Les prochaines semaines s’annoncent déterminantes pour Groupe Juste pour rire (JPR), toujours sous la protection de la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies. Les offres initiales pour racheter le géant de l’humour devaient avoir été déposées mardi. La Presse lève le voile sur ce qui a été proposé aux acheteurs potentiels par le groupe et la firme PwC.

Scindé en deux ?

JPR est à vendre dans sa forme actuelle, mais son visage pourrait considérablement changer. Parallèlement à ce scénario, le groupe pourrait se scinder en deux. Les marques, les festivals, les tournées ainsi que tout ce qui concerne la production télévisuelle – tirée en grande partie des activités du festival – seraient regroupés dans un bloc. Tout ce qui gravite autour des festivals a permis de générer des recettes de 37 millions en 2022, tandis que le créneau des tournées anglophones a généré des revenus de 25,5 millions, comparativement à environ 11 millions pour le volet francophone. ComediHa ! a déjà mis la main sur les droits pour présenter la comédie musicale Waitress à Montréal et à Québec l’été prochain.

Un catalogue varié

Les différents catalogues de JPR ont été regroupés dans un autre lot présenté comme étant très rentable. C’est ici que la populaire émission Les Gags, diffusée dans plus de 150 pays, est offerte. « Émission distribuable, hautement performante et rentable, vante PwC. Non verbale, à l’épreuve du temps et universelle : cette émission peut être diffusée à toute heure du jour ou de la nuit, tous les jours, partout dans le monde. » Les Gags seraient particulièrement prisés en Indonésie ainsi qu’en Inde, apprend-on. Cette émission devrait générer des revenus annuels supérieurs à 4,5 millions au cours des années financières allant de 2025 à 2028, d’après la présentation. Les liquidités nettes devraient être supérieures à 2 millions pour chacun de ces exercices.

Des mains levées

Pas moins de 15 repreneurs ont signé des ententes de confidentialité depuis le début du mois de mars pour avoir accès aux livres de JPR, selon le plus récent rapport du contrôleur Christian Bourque. D’après nos informations, Québecor, actionnaire de ComediHa ! et qui avait tenté de mettre la main sur JPR en 2017, fait partie de ce groupe. Les prétendants avaient jusqu’à mardi (9 avril) pour déposer leur offre initiale. Il n’a pas été possible de savoir, mardi, combien de propositions avaient été reçues par le contrôleur. « De multiples acheteurs ou investisseurs potentiels ont déjà manifesté leur intérêt à obtenir la documentation de sollicitation dès l’annonce du lancement du processus », a écrit M. Bourque, dans son rapport qui révélait que PwC avait pris contact avec près de 130 acheteurs potentiels.

Catalogue à la pièce

Le catalogue de JPR pourrait être vendu à la pièce. Par exemple, Les Gags pourraient aboutir chez un acquéreur, et un autre acheteur pourrait s’intéresser au reste du catalogue. Il s’agit de contenu (télé et audio) capté pendant le festival – les spectacles d’humour et les évènements musicaux. Ces propriétés génèrent cependant beaucoup moins de revenus comparativement aux Gags. Même si le catalogue de JPR peut être vendu en pièces détachées, l’entreprise « vise » à le vendre en un seul bloc, précise PwC.

Marque encore forte

Même si le groupe a accumulé des pertes d’environ 12 millions en cinq ans depuis qu’il appartient à Bell (26 %), Groupe CH (25 %) et Creative Artists Agency (49 %), sa marque semble encore avoir de la valeur. En 2022, elle se chiffrait à 20 millions, souligne la présentation que La Presse a pu consulter. « La marque a une très grande valeur au Québec et en Europe francophone », est-il écrit. Elle existe depuis plus de 40 ans et compte près de 55 millions d’abonnés sur différentes plateformes de réseaux sociaux.

Fini le siège social

Au moment de se placer à l’abri de ses créanciers, le 5 mars dernier, JPR traînait des créances garanties d’environ 21,5 millions. La Banque Nationale était le principal prêteur garanti (17 millions) du groupe. Afin de récupérer de l’argent, le contrôleur vendra le siège social de JPR, situé au centre-ville de la métropole, sur le boulevard Saint-Laurent, à l’angle de la rue Sherbrooke. Au rôle d’évaluation de Montréal, la valeur de la propriété de l’entreprise frôle les 5 millions. Il n’y a cependant aucun échéancier précisé quant au moment où une transaction pourrait se conclure. Le rapport de M. Bourque fournit peu de détails sur cet aspect.