Alors que l'industrie québécoise de l'aéronautique affronte la tempête, elle se prépare activement au retour des beaux jours.

Elle veut surtout éviter ce qui s'est passé lors de la dernière crise, au lendemain des attentats de septembre 2001: les mises à pied massives dans le domaine de l'aéronautique avaient découragé les jeunes qui étaient tentés par le secteur. Ce qui avait fini par créer un problème de relève lors de la reprise.

«Nous avons fait peur aux gens, ça a vidé les écoles, a commenté le directeur du développement des affaires chez Bell Helicopter Textron Canada, Michel Legault, hier, en marge de l'assemblée annuelle d'Aéro Montréal, un organisme qui représente tous les acteurs du secteur aérospatial. Nous en avons souffert jusqu'à tout récemment.»

Depuis le début de 2009, les mises à pied se succèdent à nouveau en aéronautique. Mais cette fois-ci, l'industrie québécoise continue à se préoccuper au sujet de la relève. Aéro Montréal a rendu public hier un plan d'action portant sur la formation de la prochaine génération d'ingénieurs et de spécialistes en aérospatiale.

Travail multidisciplinaire

«Il faudra mettre davantage l'accent sur le travail multidisciplinaire, le leadership, l'esprit d'équipe et l'engagement envers le client et les actionnaires», a déclaré Fassi Kafyeke, chef du service d'aérodynamique avancée de Bombardier Aéronautique.

Il faudrait également rapprocher encore davantage les universités et les entreprises, notamment en multipliant les stages des étudiants et en permettant aux professeurs d'effectuer des séjours en entreprise. C'est ainsi qu'un professeur de Polytechnique vient de passer trois mois chez Bombardier.

L'industrie veut aussi amener plus de jeunes à choisir une carrière d'ingénieur en aérospatiale. Et ce, en dépit du ralentissement actuel.

«Un jeune qui s'engage dans un programme va obtenir son diplôme dans trois ou quatre ans, a fait remarquer le chef de l'exploitation de CAE, Marc Parent. À ce moment-là, l'industrie sera repartie et nous aurons besoin de ces gens.»

Il a raconté qu'il avait obtenu son diplôme d'ingénieur en 1984, en pleine crise, et que certains avaient alors émis des doutes quant à sa volonté d'aller dans le domaine de l'aéronautique.

«J'ai fait le bon choix», a-t-il soutenu.

Il a rappelé qu'en dépit des crises, l'emploi dans le domaine de l'aéronautique avait connu une croissance annuelle de près de 10% au cours des dernières années.

«Dans l'industrie, le niveau d'emploi a monté et a descendu au cours des dernières 40 années, mais il a monté davantage qu'il n'a descendu», a renchéri le président de Pratt&Whitney Canada, John Saabas.

Retraites à venir

Il a rappelé le poids de la démographie: au cours des cinq prochaines années, un groupe important d'ingénieurs prendra sa retraite.

Le chef de la direction de Sonaca NMF Canada, Philippe Hoste, a indiqué que le ralentissement actuel permettait justement de s'attaquer au problème de la relève.

«Lorsqu'il y a augmentation de cadence, c'est extrêmement difficile, ça mobilise beaucoup de ressources, a-t-il affirmé. Maintenant, c'est le bon moment pour s'attaquer à cette problématique.»

Le président et chef de la direction d'Héroux-Devtek, Gilles Labbé, a rappelé de son côté qu'en dépit du ralentissement, les entreprises continuaient à investir dans la recherche et le développement, et qu'il y avait donc toujours un certain besoin en ingénierie.

«Pendant la période difficile, nous allons développer de nouveaux produits, a-t-il expliqué. Lorsque la période difficile sera terminée, d'ici deux ou trois ans, ces nouveaux produits seront prêts.»