La lutte de pouvoir s’envenime chez Gildan alors que le conseil d’administration lance une nouvelle charge contre l’ex-PDG Glenn Chamandy en dénonçant notamment son engagement et des comportements qualifiés de douteux.

« Glenn Chamandy a été chef de la direction pendant 20 ans et, au cours des dernières années, il s’est désengagé graduellement à titre de chef de la direction, se concentrant davantage sur ses activités personnelles extérieures, dont l’aménagement d’un centre de villégiature de golf à la Barbade », lit-on dans une lettre ouverte du conseil d’administration aux actionnaires publiée lundi.

« Son style de gestion n’était pas structuré, il tenait peu de réunions avec les membres de la haute direction et se présentait rarement au bureau, en moyenne quelques jours par mois seulement, même longtemps après la fin du confinement en raison de la COVID », est-il ajouté.

« Glenn Chamandy n’a jamais visité la nouvelle usine de fabrication de Gildan au Bangladesh, l’un de nos investissements les plus importants. Il ne s’est pas déplacé au Bangladesh, un important centre de fabrication pour la société, en plus d’une décennie. »

Le conseil affirme aussi avoir récemment pris connaissance de nouveaux renseignements à l’égard de comportements de Glenn Chamandy qui se sont produits vers le moment de son départ et qui sont « incompatibles avec ceux d’un membre de la haute direction ».

Glenn Chamandy a, selon le conseil, enregistré un appel téléphonique privé et confidentiel qu’il a eu le 24 novembre dernier avec le président du conseil à l’insu de ce dernier. Toujours selon le conseil d’administration, Glenn Chamandy a aussi violé, à son départ, les politiques de Gildan sur la protection des renseignements de l’entreprise.

Glenn Chamandy a été destitué de son poste de PDG le 10 décembre par le conseil d’administration. Cette décision avait alors été justifiée par des divergences liées au plan de succession et en soulignant que Glenn Chamandy souhaitait aller de l’avant avec une stratégie d’acquisitions risquée de plusieurs milliards de dollars.

Le conseil se dit convaincu que le maintien en poste de Glenn Chamandy à titre de chef de la direction aurait compromis l’avenir de Gildan et aurait détruit la valeur pour les actionnaires.

« Glenn Chamandy a tenté de présenter cette situation comme un différend à l’égard du processus de relève du conseil concernant le chef de la direction, ce qui n’est pas le cas. Il s’agit plutôt de l’avenir de Gildan », est-il indiqué dans la lettre ouverte publiée lundi.

Le dévoilement de nouvelles informations par le conseil survient alors que plusieurs grands actionnaires de Gildan appuient une initiative visant à évincer des administrateurs et à ramener Glenn Chamandy aux commandes de Gildan.

L’investisseur institutionnel américain Browning West souhaite la tenue d’une assemblée extraordinaire des actionnaires de Gildan dans le but de faire élire de nouveaux administrateurs, dont Glenn Chamandy.

Dans sa lettre ouverte publiée lundi, le conseil précise que Glenn Chamandy a eu de la difficulté à faire croître une entreprise « de plus en plus complexe » dans les dernières années et souligne qu’en l’absence d’une stratégie à long terme cohérente, Glenn Chamandy est passé d’une stratégie opportuniste à une autre.

« Il a fait des incursions dans des produits de marque, la distribution au détail, l’expansion internationale et la production de fils, lesquelles ont connu un succès mitigé, ce qui a donné lieu à un taux de croissance annuel des revenus sur huit ans de moins de 1 % et, au cours de cette période, à des radiations et à des restructurations de plus de 450 millions de dollars. »

Dans ce contexte, il était frappant de lire la lettre de Browning West du 14 décembre, dans laquelle il était affirmé que, sous la direction de M. Chamandy, le cours de l’action de Gildan était « en bonne position pour atteindre 60 à 80 $ l’action au cours des deux prochaines années ». Cette affirmation contraste fortement avec la présentation de Glenn Chamandy sur la planification à long terme de 2023 au conseil le 30 octobre, dans laquelle il a déclaré que la croissance interne serait plafonnée, la valeur intrinsèque du cours de l’action s’établissant nettement en dessous de la fourchette citée par Browning West.

L’action de Gildan a terminé la dernière semaine à 42,53 $ à la Bourse de Toronto.

En réaction aux nouvelles allégations formulées à l’endroit de Glenn Chamandy, l’actionnaire dissident Turtle Creek Asset Management indique par courriel que le conseil d’administration de Gildan prouve une fois de plus qu’il a perdu le contact avec les actionnaires qu’il représente.

« Plutôt que de passer du temps à élaborer un récit toujours changeant autour de leur licenciement mal conçu de Glenn Chamandy, Turtle Creek exhorte le conseil à convoquer rapidement une assemblée extraordinaire qui permettra à tous les actionnaires de se faire entendre. »

En fin de journée lundi, il n’avait toujours pas été possible d’obtenir une réaction de Glenn Chamandy.