La Banque Toronto-Dominion (T.TD) accentue son expansion aux États-Unis en achetant l'ex-filiale financière du constructeur automobile Chrysler, désormais contrôlé par l'italien Fiat.

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Avec cette acquisition, confirmée hier à 6,3 milliards US après maintes rumeurs, la Banque TD se hisse parmi les cinq principaux prêteurs du marché automobile en Amérique du Nord.

La Banque TD achète Chrysler Financial et ses 7,5 milliards US d'actif en prêts automobiles des mains du fonds d'investissement Cerberus Capital, de New York.

En 2006 et 2007, Cerberus avait misé plus de 10 milliards US dans l'industrie automobile en acquérant le contrôle de Chrysler et de sa filiale de financement, ainsi que de la filiale financière GMAC de General Motors.

Mais, en moins de deux ans, cette mise de Cerberus fut gravement compromise par la crise financière et l'importante récession dans le marché automobile aux États-Unis.

Pour limiter ses pertes, Cerberus a revendu GMAC et il a cédé Chrysler à Fiat, lors de sa restructuration en protection de faillite. Toutefois, Cerberus a pu garder la filiale financière de Chrysler afin d'y trouver un acheteur à meilleur prix, ce qu'il a réalisé grâce à la TD et à ses ambitions américaines.

Le prix annoncé de 6,3 milliards US permettrait en fait à Cerberus de combler en bonne partie les 7,4 milliards US investis chez Chrysler en 2007, selon des avis d'analystes rapportés hier dans la presse d'affaires américaine.

Il faut souligner que la TD laisse à Cerberus une part d'un milliard de l'actif de Chrysler Financial qui est constituée de prêts autres que pour des véhicules automobiles.

Selon les dirigeants de la TD, cette acquisition s'arrimera favorablement avec ses activités bancaires déjà bien développées dans l'est des États-Unis.

«Cette transaction permettra à la TD d'accroître considérablement son actif de prêts aux États-Unis en échange d'un investissement modeste en capital», estime Michael Goldberg, analyste des banques chez Valeurs mobilières Desjardins.

Par ailleurs, avec la relance attendue du marché automobile, la TD prévoit que cet achat contribuera à ses profits totaux dès son premier exercice complet de consolidation, qui commencera dans un an, en novembre 2011.

Selon la banque, le marché du financement de véhicules automobile aux États-Unis atteint les 700 milliards US et il devrait croître d'au moins 200 milliards US d'ici trois ans.

Par ailleurs, contrairement à l'impression créée par la récente crise dans cette industrie, le marché des prêts automobiles a beaucoup mieux résisté à la «Grande récession» américaine que ceux des prêts hypothécaires et des cartes de crédit.

Selon des chiffres fournis par la TD, le taux de défaillance des prêts automobile s'est maintenu autour de 2% aux États-Unis depuis 2006, alors qu'il a bondi autour de 10% dans les hypothèques et les cartes de crédit.

«Le prix payé par la TD apparaît juste et le risque engagé semble modéré, considérant le potentiel d'affaires avec la reprise du marché automobile américain à moyen terme», selon Peter Rozenberg, analyste des banques chez UBS Investment, à Toronto.

En Bourse, les investisseurs en actions de la TD ont plutôt bien accueilli les détails d'une transaction dont la rumeur courait depuis deux semaines dans le milieu financier.

Les actions de la TD ont gagné 3,6%, à 73,10$. Elles demeurent toutefois sous leur sommet de 76,97$ qui a été atteint le 19 avril dernier.

Cette acquisition multimilliardaire de la TD aux États-Unis - sa deuxième en importance depuis les 8,3 milliards offerts contre Commerce Bancorp en 2008 - coiffe un important trimestre de magasinage d'actifs à l'étranger par des banques canadiennes.

Elles profitent d'un dollar canadien fort ainsi que de bilans financiers qui sont très enviables par rapport aux banques européennes et américaines.

La semaine dernière, la Banque de Montréal (BMO) a annoncé l'achat pour 4,1 milliards US d'une banque régionale du Midwest. Cette banque de 58 milliards US d'actifs s'ajoutera à la principale filiale américaine de BMO, Harris Bank, établie à Chicago.

En octobre, la Banque Royale a annoncé de son côté l'achat à Londres pour 1,5 milliard US de BlueBay Asset Management, spécialisée dans les titres à revenus fixes.