La Banque TD (T.TD) profite de nouveau de ses énormes liquidités et des déboires des institutions financières américaines pour grossir.

Hier matin, elle a annoncé l'acquisition, pour 7,5 milliards payables comptant, du portefeuille de 1,8 million de comptes actifs de MasterCard MNBA Canada.

Depuis 2006, MNBA est une filiale de Bank of America, la plus grande banque des États-Unis.

«Cette filiale attirera des clients à la TD, offrira de nouvelles solutions avantageuses à nos clients et viendra compléter notre secteur des cartes de crédit en forte croissance», a expliqué Ed Clark, président et chef de la direction du Groupe Banque TD.

La valeur des recevables du portefeuille s'élèvera à environ 8,5 milliards, mais on estime à 1,1 milliard environ les créances non recouvrables.

MBNA Canada est le plus grand émetteur de MasterCard du Canada, grâce à une promotion de faibles taux d'intérêt pendant les premiers mois suivant l'acquisition de la carte. Son taux de mauvaises créances s'élève à 6,4%, contre 4,3% pour les cartes émises par TD.

En téléconférence avec des courtiers que les journalistes pouvaient écouter, la haute direction a affirmé pouvoir ramener ce taux plus près du sien avant longtemps.

Ces comptes s'ajoutent aux quelque quatre millions que TD détient avec sa carte Visa. Au moment où la transaction sera conclue cet automne, TD possédera la plus grande part du marché canadien des cartes de crédit, avec près de 20%, soit juste un peu plus que celle de CIBC assurée par la popularité de l'Aéro Or. La marque MNBA Canada sera maintenue pendant un peu plus d'un an.

«Cette transaction est cohérente avec la volonté de TD de croître dans un segment où elle est sous-représentée», ont affirmé Brenda Lum et Robert Long, analystes principaux de l'agence de notation de crédit DBRS, dans un courriel hier matin. La maison torontoise maintient donc la note AA de la banque, avec perspective stable.

TD a l'intention d'émettre au Canada huit millions d'actions ordinaires avant le bouclage, ce qui devrait lui permettre de lever environ 600 millions.

Cette acquisition aura une incidence de 20 centièmes sur les fonds propres de première catégorie (Tier 1 Capital) de TD, évalués à 12,7%, à la fin du deuxième trimestre.

Réactions positives

La transaction a été bien accueillie. L'action de TD a gagné environ 1% à Toronto tandis que celle de Bank of America bondissait de près de 8% à New York.

«Avec cette acquisition, TD sera bien placée en tant qu'un des principaux émetteurs au Canada, note Michael Goldberg, analyste chez Valeurs mobilières Desjardins. Nous croyons que cette transaction est un développement positif pour TD car la taille est très importante pour assurer la croissance dans l'industrie canadienne des prêts personnels et commerciaux toujours plus compétitive.»

John Alken, analyste chez Barclays Capital, est du même avis. Il fait remarquer que «le solde moyen d'une carte émise par MBNA est beaucoup plus élevé que celui d'une Visa TD». Au final, les comptes à recevoir de TD sur cartes de crédit vont passer de 8,1 à 16,6 millions.

En vue de redresser ses fonds propres sans diluer ses actionnaires, Bank of America a choisi de se départir de ses portefeuilles de prêts personnels à l'extérieur des États-Unis. Au début du mois, elle avait cédé ses activités de cartes de crédit en Espagne au groupe Apollo Capital Management. En avril, elle avait cédé son segment de cartes de crédit à la PME à Barclays.

Bank of America a été très frappée par la crise des prêts hypothécaires subprimes car une de ses filiales s'en était fait le champion. Elle fait aujourd'hui l'objet de plusieurs poursuites dont une lancée par l'assureur AIG, aussi au coeur de la crise financière de 2008.

En début d'année, TD a acquis, moyennant 6,3 milliards, Chrysler Financial des mains du fonds d'investissement Cerberus Capital Management, très écorché par la faillite en 2009 du constructeur dont il était le principal actionnaire.

Le prêt-auto est le deuxième segment du secteur du crédit à la consommation, tout juste après la carte de crédit.