Alors que Transat s'oppose avec véhémence aux futurs quotas d'émissions de gaz à effet de serre (GES) de l'Union européenne, Bombardier compte en tirer profit.

En fin de semaine, la Commission européenne a publié une liste comprenant les noms de quelque 4000 transporteurs aériens et exploitants d'avions, dont plusieurs du Canada, à qui s'appliquera la politique à compter de 2012.

Les grands transporteurs comme Air Canada et Air Transat font partie du lot, mais aussi Bombardier et plusieurs autres entreprises qui possèdent des jets d'affaires.

En vertu du système communautaire d'échange de quotas d'émission de GES, les exploitants d'avions devront acheter des permis s'ils polluent davantage que la limite qui leur sera accordée par la Commission européenne. En revanche, si leurs émissions sont moins élevées que ce que leur permettent leurs quotas, ils pourront revendre la portion inutilisée de ceux-ci à d'autres entreprises.

Plus tôt cette année, le président et chef de la direction de Transat, Jean-Marc Eustache, ne s'est pas gêné pour décrier l'initiative européenne.

«Transat n'approuve pas l'approche mise de l'avant par les Européens en raison de son caractère unilatéral», a-t-il affirmé dans le plus récent rapport annuel de l'entreprise.

«Nous préconisons plutôt des solutions multilatérales, élaborées sous les auspices de l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI) et de l'Association internationale du transport aérien (IATA), qui paveraient à des conditions de marché aussi uniformes et équitables que possible», a-t-il ajouté.

De son côté, Bombardier se formalise peu que le futur système soit limité à l'Europe. Le constructeur d'avions et de trains voit surtout dans les futures exigences une occasion en or de convaincre les transporteurs aériens et les autres propriétaires d'aéronefs de rajeunir leurs flottes.

«Nous offrons des avions qui ont une empreinte environnementale de plus en plus petite, a déclaré Marc Duchesne, porte-parole de Bombardier Aéronautique, au cours d'un entretien téléphonique. On pense à la (future gamme d'avions commerciaux) CSeries, on pense au (turbopropulsé) Q400. C'est une tendance lourde dans le milieu de l'aviation, alors on va essayer d'en tirer le meilleur parti, c'est clair.»

Chez Air Canada, on prépare actuellement le premier rapport sur les émissions de GES, que tous les exploitants d'avions en sol européen devront remettre aux autorités entre le 31 août et la fin octobre.

Isabelle Arthur, porte-parole d'Air Canada, n'a pas pu dire si l'entreprise allait contester le futur système de l'Union européenne, s'en remettant à l'IATA, qui représente la plupart des transporteurs aériens de la planète.

«Nous nous concentrons sur ce qu'il faut faire pour être prêts et avoir le plan pour respecter toutes les exigences (de l'Union européenne)», a-t-elle affirmé au cours d'un entretien téléphonique.

Or, l'IATA a fustigé le futur système européen, estimant qu'il coûterait pas moins de 5,4 milliards aux transporteurs du monde.

Malgré son opposition au projet des Européens, Transat entend tout de même se conformer aux nouvelles règles et prépare actuellement son premier rapport sur ses émissions.

Le voyagiste montréalais n'a pas l'intention de faire pression directement sur l'Union européenne pour faire changer les choses. Il compte plutôt sur le lobbying du Conseil national des lignes aériennes du Canada auprès du gouvernement fédéral, dans l'espoir qu'Ottawa communique les revendications de l'industrie à l'Union européenne.

Il a été impossible d'obtenir les commentaires du Conseil national des lignes aériennes.

Quant à l'OACI, dont le siège est à Montréal, elle n'a rien contre le système européen, mais préférerait un régime mondial, applicable à la grandeur de la planète. Cependant, comme c'est le cas pour tout ce qui touche aux émissions de GES, les pays ont du mal à s'entendre sur les objectifs de réduction.

En juin, un groupe de travail de l'OACI a recommandé à l'organe des Nations unies d'imposer à l'industrie une amélioration annuelle de 2% du rendement du carburant du parc aérien de l'aviation civile. Cela représenterait une amélioration cumulative de 13% de 2010 à 2012, de 26% d'ici 2020 et de 60% d'ici 2050.

Le conseil de l'OACI se penchera sur le rapport du groupe de travail lors d'une réunion en octobre.

En milieu d'après-midi, mardi, l'action de Bombardier s'échangeait à 4,09$, en hausse 2,3%, tandis que celle de Transat perdait 2,7% à 14,89$ et celle d'Air Canada cotait à 1,72$, en baisse de 1,2%, à la Bourse de Toronto.