L'arbitre des services financiers joue sa survie. L'Ombudsman des services bancaires et d'investissement (OSBI) pourrait se mettre lui mettre hors jeu, si Ottawa ne clarifie par les règles.

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«Ça devient très difficile de fournir un service crédible, de planifier nos ressources s'il est possible pour les grandes firmes participantes de se retirer sans préavis», a expliqué à La Presse l'ombudsman, Doug Melville.

L'an dernier, la Banque TD s'est retirée de l'OSBI. La Banque Royale avait pris la même décision en 2008. Cependant, les firmes de courtage des deux institutions financières doivent encore traiter avec l'OSBI pour les plaintes qui portent sur les valeurs mobilières, car elles y sont contraintes par l'Organisme canadien de réglementation du commerce des valeurs mobilières (OCRCVM).

L'OSBI traite les plaintes des investisseurs qui n'ont pas réussi à s'entendre avec leur institution financière. Pour le consommateur, ce service gratuit constitue l'une des rares solutions de rechange à une poursuite en justice, longue et coûteuse. L'OSBI est financé par l'industrie qui s'était hâtée de le mettre sur pied, il y a 16 ans, au moment où le gouvernement fédéral menaçait de créer un ombudsman étatique.

Ainsi, le départ des deux plus grandes banques du pays a considérablement déstabilisé l'OSBI. Le conseil d'administration de l'OSBI envisage différents scénarios, y compris la fermeture. «La décision est prématurée. Il y a toujours des discussions avec le conseil», a indiqué M. Melville.

Espoir pour le budget

À la veille du dépôt du budget fédéral, il espère toujours qu'Ottawa impose aux banques de faire partie de l'OSBI. Dans le budget de 2010, le fédéral avait exigé que les banques adhèrent à un organisme de règlement de plaintes, sans préciser lequel.

C'est ainsi que la Banque TD et la Banque Royale ont confié le règlement des plaintes du secteur bancaire à ADR Chambers, une entreprise privée à but lucratif qu'elles paient directement.

«Cette situation pose un réel problème de conflit d'intérêts et pourrait entacher la réputation des mécanismes de règlement de différends externes et indépendants», estime Option consommateurs, qui a déjà fait part de ses préoccupations au ministre des Finances, Jim Flaherty.

De nombreux organismes de défense des investisseurs militent pour que les banques soient forcées d'adhérer à l'OSBI. «Nous avons toujours manifesté un appui très fort à l'OSBI. Du point de vue du consommateur, il est vraiment important d'avoir un seul service indépendant, impartial et crédible pour régler les différends», a répété Ilana Singer, directrice adjointe de Fair Canada.

Avec la multiplication des services de réglementation de différends, il serait difficile d'assurer l'uniformité et la qualité du service.

Des plaintes

D'ailleurs, plusieurs clients insatisfaits de la Banque Royale et de la Banque TD continuent d'appeler à l'OSBI. Ces clients rapportent qu'ADR Chambers a refusé de les aider dans des circonstances où l'OSBI aurait pu examiner leur plainte, par exemple le calcul erroné de taux d'intérêt ou de frais bancaires.

D'autres clients disent avoir été découragés de porter plainte dès le départ. D'autres encore estiment que leur plainte a été traitée dans un délai déraisonnable, rapporte l'OSBI.

«D'après nous, il n'est pas approprié de laisser les banques choisir le service qu'elles veulent utiliser. C'est une question de crédibilité, dit M. Melville. Pour l'intérêt public, il est préférable d'avoir une structure obligatoire où le gouvernement établit le niveau de service. Ottawa doit clarifier la situation.»