Les grandes décisions ont été prises. Après avoir jonglé avec la possibilité de lancer un tout nouvel appareil pour remplacer l'A320, Airbus a décidé de lui donner un nouveau moteur. Alors qu'il ne devrait entrer en service qu'en 2015, l'A320 Neo est déjà un grand succès, avec près de 1200 commandes fermes.

Après des mois d'hésitation, Boeing a suivi l'exemple d'Airbus et a lancé un 737 remotorisé. Le 737 MAX se dirige également vers un succès avec 900 commandes fermes et lettres d'intention.

Embraer a aussi pris une décision: elle ne lancera pas d'appareil pour concurrencer directement la CSeries de Bombardier et se concentrera plutôt sur sa famille de biréacteurs régionaux E-Jets.

«Toutes les entreprises ont mis cartes sur table, note l'analyste américain Adam Pilarski, de la firme Avitas. En 2012, personne ne parlera de ce que feront Boeing, Airbus ou Embraer, parce que tout a été décidé. On ne s'attend à rien de spécifique en terme de nouveaux produits, à rien d'excitant.»

L'année 2012 ne sera pas ennuyante pour autant.

«Ce qui risque de créer de l'émoi, c'est la situation économique en Europe, la possibilité d'une récession, les prix du carburant», indique M. Pilarski.

La crise de la zone euro inquiète particulièrement l'Association du transport aérien international (IATA).

Les dettes souveraines, plus importante menace

«La pire menace pour la rentabilité des compagnies aériennes dans les prochaines années réside dans les bouleversements économiques qui pourraient survenir si les gouvernements n'arrivent pas à régler la crise des dettes souveraines dans la zone euro, déclare le directeur général et chef de la direction de l'IATA, Tony Tyler. Un tel scénario pourrait entraîner des pertes de plus de 8 milliards de dollars US, les pires depuis la crise financière de 2008.»

Même sans ce scénario catastrophe, les perspectives de l'industrie du transport aérien sont un peu moins reluisantes que prévu: l'IATA prévoit maintenant des profits de 3,5 milliards US pour 2012, alors qu'elle prédisait des profits de 4,9 milliards US il n'y a pas si longtemps.

Il s'agit quand même de profits, et le Conference Board du Canada rappelle que les marchés de l'extérieur de l'Amérique du Nord et de l'Europe sont en pleine croissance.

«Le secteur de l'aviation commerciale bénéficiera de cette croissance dans les marchés émergents, fait savoir l'organisme dans un récent rapport sur l'industrie aéronautique. De plus, le développement d'avions moins énergivores va générer de plus en plus d'occasions de croissance dans les années à venir.»

La firme américaine Forecast International prévoit de son côté que le secteur de l'aviation d'affaires entamera un lent retour à la croissance en 2012, après trois années de déclin.

«La production de biréacteurs d'affaires montrera des signes d'amélioration en 2012, mais il faudra attendre 2013 pour voir une croissance substantielle de la production», affirme l'analyste Raymond Jaworowski, de Forecast International.

Le ralentissement a particulièrement touché les plus petits appareils. Les plus gros, comme les avions de Gulfstream et la famille Global de Bombardier, ont évité l'essentiel de la zone de turbulences. Forecast International prévoit que la différence entre les deux marchés va finir par s'estomper et que les plus petits appareils reprendront leur essor.

L'optimisme n'est toutefois pas au rendez-vous du côté de la défense. Les États-Unis et l'Europe réduisent leurs budgets. À Washington, un comité du Congrès n'a pas réussi à s'entendre sur un plan de réduction du déficit, déclenchant ainsi des compressions automatiques de 1200 milliards US tant du côté du budget de la défense que du côté des dépenses civiles.

Le Pentagone a déjà fait savoir qu'il allait réduire le prochain lot du Joint Strike Fighter (F-35) de 35 à 30 appareils.

«La bonne nouvelle, c'est que la faiblesse de ces marchés pourra être compensée par l'émergence de nouveaux marchés, indique le Conference Board. L'Inde, l'Arabie saoudite, le Brésil et les Émirats arabes unis ont tous annoncé des projets d'acquisitions majeures dans le domaine de la défense.»