L'industrie ferroviaire est l'épine dorsale de l'économie canadienne, elle est en croissance, elle engage à pleines portes. Et pourtant, elle n'est pas populaire.

«Depuis le tragique accident de Lac-Mégantic, il y a une grosse crise de confiance», a déploré le président-directeur général du Canadien National (CN), Claude Mongeau, à l'ouverture d'un sommet commun organisé par l'Association des chemins de fer du Canada, l'Association canadienne des fournisseurs de chemins de fer et son pendant américain, le Railway Supply Institute.

«Pour continuer à se développer, il faut être le plus sécuritaire possible, a déclaré M. Mongeau. C'est essentiel.»

Il a affirmé que le transport ferroviaire était le plus sécuritaire de tous les modes de transport terrestre et qu'il était tout aussi sécuritaire que les pipelines. «Mais un seul accident est un accident de trop», a-t-il ajouté.

Il a rappelé qu'il était nécessaire de transporter des produits dangereux, qui entrent dans la composition de nombreux biens de consommation, qu'il s'agisse d'un pneu ou d'une tablette électronique.

La formation du personnel

M. Mongeau a insisté sur la formation du personnel. Il s'agit d'un véritable défi dans une industrie qui doit remplacer une main-d'oeuvre vieillissante. À lui seul, le CN doit engager 3000 personnes par année.

«C'est un défi, mais c'est aussi une occasion en or, a affirmé M. Mongeau. Nous les formons d'une façon qui n'existait pas il y a 20 ans. Il y avait alors peu de chose sur la question de la sécurité. Il n'y a rien comme former quelqu'un dès le début.»

Il a également abordé la sécurité des wagons-citernes, une question délicate puisqu'elle implique le remplacement ou la modification de milliers de wagons destinés au transport de produits comme le pétrole ou l'éthanol.

Il a rappelé que l'industrie avait pris les devants dès 2011 en mettant au point le wagon CPC-1232, un wagon-citerne plus robuste et plus sécuritaire que le wagon DOT-111 traditionnel, impliqué dans le déraillement de Lac-Mégantic.

L'industrie travaille maintenant sur un wagon de nouvelle génération. «Nous devrions avoir de nouvelles normes d'ici la fin de l'année ou au début de 2015», a indiqué M. Mongeau.

Au Canada, la transition entre les anciens wagons et les nouveaux devrait se faire sur trois ans en ce qui concerne les produits liquides dangereux.

Le PDG du Canadien National a insisté sur l'importance d'une harmonisation à l'échelle nord-américaine. «En Amérique du Nord, il y a une flotte, une industrie, a-t-il affirmé. C'est ensemble que nous pouvons être sécuritaires et constituer l'épine dorsale de l'économie.»

Les produits dangereux

Les participants au sommet ferroviaire ont également abordé la sécurité du transport ferroviaire de produits dangereux au cours d'ateliers spécifiques. La question touche une grande partie de l'industrie: les livraisons de pétrole brut par chemin de fer ont augmenté de 6600% en Amérique du Nord depuis 2005.

«Ce que nous craignions depuis des années est arrivé, un incident catastrophique», a commenté Dave Mears, de l'Association américaine des chemins de fer d'intérêt local.

«C'est justement un chemin de fer d'intérêt local qui a été impliqué à Lac-Mégantic, a-t-il observé. Le problème, c'est que ces chemins de fer n'ont pas les ressources des grandes sociétés.»

Le président du Railway Supply Institute, Thomas Simpson, a affirmé que les fournisseurs étaient capables de remplacer et de modifier les wagons-citernes DOT-111 traditionnels à temps pour respecter l'échéancier prévu, soit 2018 pour le transport de pétrole brut et 2020 pour l'éthanol.

Il serait toutefois impossible de respecter un échéancier plus serré.

«Si vous nous faites quelque chose de désastreux, il y aura une pénurie», a déclaré M. Simpson à des représentants de Transports Canada et de la Federal Railroad Administration, qui participaient au même atelier.

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Trois améliorations chez Via Rail

1) Information aux passagersVIA Rail veut diminuer la frustration de ses clients en leur donnant une information plus précise et plus opportune.

«Nous aimerions que 100% de nos trains soient à l'heure, mais c'est impossible», a déclaré Denis Pinsonneault, chef de l'expérience client et de l'exploitation chez VIA Rail, lors d'un atelier sur les technologies émergentes du rail voyageur dans le cadre du sommet ferroviaire.

Il a affirmé qu'il était important de fournir aux passagers de l'information à temps, exacte, cohérente et utile.

L'utilisation de GPS à bord des trains permettra à VIA Rail de mesurer le moindre retard et de mettre à jour immédiatement les tableaux indicateurs dans les gares de même que les applications mobiles.

«Nous allons mettre cela en place graduellement, a indiqué M. Pinsonneault. La majeure partie de la technologie devrait être en place d'ici Noël.»

2) Consommation de carburant

VIA Rail s'attaquera aux moteurs qui tournent au ralenti pour améliorer sa consommation de carburant et sa performance environnementale.

La société ferroviaire a constaté que 15% de sa consommation totale de carburant était liée aux moteurs qui tournaient au ralenti.

«Il y a là beaucoup de potentiel pour aller chercher des économies», a déclaré Denis Pinsonneault.

L'utilisation normale des trains représente 72% de la consommation de carburant et les divers systèmes (comme la climatisation des wagons et les systèmes de refroidissement), 13%.

Pour améliorer sa consommation, VIA Rail a entrepris de former ses employés pour les amener à adopter des pratiques de conduite peu gourmandes. Il faut notamment agir du côté des changements de vitesse des périodes où le moteur roule au ralenti. VIA Rail a entrepris de donner des bulletins aux employés pour qu'ils puissent se comparer à la moyenne et aux meilleurs élèves.

M. Pinsonneault a toutefois reconnu qu'il n'était pas facile de changer les habitudes d'un employé qui conduit une locomotive depuis 20 ou 25 ans.

3) Sécurité

Via Rail veut améliorer la sécurité de ses trains avec les nouvelles technologies, mais elle tient à ce que les opérateurs de locomotive demeurent très impliqués.

M. Pinsonneault a indiqué que, pour améliorer la sécurité, il serait possible de tout confier à la technologie et d'automatiser totalement les opérations. Il serait également possible d'ajouter des employés.

«Nous allons vers le milieu, a déclaré M. Pinsonneault. La technologie viendra assister l'opérateur.»

C'est ainsi qu'un système avertira l'opérateur lorsque, par exemple, il sera le temps de ralentir. Si l'opérateur ignore les avertissements, le système finira par prendre le contrôle et arrêter le train.