(Toronto) Les chefs de la direction de Rogers Communications et de Shaw Communications ont profité lundi d’une audience devant des députés à Ottawa pour faire valoir que chaque Canadien bénéficierait du regroupement de leurs deux entreprises, qui doivent être plus grandes pour être plus concurrentielles.

Leur témoignage a cependant été l’occasion pour certains députés de poser plusieurs questions au sujet du projet de 26 milliards qui verrait Rogers racheter Shaw Communications et Freedom Mobile.

« Vous avez promis d’augmenter le nombre d’emplois, de nouveaux investissements, de réduire les prix et d’atteindre des marchés où vous n’étiez pas auparavant — que ce soit des régions autochtones ou des régions rurales [ou) éloignées. Je veux dire que ce sont des promesses qui feraient rougir un voleur d’expérience », a affirmé le néo-démocrate Brian Masse lors d’un échange.

« Je suppose que je ne vois pas comment […] éliminer un concurrent pourrait être avantageux à long terme pour la concurrence », a ajouté M. Masse.

Le député libéral Nathaniel Erskine-Smith a remis en question ce que les dirigeants de Shaw ont dit lundi, en évoquant certaines de leurs déclarations antérieures au sujet de l’importance d’avoir des concurrents régionaux forts et indépendants comme Shaw pour rivaliser avec les trois plus grands joueurs du Canada.

« Dans cet accord, nous perdons cette concurrence [et] nous perdons une pression pour l’accessibilité », a fait remarquer M. Erskine-Smith au chef de la direction de Shaw, Brad Shaw.

« Si nous prenons vos déclarations de janvier cette année au pied de la lettre, ne devrions-nous pas nous attendre à un impact négatif sur l’accessibilité des services de télécommunication dans ce pays si cet accord est conclu ? »

Le critique conservateur des télécommunications, Pierre Poilievre, a souligné plus tard que Shaw minimisait l’importance de son opérateur de téléphonie mobile Freedom Mobile en tant que quatrième concurrent sur certains marchés.

« Pensez-vous qu’un quatrième opérateur réduit les prix ? » a demandé M. Poilievre à Paul McAleese, ancien patron de Freedom Mobile et aujourd’hui président de sa société mère, Shaw Communications.

« Je pense qu’un environnement concurrentiel dynamique réduit les prix », a répondu M. McAleese. « Tout dépend de la situation, M. Poilievre. »

En réponse à une question similaire du député du Bloc québécois, Sébastien Lemire, M. McAleese a affirmé qu’il n’y avait pas un chiffre « magique » de rivaux pour alimenter la concurrence.

« Cela n’a pas simplement à voir avec le nombre d’opérateurs qui participent à la mise en marché, mais plutôt avec ce qu’ils font », a expliqué M. McAleese.

Selon Brad Shaw et le chef de la direction de Rogers, Joe Natale, le projet aidera les Canadiens parce qu’il permettra aux entreprises de se concentrer sur la construction d’une nouvelle génération de réseaux en cette période de course pour un service sans fil et internet plus rapide dans les régions rurales ainsi que dans certains secteurs urbains du pays.

Les critiques du rachat des activités de câblodistribution, de l’internet et de sans-fil de Shaw par Rogers soutiennent que le Canada a besoin d’avoir plus de concurrents dans l’industrie, et non d’en voir disparaître.

Mais Brad Shaw a souligné que la société établie à Calgary, fondée par son père, n’était pas assez grande à elle seule pour faire les investissements de plusieurs milliards de dollars qui lui seraient nécessaires pour construire un réseau sans fil 5G concurrentiel.

Joe Natale a également indiqué que la torontoise Rogers, qui possède le plus grand service sans fil national et est l’une des plus grandes entreprises de câblodistribution et internet du pays, devait croître pour devenir plus concurrentielle en développant et en mettant à jour ses réseaux.

L’accord proposé fait face à une vive opposition, notamment de la part de groupes de consommateurs, d’universitaires et de clients, depuis son annonce, il y a deux semaines.

Les dirigeants de Rogers et de Shaw participaient à une audience virtuelle du Comité permanent de l’industrie, des sciences et de la technologie, à Ottawa. Le comité entendra mercredi des représentants du gouvernement, des dirigeants d’autres entreprises et des défenseurs des consommateurs.

En annonçant l’accord le 15 mars, M. Natale a dit avoir bon espoir d’obtenir les approbations réglementaire et gouvernementale nécessaires d’ici le début 2022.

Mais M. Natale a également indiqué que la partie la plus complexe des approbations impliquerait Freedom Mobile, qui est un concurrent direct de Rogers et de ses autres marques en Ontario, en Alberta et en Colombie-Britannique.