En dépit de la tempête qui secoue l'industrie aéronautique, Bombardier (T.BBD.B) a décidé d'aller de l'avant avec le projet de CSeries en procédant à la première pelletée de terre du complexe de Mirabel.

Le vaste projet de 3,4 milliards US, financé par Bombardier, ses partenaires et les gouvernements du Canada, du Québec et de la Grande-Bretagne, est tranquillement en train de devenir réalité, après avoir suscité une bonne dose de scepticisme.

« Certains pourraient être étonnés de nous voir investir autant dans le domaine de l'aviation commerciale, a déclaré le président de Bombardier Aéronautique, Guy Hachey, hier matin. À court terme, ce secteur a connu et connaît encore sa part de difficultés. Mais les soubresauts de l'économie ne doivent pas nous tromper. »

Il a expliqué que l'industrie aéronautique devait travailler sur des horizons de 15 à 20 ans. Or, à son avis, les perspectives de l'aviation commerciale sont « extrêmement positives « : les échanges commerciaux vont continuer à s'intensifier, ce qui va stimuler le transport aérien.

En outre, les transporteurs aériens devront envoyer à la retraite un grand nombre d'appareils vieillissants de 100 à 149 places. Ces avions sont polluants, bruyants et peu performants. Il s'agit d'un marché potentiel de 6300 appareils. Bombardier espère en capturer la moitié.

« Chez Bombardier Aéronautique, nous maintenons le cap sur l'investissement dans de nouveaux produits en dépit des temps économiques difficiles que nous traversons, a déclaré M. Hachey. Un avion bien construit est capable de résister aux turbulences. Il suffit de s'ajuster, et non de rebrousser chemin. »

Un millier de personnes dans la régions montréalaise travaillent déjà au projet de CSeries. Ils seront 3500 d'ici quelques années, dont 1300 à l'usine d'assemblage final de Mirabel et 1150 à l'usine de Saint-Laurent, où seront fabriqués la cabine de pilotage et le fuselage arrière de l'appareil.

« On parlait beaucoup, il y avait beaucoup de sceptiques, il y avait des gens qui n'y croyaient pas, mais quand tu vois les investissements qui sont faits, quand tu vois qu'ils ont commencé à construire les bâtiments, c'est du concret, c'est encourageant, a lancé Dave Chartrand, de la section locale 712 de l'Association internationale des machinistes et des travailleurs de l'aérospatiale (AIMTA). Ça met un baume sur la plaie. »

Il a rappelé que les syndiqués s'inquiétaient au sujet de la situation économique actuelle. Ils voient bien que les ventes des biréacteurs régionaux ne décollent pas.

« Les gens se disent maintenant que s'il arrive quelque chose, au moins, ce sera à court terme, a indiqué M. Chartrand. D'ici deux ans, avec la CSeries, ça va repartir. »

Le premier immeuble du complexe de la CSeries qui s'élèvera à Mirabel, derrière l'usine actuelle des biréacteurs régionaux CRJ700 et CRJ900, servira à tester et mettre à l'épreuve les systèmes de la CSeries. Ces tests seront effectués un an avant les premiers essais en vol.

« C'est un sérieux avantage car nous pourrons ainsi identifier les problèmes potentiels liés à l'utilisation de nouvelles technologies de pointe et la mise en place de nouveaux procédés avancés et ainsi y apporter des solutions », a déclaré le vice-président des avions commerciaux de Bombardier, Benjamin Boehm.

À venir jusqu'à maintenant, le carnet de Bombardier ne comprend que 50 commandes fermes pour la CSeries, soit 30 appareils pour Lufthansa et 20 pour la firme de location Lease Corporation International.

« Nous nous attendons à décrocher plus de commandes, mais avec la situation économique actuelle, c'est un défi, a déclaré M. Hachey. Nous allons quand même de l'avant. Nous parlons à plus de 150 lignes aériennes, et les discussions sont avancées avec plus d'une douzaine. »