L'ancien banquier d'UBS Raoul Weil, qui comparaissait aux États-Unis pour aide à l'évasion fiscale, a été acquitté lundi, infligeant un sérieux camouflet aux autorités américaines.

A l'énoncé du verdict, M. Weil s'est effondré en larmes, tombant dans les bras de son épouse, a constaté un journaliste de l'AFP. Il risquait cinq ans de prison et une très lourde amende.

Il aura fallu à peine deux heures de délibération aux jurés du tribunal de Fort Lauderdale, en Floride, pour blanchir l'ancien responsable de la gestion de fortune de la banque suisse UBS qui comparaissait libre depuis la mi-octobre.

Les charges qui pesaient sur lui n'étaient pas minces: selon l'accusation, M. Weil avait joué un rôle actif dans une immense fraude fiscale ayant permis à 20 000 riches clients américains d'échapper au fisc en dissimulant quelque 20 milliards de dollars.

Selon le ministère de la Justice, un groupe de banquiers chez UBS démarchaient les riches Américains aux États-Unis sans en avoir le droit, leur ouvraient des comptes secrets et utilisaient des ordinateurs cryptés pour éviter que la manipulation ne soit découverte.

«C'est un cas très simple. Dès 2001, M. Weil était au courant de ces pratiques et il y a participé», a affirmé lundi le procureur, Jason Poole, dans son réquisitoire.

Dans le collimateur de la justice pour ces pratiques, UBS n'avait échappé aux poursuites qu'en payant une amende de 780 millions de dollars et en acceptant de collaborer pleinement avec les autorités américaines.

Pour ce procès emblématique, le ministère public s'était appuyé sur des millions de documents mais aussi sur le témoignage d'anciens subalternes de M. Weil, qui ont été dédouanés en échange de leur collaboration avec la justice.

Témoin clé de l'accusation, Martin Liechti a déposé pendant plusieurs jours à la barre en chargeant son ancien supérieur et en brossant de lui le portrait d'un homme cupide et manipulateur.

«Je lui ai dit plusieurs fois: ce business est un cauchemar», avait notamment déclaré le témoin, ajoutant: «C'était vraiment frustrant. Pour lui, le profit venait en premier.»

Selon son témoignage, M. Weil aurait même freiné la régularisation des clients fraudeurs par appât du gain.

«Vie détruite» 

L'accusation, qui n'a pas souhaité faire de commentaires après l'acquittement, n'a pas réussi à emporter la conviction des douze jurés.

Tout au long des deux semaines de procès, les avocats de M. Weil avaient campé sur leur position: leur client est innocent et a été victime des agissements de ses collaborateurs qui lui ont dissimulé leurs pratiques pour embellir leurs résultats commerciaux.

Dans sa plaidoirie finale, le conseil de l'accusé, Matthew Menchel, a assuré qu'«aucun document» ne prouvait la culpabilité de M. Weil et son implication dans cette fraude fiscale à grande échelle.

«La vie de cet homme a été détruite. Ne l'assassinons pas davantage», a-t-il lancé aux jurés avant qu'ils ne se retirent pour délibérer.

Limogé par UBS, M. Weil avait été arrêté en octobre 2013 en Italie, extradé aux États-Unis et libéré sous contrôle judiciaire moyennant le paiement d'une caution de 10,5 millions de dollars, la restitution de son passeport suisse et le port d'un bracelet électronique.

Pendant l'audience, la défense s'était également efforcée de discréditer les témoins à charge mettant leurs accusations sur le compte de rancoeurs professionnelles et d'un zèle dicté par leur collaboration avec les autorités.

«Il y a toujours eu des tensions dans vos relations de travail entre vous et M. Weil», avait ainsi lancé l'avocat de la défense à M. Liechti.

Le scandale provoqué en 2009 par l'affaire UBS avait suscité un tollé aux États-Unis et conduit les autorités à muscler leur lutte contre l'évasion fiscale.

Un an plus tard, Washington avait ainsi voté la loi Fatca qui oblige depuis juillet dernier les banques à rapporter systématiquement au fisc des États-Unis les comptes et avoirs de leurs clients désignés comme «personnes américaines».