Le président du syndicat représentant les employés du service à la clientèle d'Air Canada voit d'un mauvais oeil la décision du transporteur de contester le jugement d'un arbitre au sujet des prestations de retraite.

Dans des documents déposés en cour fédérale, le transporteur aérien conteste la décision de créer un régime de retraite à double structure, dont les conditions varient selon la date d'embauche des employés, et demande au tribunal d'étudier la façon dont s'y est pris un arbitre pour arriver à cette décision exécutoire le mois dernier.

Selon le directeur national du syndicat des Travailleurs canadiens de l'automobile, Ken Lewenza, la demande d'Air Canada équivaut à une violation de la convention collective.

«S'ils pensent qu'ils peuvent simplement renvoyer une solution acceptée d'un commun accord à un système judiciaire, alors pour moi, cela remet en question toute l'intégrité de la convention collective», a déclaré M. Lewenza.

«Ces gars croient qu'ils sont plus importants que la loi, ils croient qu'ils sont plus important que la négociation collective et de toute évidence, je crois que cela nuit au genre de relation que nous aurons à l'avenir.»

L'arbitre s'était rangé du côté de la proposition du syndicat en faveur d'un régime de pension hybride. Les agents du service à la clientèle nouvellement engagés jouiront ainsi d'un régime «mixte» à prestations et à cotisations déterminées, tandis que les employés actuels continueront à profiter d'un régime de retraite à prestations déterminées.

Mais selon Air Canada, l'arbitre Kevin Burkett a injustement accepté une offre de dernière minute des TCA, présentée après le dépôt de la proposition finale de chaque partie.

«La juridiction du conseil était expressément limitée à la sélection d'une des deux offres finales et il a outrepassé sa juridiction en sélectionnant une troisième offre qui n'était pas une offre finale», fait valoir le transporteur dans sa demande de révision, déposée la semaine dernière à la cour fédérale et de l'Ontario.

Air Canada conclut que la décision de l'arbitre était illégale et demande à la cour de la rejeter.

La compagnie a réfuté lundi que sa demande de révision puisse violer les termes de la convention collective.

«Les révisions judiciaires sont une option établie et dans ce cas particulier, nous craignons que M. Burkett ait agi au-delà de sa juridiction», a indiqué par courriel le transporteur.

Air Canada a soutenu que l'arbitre semble avoir répondu à une question ne lui ayant pas été adressée.

«Étant donné les incertitudes quant au dénouement de causes similaires avec d'autres groupes de syndiqués et l'impact que pourrait avoir cette décision, il a été jugé prudent et responsable d'agir ainsi», ajoute-t-on.

Mais M. Lewenza affirme qu'Air Canada avait accepté de permettre au syndicat de remplacer son offre finale et avait aussi amendé sa propre offre.

Selon M. Lewenza, la contestation entreprise par Air Canada signifie que le syndicat devrait lui aussi pouvoir violer l'entente, possiblement par une action directe qui pourrait inclure des manifestations, des grèves du zèle ou même une grève.

«Cela pourrait nécessiter, encore une fois, une action directe de la part de nos membres», a-t-il indiqué. «Je sais que c'est terrible et que c'est un inconvénient pour nos clients, mais quelque chose doit être fait pour l'environnement des relations de travail chez Air Canada.»

Les deux parties ont finalement conclu un accord cet été après une dispute de plusieurs mois qui a donné lieu à une grève de trois jours et à une menace d'une loi de retour au travail du gouvernement fédéral.

Selon M. Lewenza, ce nouvel obstacle pourrait entraîner différents problèmes au transporteur dans ses négociations avec d'autres syndicats, notamment avec le Syndicat canadien de la fonction publique, qui représente les agents de bord dans un autre dossier qui se retrouvera bientôt en arbitrage.

«Ils sont toujours aux prises avec de multiples problèmes de négociations - avec les pilotes, avec les agents de bord - et malgré tout, ils veulent continuer à exacerber les problèmes de relations de travail qu'ils connaissent», a observé M. Lewenza.

Un arbitre émettra un jugement exécutoire dans environ deux semaines pour ce qui est du contrat de travail des agents de bord. En vertu des lois fédérales du travail, les employés dont les négociations se retrouvent devant un arbitre ne peuvent ni déclencher de grève, ni subir de lock-out.

Les quelque 6800 agents de bord d'Air Canada ont rejeté deux ententes de principe négociées par leur syndicat cette année. Les employés ont menacé de faire la grève le mois dernier et se plaignent des concessions que leur ont imposées le transporteur ces dernières années.

Quant aux agents du service à la clientèle, l'accord conclu cet été avec les TCA est toujours valide, a expliqué M. Lewenza, mais la mise en place du nouveau régime de retraite est suspendue.

Ken Lewenza a envoyé une lettre au président et chef de la direction d'Air Canada, Calin Rovinescu, pour lui demander de retirer la demande de révision de l'entreprise.

L'action d'Air Canada (TSX:AC.B) cédait lundi trois cents, soit un peu plus de deux pour cent, à la Bourse de Toronto, où elle se transigeait à 1,34 $.