Il se raffine du sucre sur les berges du Saint-Laurent, dans l’est de Montréal, depuis 1888 et Sucre Lantic investit 200 millions pour que la tradition se poursuive encore longtemps.

Rogers Sugar va accroître la capacité de production de 20 % de l’usine de sa filiale Sucre Lantic pour répondre à la demande des industriels de l’agroalimentaire du centre du Canada qui exportent vers les États-Unis.

Actuellement, le déséquilibre de sucre est comblé en faisant venir du sucre raffiné de Vancouver pour les clients de l’est du Canada.

L’investissement a été confirmé lundi matin en présence du président de Rogers Sugar, Mike Walton, et du ministre québécois de l’Économie, Pierre Fitzgibbon.

Environ 50 % de la production de Lantic vendue aux industriels est ensuite exportée aux États-Unis dans des produits finis. Pensons au fabricant de chocolat Barry Callebaut, à Saint-Hyacinthe, qui exporte la majeure partie de sa production.

Il faut savoir que le sucre est moins cher au Canada qu’aux États-Unis, où il est réglementé.

Sur le bord du Saint-Laurent pour de bon

Pourquoi rafistoler une bâtisse de 135 ans plutôt que de construire une nouvelle usine plus productive ? a-t-on demandé. Les usines ont en effet tendance à déserter l’île de Montréal, comme la brasserie Molson, pour s’en aller en banlieue, où les terrains sont moins chers. C’est la révolution du transport par conteneurs qui a permis l’exode des usines loin des installations portuaires.

« Notre présence sur le bord du fleuve est essentielle parce qu’on reçoit le sucre brut du Brésil par vraquier, a expliqué Jean-Sébastien Couillard, vice-président des finances chez Lantic. Le faire venir en conteneurs coûterait beaucoup plus cher », a-t-il expliqué en marge de la conférence presse qui s’est tenue lundi matin.

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Jean-Sébastien Couillard, vice-président des finances, chef de la direction financière et secrétaire corporatif de Lantic

La somme de 200 millions servira à acquérir de l’équipement de raffinage et à investir dans des infrastructures logistiques et ferroviaires à Montréal et à Toronto. Les travaux dureront deux ans.

La production annuelle de l’usine de la rue Notre-Dame, actuellement de 535 000 tonnes, augmentera de 100 000 tonnes à terme. Environ 20 travailleurs s’ajouteront aux 365 emplois actuels.

Le gouvernement du Québec avance un maximum de 65 millions sous forme de prêts : 40 millions en provenance du programme Essor et 25 millions des fonds propres d’Investissement Québec, bras investisseur du gouvernement. Les prêts portent intérêt.

« Montréal a toujours fait partie de notre identité depuis 1888 et nous allons poursuivre en ce sens », a dit le président Walton dans une déclaration en français.

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Mike Walton, président et chef de la direction de Rogers Sugar et de Lantic

Rogers vend ses produits sous les marques Lantic et Rogers. Ses trois usines produisent du sucre cristallisé, le sucre à glacer, les cubes de sucre, la cassonade dorée et la cassonade brune, le sucre liquide ainsi que les sirops de spécialité. Sa filiale Maple Treat Corporation, qui produit du sirop d’érable, fait de Rogers le plus grand embouteilleur de sirop d’érable au monde avec trois usines d’embouteillage. En 2022, environ 80 % des ventes annuelles de 1 milliard de Rogers Sugar proviennent du sucre et 20 %, du sirop d’érable, selon son rapport annuel.

Cet investissement avait été annoncé une première fois en août 2022. Rogers Sugar se reprend en espérant que cette fois-ci sera la bonne, en y ajoutant 40 millions en raison de l’inflation. À l’époque, Rogers Sugar parlait d’un investissement de 160 millions.

Attribution des blocs d’énergie « dans quelques semaines »

Les industriels en demande de courant de la part d’Hydro-Québec sauront bientôt à quoi s’en tenir. « On a finalisé durant l’été le premier bloc de demandes. Je suis en discussions avec M. Sabia [nouveau patron d’Hydro-Québec]. Dans les prochaines semaines, les sociétés auront leur réponse à la demande qu’ils ont faite », a indiqué le ministre Pierre Fitzgibbon, qui gère aussi le portefeuille de l’Énergie. Au total, plus de 3200 mégawatts (MW) de puissance sont en jeu, répartis dans plus de 20 projets. L’énergie devrait être livrée dans un horizon de 1 à 5 ans environ. Depuis l’adoption du projet de loi 2, le 15 février 2023, c’est le gouvernement du Québec, de concert avec Hydro-Québec, qui autorise les projets industriels qui demandent plus de 5 MW de puissance. Auparavant, la société d’État avait l’obligation de brancher tous les projets de moins de 50 MW.

Fermer la porte au nucléaire serait irresponsable, selon le ministre

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Le ministre Pierre Fitzgibbon

Fermer la porte au nucléaire serait irresponsable, avance le ministre Fitzgibbon, qui répondait aux questions des journalistes sur la relance possible de la production de cette source d’énergie controversée au Québec. « Dans un contexte où il y a une pénurie d’électricité, c’est important de comprendre ce qui se passe, a-t-il expliqué. Est-ce que c’est possible de voir s’il y a des choses qu’on peut faire sur le site de Gentilly-2 ? À ce moment-ci, les experts vont regarder s’il y a des possibilités. » Il a ajouté que les projets de nouvelles sources énergétiques devaient être socialement acceptables et économiquement rentables. « Si jamais, et je dis si, on allait au nucléaire, il y a un travail de communication à faire », a-t-il reconnu.