L’augmentation du ratio du service de la dette est survenue alors que les ménages ont emprunté 16,5 milliards sur une base désaisonnalisée au premier trimestre, dont 11,2 milliards en dette hypothécaire.

L’encours de la dette combinée des Canadiens a atteint un nouveau record au premier trimestre de l’année, atteignant 2320 milliards, a signalé l’agence TransUnion il y a deux semaines. Les soldes moyens de la plupart des produits de crédit à la consommation ont augmenté de 11,4 %, tandis que les soldes hypothécaires moyens ont augmenté de 7,1 %.

Le total désaisonnalisé de la dette des ménages sur le marché du crédit, qui comprend le crédit à la consommation et les prêts hypothécaires et non hypothécaires, a augmenté de 0,6 % par rapport au quatrième trimestre de 2022 pour atteindre 2840 milliards au premier trimestre de 2023, dont 2110 milliards en dette hypothécaire.

« La Banque du Canada devra surveiller de près la performance du crédit des ménages, car la hausse des taux d’intérêt continue de peser sur les ménages canadiens cette année », a indiqué Mme Solovieva.

La Banque du Canada a interrompu son resserrement monétaire après sa hausse de janvier, mais a de nouveau relevé ses taux la semaine dernière, invoquant le risque que l’inflation se « coince » à un niveau trop élevé. Son taux de financement à un jour est maintenant de 4,75 %, bien loin de celui de 0,25 % de janvier 2022.

M. Janzen a souligné que la banque centrale continuait de s’attendre à un assouplissement du marché du travail et à de plus faibles données sur le produit intérieur brut (PIB) au cours du second semestre 2023.