La Société de transport de Montréal (STM) veut vendre des crédits de carbone. Forte de ses nouveaux autobus hybrides moins polluants, la Société vient de lancer un appel d'offres pour dénicher une firme capable d'estimer la valeur de ses réductions d'émissions de gaz à effet de serre sur le marché.

La STM ne compte actuellement que 8 autobus hybrides dans son parc de 1680 véhicules, mais veut graduellement augmenter leur nombre.

D'ici à 2012-2013, tous les nouveaux véhicules achetés seront hybrides.

Or, en brûlant moins de carburant, les autobus hybrides évitent l'émission de gaz à effet de serre dans l'atmosphère. C'est en discutant avec les financiers qui l'aident à se protéger contre les fluctuations des prix de l'essence que la STM a réalisé qu'elle pourrait peut-être tirer profit des nouveaux véhicules en vendant des crédits de carbone.

«On avait entendu parler des Bourses du carbone à Montréal et à Chicago, mais on était très peu au fait qu'il existait un marché pour échanger des crédits de carbone volontaires. On a entamé des discussions et on a décidé de creuser la question», explique Jean-François Plante, gestionnaire de la trésorerie, budgets et investissements, à la STM.

Pour savoir si le jeu en vaut vraiment la chandelle, la Société a donc lancé un «appel d'offres sur invitation» pour trouver une firme capable d'évaluer le potentiel des crédits de carbone déjà générés et de ceux qui le seront dans l'avenir. Le gagnant devrait être choisi d'ici septembre.

Ce désir de participer au marché du carbone découle d'un projet pilote lancé en 2007 avec la Société de transport de l'Outaouais. Dans le cadre de ce projet, huit autobus hybrides et six autobus traditionnels fonctionnant uniquement au diésel ont été équipés de compteurs. On les a fait rouler pendant un an pour comparer leurs consommations d'essence.

Résultat: les autobus hybrides ont permis de réduire la consommation de carburant de 30%, un résultat assez intéressant pour que la STM décide de miser sur les autobus hybrides dans l'avenir.

En calculant qu'un autobus parcourt 70 000 kilomètres par année, chaque autobus hybride permet ainsi d'éviter l'émission de 36 tonnes de CO2 dans l'atmosphère.

Ces tonnes de carbone qui ne polluent pas l'atmosphère, la STM aimerait les vendre. Qui voudrait les acheter? Des entreprises qui souhaitent contrebalancer leurs propres émissions pour pouvoir se targuer d'être carboneutres, par exemple. Ou d'autres qui pourraient bientôt être obligées de le faire... en vertu de la loi.

M. Plante suit en effet de près l'implantation de la Western Climate Initiative, marché du carbone qui devrait regrouper des provinces canadiennes dont le Québec et des États américains dont la Californie.

Ces États obligeront leurs entreprises à réduire leurs émissions. Pour remplir leurs obligations, celles-ci devront soit faire des efforts à l'interne, soit acheter les crédits d'autres entreprises qui, comme la STM, ont fait ces réductions.

«Est-ce qu'on va voir un marché légiféré comme le marché européen, où la valeur des crédits est de très loin supérieure à celle des crédits volontaires? Est-ce que nos crédits s'inscriront là-dedans? On ne le sait pas encore, mais on espère que oui», dit M. Plante.

Pour l'instant, même dans ce scénario optimiste, les crédits générés par les huit autobus de la STM rapporteraient des sommes très modestes. Dans son projet de règlement déposé plus tôt ce mois-ci, Québec propose un prix plancher de 15$ par tonne. À ce prix, les réductions actuelles de la STM ne vaudraient que 4320$.

Ces revenus sont évidemment appelés à augmenter avec le nombre d'autobus hybrides sur les routes.

«On est aux balbutiements du projet, dit M. Plante. Nous sommes conscients qu'on ne paiera pas nos autobus avec ça. Mais, pour nous, additionnés aux économies d'essence, on pense que les crédits peuvent devenir un extra intéressant.»