Bombardier (T.BBD.B) a donné une bonne idée de l'ampleur des efforts qu'elle déploie actuellement pour se remettre sur pied, hier, en confirmant avoir eu des discussions avec le géant Airbus sur l'avenir du programme d'avions C Series.

C'est le constructeur européen qui a pris les devants avec cette déclaration publiée au début de la soirée : « Airbus Group confirme qu'il a exploré des occasions d'affaires avec Bombardier du Canada et que de telles discussions n'ont plus cours ». Peu de temps après, la multinationale québécoise a confirmé les faits à son tour, puis a réitéré qu'elle allait continuer d'« explorer différentes initiatives, incluant une participation potentielle à la consolidation de l'industrie ».

Les déclarations des entreprises faisaient écho à une dépêche publiée par l'agence de presse Reuters vers 15 h 30. On pouvait y lire que Bombardier avait offert à Airbus d'acquérir une participation majoritaire dans la C Series, nouvelle gamme d'appareils de 110 à 160 places. Selon les sources anonymes de Reuters, Airbus aurait donné un coup de pouce financier à Bombardier pour mener à bien le développement des appareils CS100 et CS300 en échange d'une prise de contrôle du programme et d'une participation proportionnelle aux bénéfices. Les deux entreprises auraient vraisemblablement mis sur pied un conseil d'administration conjoint pour gérer la C Series.

UNE BONNE IDÉE ?

Aussi étonnant que cela puisse paraître, ce projet avorté n'était pas incongru, a soutenu hier un spécialiste de l'industrie aéronautique.

« C'est une idée intrigante, mais qui est pleine de bon sens dans les circonstances », a affirmé Karl Moore, professeur à la faculté de gestion Desautels de l'Université McGill.

L'article de Reuters a fait bondir l'action de Bombardier, qui a gagné 15 % en fin de séance hier pour clôturer à 1,77 $, à la Bourse de Toronto.

Le professeur Moore a relevé qu'une alliance aurait permis à Bombardier de profiter du vaste réseau de vente d'Airbus et de ses nombreux contacts auprès des transporteurs aériens dans le monde. Il a reconnu qu'un tel pacte aurait sonné le glas du rêve de Bombardier de faire sa place dans le marché des grands avions commerciaux aux côtés d'Airbus et de Boeing.

« Mais ça aurait donné des chances accrues à Bombardier de survivre et de poursuivre le développement de ses activités en aviation d'affaires, en aviation régionale et dans le secteur ferroviaire. » - Le professeur Karl Moore

Le professeur rappelle que l'entreprise se heurte à d'importants défis financiers. Selon l'analyste Turan Quettawala, de la Banque Scotia, Bombardier pourrait être à court de liquidités d'ici la mi-2016.

Mehran Ebrahimi, professeur à l'Université du Québec à Montréal, ne croit pas que Bombardier ait besoin d'aller aussi loin pour sauver la C Series. « Ça ne semble pas très logique de céder le contrôle à Airbus alors que la certification de l'avion est à portée de main », a-t-il estimé. De plus, du point de vue d'Airbus, il voit mal l'intérêt d'un investissement dans Bombardier, puisque le constructeur européen a déjà un avion appartenant à la même catégorie que la CSeries : l'A319neo, qui peut transporter de 124 à 156 passagers.

Cela fait maintenant plus d'un an que Bombardier n'a pas reçu de commandes pour la C Series. Le nouveau PDG, Alain Bellemare, a indiqué au printemps qu'il examinait « toutes les options » pour assurer l'avenir de l'entreprise.