Le portefeuille de la Caisse de dépôt est un peu plus risqué qu'avant, mais il contient plus de bons risques et moins de mauvais risques, comme il y a du bon et du mauvais cholestérol.

«En 2009, la Caisse a réduit les mauvais risques et augmenté les bons risques, ce qui fait qu'au total, le risque n'a pratiquement pas bougé», estime Michel Nadeau, qui a longtemps été le numéro deux de la Caisse de dépôt.

Le grand patron de la Caisse de dépôt, Michael Sabia, soutient avoir réduit le risque du portefeuille d'investissement et son ancien président, Richard Guay, affirme le contraire. Qui a raison? Ni l'un ni l'autre n'a tort, estiment les observateurs interrogés hier.

Pris dans son ensemble, le portefeuille de la Caisse de dépôt est moins risqué qu'il ne l'était sous l'ancienne administration, comme le dit M. Sabia. En tenant compte uniquement des risques de marché, il l'est un peu plus, comme l'affirme M. Guay.

C'est du risque de marché qu'a parlé Richard Guay en entrevue à Radio-Canada. Selon le rapport annuel de la Caisse, le risque total associé au marché a augmenté de 2,92% en 2009, ce qui correspond à la plus grande proportion d'actions dans son portefeuille.

Mais, dans le risque total, «il y a des bons et des mauvais risques, comme il y a du bon et du mauvais cholestérol», illustre Michel Nadeau.

Les mauvais risques, ce sont l'endettement et les produits dérivés complexes, qui ont été considérablement réduits.

Les bons risques, c'est la part des investissements en actions qui est passée de 22,4 à 35,4% du portefeuille de la Caisse en 2009.

Les actions sont un investissement plus risqué que les titres à revenus fixes, comme les obligations, ce qui explique l'augmentation du risque total du portefeuille de la Caisse.

En pratique, ça veut dire que les gestionnaires de la Caisse ont un portefeuille moins risqué à gérer à court terme, croit Denis Durand, de Jarislowsky Fraser, lui aussi un ancien de la Caisse. C'est un portefeuille qui contient moins de dettes et, donc, moins d'effet de levier, et moins de produits dérivés, explique-t-il.

Voir plus clair

Le risque de marché se mesure par un calcul, celui de la valeur à risque (VaR), qui est maintenant calculée tous les jours par la Caisse de dépôt, plutôt qu'une fois par mois comme c'était le cas auparavant. En plus d'être quotidien, le calcul de la valeur à risque a été raffiné afin de tenir compte des événements extrêmes qui peuvent survenir. Ce changement a été critiqué par Richard Guay.

L'ancien président, dont le contrat de conseiller stratégique n'a pas été renouvelé par la Caisse, estime que cette nouvelle façon de calculer le risque tient compte de situations extrêmes qui n'ont qu'une infime chance de se produire. Elle n'est donc pas pertinente pour les gestionnaires de la Caisse qui doivent travailler avec des hypothèses plus réalistes.

Michel Nadeau lui donne raison sur ce point.

Cette nouvelle façon de calculer la valeur à risque pose «une hypothèse ultrapessimiste qui risque d'inquiéter les gens», estime Michel Nadeau. «Ce n'est pas parce qu'on n'a pas prévu une tempête qu'il faut maintenant en prévoir une chaque année», illustre-t-il.

À la Caisse de dépôt, on ne voit pas les choses de la même façon. Avec l'ancienne façon de calculer, la crise de 2008 n'apparaissait pas sur l'écran radar, mais elle serait apparue avec la nouvelle façon, explique Bernard Morency, premier vice-président et responsable des comptes des déposants à la Caisse de dépôt.

«Ça ne nous empêche pas de prendre des risques, soutient-il, mais pour prendre les bons risques, il faut d'abord s'assurer de les identifier tous.» La VaR n'est qu'un des outils utilisés par la Caisse pour évaluer ses risques, relativise-t-il.

Avant de changer la méthode de calcul de la valeur à risque, la Caisse a regardé ce que faisaient les autres gestionnaires de fonds au Canada. Tous ceux qui utilisent cette mesure, de même que les six grandes banques canadiennes, la calculent de la même façon que la Caisse le fait maintenant, selon Bernard Morency.

En plus des risques de marché, la Caisse évalue et quantifie deux autres types de risques, le risque de crédit et le risque de contrepartie, qui ont tous deux été réduits en 2009, indique le vice-président.