La rémunération des hauts dirigeants d'Air Canada a encore pris de l'altitude au dernier exercice, même si ses résultats financiers et le rendement de ses actions en Bourse piquaient du nez.

Les cinq principaux dirigeants du transporteur aérien se sont partagé 9,8 millions de dollars en salaires et primes au cours de l'exercice 2011. C'est 1 million de dollars, ou 11% de plus qu'en 2010, et presque deux fois plus qu'en trois ans à peine.

C'est ce que révèle la circulation de direction publiée par Air Canada en vue de son assemblée d'actionnaires qui, incidemment, aura lieu pour la première fois hors de Montréal depuis plusieurs années. Elle se tiendra le 4 juin à Calgary, dans la même ville que le siège social de son vif concurrent WestJet.

Par ailleurs, en incluant la «prime de rétention» de 5 millions versée au président Colin Rovinescu en mars dernier, tel que prévu au troisième anniversaire de son contrat, la rémunération de la haute direction d'Air Canada frôle les 15 millions pour l'exercice 2011.

Une telle valeur en salaires et primes est supérieure de 68% à celle déclarée pour 2010, et plus du double des 6,7 millions déclarés pour 2009.

En comparaison, durant l'exercice 2011, les résultats d'Air Canada se sont dégradés en perte nette de 255 millions. C'est sept fois plus que la perte de 2010 et le pire résultat net d'Air Canada depuis l'année du krach financier de 2008.

Cette dégradation des résultats s'est poursuivie au trimestre terminé le 31 mars. Vendredi dernier, Air Canada a divulgué une perte nette multipliée par 10, à 211 millions, pour son premier trimestre, ce qui a forcé le président Rovinescu à nier les rumeurs d'insolvabilité prochaine du transporteur lourdement endetté.

Selon Air Canada, cette autre perte trimestrielle a été aggravée par des «frais spéciaux» liés à la fermeture du sous-traitant d'entretien d'avions Aveos.

Du côté des actionnaires d'Air Canada, ils ont subi en 2011 de fortes turbulences baissières en Bourse contrairement à la rémunération de ses dirigeants.

En fin d'année, les actions (catégorie B) affichaient une valeur effondrée de 71% en 12 mois. Un tel piqué en Bourse était évidemment dramatique par rapport à l'indice S&P/TSX de la Bourse de Toronto, en rendement négatif de 8% en 2011.

Mais comparativement à ses semblables, Air Canada a fait bien pire en Bourse en 2011 que son concurrent WestJet, dont les actionnaires ont subi un rendement négatif limité à 15%.

Les actionnaires des principaux transporteurs américains, pourtant éprouvés en 2011, ont aussi fait moins pire que ceux d'Air Canada.

Le sous-indice du transport aérien parmi le grand indice S&P 500 de la Bourse américaine affiche un rendement négatif de 37% en 2011, la moitié moins que la déprime des actions d'Air Canada.

Dans ce contexte, est-ce que des actionnaires déçus se manifesteront à l'assemblée du 4 juin, à Calgary?

Loin de Montréal

Peu de Montréalais devraient en être, cependant. Parce que, pour la première depuis son retour en Bourse en 2006, Air Canada tiendra son assemblée d'actionnaires loin de son siège social montréalais. Les cinq assemblées antérieures ont eu lieu au siège social mondial de l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI), à Montréal.

De plus, cette délocalisation d'assemblée à Calgary peut suggérer qu'Air Canada veut réduire le risque de manifestation par des licenciés d'Aveos, son ex-affilié en entretien d'avions.

Ces licenciés de la récente faillite d'Aveos ont manifesté bruyamment à Montréal le mois dernier au cours de l'assemblée de dissolution de la société ACE, créée en 2004 lors de la restructuration financière d'Air Canada.

Interpellé par La Presse Affaires à ce sujet, Air Canada a répondu par un courriel de son porte-parole, John Reber, que «cette décision [de tenir l'assemblée à Calgary] a été prise plus tôt cette année, car il fallait du temps pour trouver et réserver un lieu et s'assurer que le personnel concerné puisse assister à l'événement».

Aussi, en allant hors de Montréal où est son siège social, Air Canada dit vouloir «reprendre son habitude d'alterner les villes» comme il le faisait avant son retrait de la Bourse, lors de sa restructuration d'insolvabilité.

Selon M. Reber, Air Canada «changeait alors de ville [d'assemblée] tous les ans afin de donner l'occasion à des actionnaires de différentes régions du pays d'y assister».

De plus, «cela permet à [l']équipe de direction de rencontrer des clients et partenaires à l'occasion d'événements organisés avec l'assemblée».