Le marché des avions d'affaires en multipropriété est confronté à d'intenses turbulences, mais Bombardier (T.BBD.B) croit posséder la recette pour tirer son épingle du jeu.

Flexjet, une filiale de Bombardier, permet aux gens d'affaires et aux bien nantis d'acheter une part dans un jet d'affaires, ce qui est plus avantageux pour ceux qui n'ont pas besoin régulièrement d'un appareil. Ainsi, l'achat d'un seizième d'avion permet à un client de l'utiliser 50 heures par année.

À l'instar de l'aviation d'affaires en général, la multipropriété a fortement pâti de la crise économique. Bombardier ne divulgue pas les résultats détaillés de Flexjet, mais en consultant ses états financiers, on apprend que les revenus de la filiale ont plongé de 144 millions de dollars américains au cours des trois derniers trimestres par rapport à l'an dernier.

Le nombre d'heures de vol et la valeur des parts d'avions ont reculé de 10 à 30 pour cent depuis le sommet enregistré en 2007.

«Ce qu'on voit, c'est que nos clients adoptent une attitude d'attente, de sorte qu'ils sont plus hésitants à s'engager dans des contrats à long terme», affirme Sylvain Lévesque, vice-président marketing de Flexjet, au cours d'un entretien téléphonique.

«Par contre, ils sont plus intéressés par des contrats à plus court terme et la location d'avions», a-t-il ajouté.

Depuis le début de l'année, Flexjet n'a commandé que trois avions Learjet et Challenger à Bombardier, alors qu'en 2007 et en 2008, on parlait d'environ 20 appareils par année.

Comme Flexjet se départit régulièrement de ses avions les plus vieux, la taille de sa flotte a diminué, passant de 102 appareils au 31 janvier à environ 90 aujourd'hui. L'entreprise, qui compte aujourd'hui plus de 800 employés, a donc dû procéder à des licenciements, mais refuse de les chiffrer publiquement.

Lente reprise

Selon plusieurs analystes de l'industrie, le secteur de l'aviation d'affaires en multipropriété traverse actuellement une profonde crise. Après une croissance soutenue entre 1995 et 2000, le créneau a connu un ralentissement, puis est reparti sur les chapeaux de roues de 2004 à 2007.

La récente annulation de la plus grosse commande d'avions d'affaires de l'histoire, celle de 1,5 milliard passée par l'exploitant en multipropriété européen Jet Republic à Bombardier, a prouvé que le marché ne pouvait pas croître éternellement à un rythme effréné, a estimé l'analyste américain Brian Foley dans un récent rapport.

«Le problème, c'est que le modèle d'affaires des exploitants d'avions en multipropriété est fonction d'une croissance rapide», a écrit M. Foley.

Pour Flexjet et le numéro un du secteur aux États-Unis, NetJets, propriété du conglomérat Berkshire Hathaway de Warren Buffet, Brian Foley entrevoit toutefois des signes positifs. Premièrement, en raison du stigmate désormais associé aux jets d'affaires aux États-Unis, les clients risquent de préférer la multipropriété et la location à l'achat d'un avion entier. Ensuite, la crise fera disparaître les concurrents de plus petite taille.

«C'est un marché dont la proposition de valeur est très forte, soutient Sylvain Lévesque. Il y a un besoin client qui est là et on est très optimistes quant à l'avenir des avions en multipropriété sous toutes ses formes.»

M. Lévesque ne se risque toutefois pas à prédire à quel moment la demande retrouvera le sommet de 2007. L'analyste Rolland Vincent ne croit pas que ce sera avant plusieurs années.

«Mais il ne faut pas oublier qu'on est nettement viables et profitables à des niveaux de demandes beaucoup plus bas», souligne le dirigeant de Flexjet.

«On est actuellement dans un marché qui est stable et qui montre des signes de remontée certains, précise-t-il. (...) On voit un raffermissement des prix et une vélocité de la demande qui, de mois en mois, nous encourage.»

Outre la multipropriété et la location, Flexjet offre des vols nolisés sur demande et la gestion d'avions d'affaires. La moyenne d'âge de ses appareils est de moins de trois ans.

Environ 10 pour cent des clients de l'entreprise sont canadiens. Trois de ses avions sont d'ailleurs basés à Montréal pour les desservir. Certains clients se rendent jusque dans le Nord du Québec avec les appareils de Flexjet.

L'action de Bombardier a clôturé jeudi à 4,79$, en baisse de 0,8 pour cent, à la Bourse de Toronto.