Sur son site internet, Frima Studio se positionne comme un endroit attirant où travailler: horaires flexibles, vacances payées durant les Fêtes, fruits frais, massages sur place, laissez-passer de transports en commun, Communauto...

«La pression du marché y est pour quelque chose, explique Steve Couture, PDG de Frima. Le petit terrain de jeu de Québec en conception de jeux vidéo est devenu un endroit où on crée des centaines d'emplois, notamment à cause de la présence d'Ubisoft. Il y a donc eu beaucoup de pression sur le recrutement. Par ailleurs, j'ai eu une prise de conscience quant à la conciliation travail-famille quand je suis devenu papa.»

Qu'est-ce qui distingue notamment cette PME de 350 employés sur le plan des petites attentions en milieu de travail? Son programme de bonification au rendement pour stimuler les bons coups. Régulièrement, les chargés de projets et les responsables gratifient de points les employés qui se démarquent. «Chaque point équivaut à 1$ échangeable contre un chef à domicile, un peintre la maison, un forfait voyage, énumère Steve Couture. Certains accumulent jusqu'à 1000 points.»

Les programmes sont populaires. Plus de 80% des employés se sont prévalus du service de laissez-passer de bus, et 20% du service d'autopartage Communauto.

Pneus d'hiver, pneus d'été

Certaines entreprises rivalisent d'originalité pour améliorer le quotidien de leurs employés. Depuis six ans, ceux du siège social de Tristan ne roulent pas chez leur garagiste pour faire changer leurs pneus. Le garagiste se présente gratuitement à eux... dans le stationnement de l'entreprise! Ou plutôt à elles. «C'est majoritairement féminin ici, note le président Gilles Fortin. Pneus Éclair s'installe avec une roulotte deux fois l'an. Tout ce qu'on a à faire, c'est d'entreposer les pneus. Tous les employés qui ont une voiture en profitent. C'est la plus appréciée de nos petites attentions.»

Par ailleurs, le président de Tristan ne regardera jamais de haut la maman qui entre au bureau un matin avec son bébé, un jour de grève de garderie. «Les chiens aussi sont les bienvenus!», lance-t-il en riant.

En 2013, dans un contexte où la génération Y a le choix de l'emploi, la bonification en milieu de travail est-elle une simple attention ou une obligation? «On a le droit de ne pas le faire, répond Gilles Fortin. Mais on risque de se faire dépasser par la concurrence. C'est un effort qui crée un attachement à l'entreprise. Les 3000$ que ça nous coûte pour le service de changement de pneus valent bien un 5 à 7 d'entreprise!»

«C'est une attention, un plus qui peut faire la différence, souligne Florent Francoeur, PDG de l'Ordre des conseillers en ressources humaines agréés. Les salaires augmentent annuellement de 2 ou 3%. Pas plus. Il faut donc proposer autre chose. Comme l'employé veut du temps et encore du temps, en offrant la possibilité de concilier travail et famille, l'employeur montre qu'il comprend la situation.»

Horaires flexibles

Il y a quelques années à peine, on s'émerveillait devant tous les services et joujoux offerts par la direction de Google dans la Silicon Valley: véhicules mis à la disposition des employés, salle de lavage, salles de jeux... «Il y a eu une mode où c'était cool d'avoir une table de billard au travail, note Florent Francoeur. Mais les employés ont vite réalisé que c'était parce qu'on voulait les retenir au bureau. La bonification se fait désormais davantage par la flexibilité des horaires.»

C'est le cas chez Frima. Également à l'Autorité des marchés financiers (AMF), où un crédit-horaire permet aux employés d'accumuler des heures une semaine pour les reprendre la semaine suivante.

«C'est ce qui a fait la différence quand j'ai décidé de retourner sur le marché du travail, raconte Natalie Brown, analyste expert, service du financement des sociétés, de l'AMF. Mes enfants étaient très jeunes. C'était important d'avoir un horaire flexible, même en sachant que j'allais travailler fort, car mon conjoint était très occupé. Ici, beaucoup d'accent est d'ailleurs mis sur le bien-être de l'employé. On a du yoga le vendredi midi, on encourage les groupes de course à pied. On peut recevoir sur place les vaccins contre la grippe. Je me suis prévalue de presque tous les services!»

Davantage que la machine à café

Cuisinier sur place et menu digne d'un restaurant. En entreprise, le bien-être passe aussi par la panse. À l'agence de publicité Sid Lee, le petit-déjeuner est gratuit avant 9h, on offre des collations à 15h et, le midi, un repas trois services est servi pour 6$ aux 150 premières personnes qui réservent en ligne. Avec ces petites attentions, on fait converger une bonne partie des employés vers le bistro.

«On a beau travailler dans un environnement collaboratif, la réalité, c'est qu'on travaille souvent devant un ordinateur, souligne Yanik Deschenes, vice-président, communications et affaires globales de l'entreprise. Or, le bistro stimule la créativité et la collaboration.»

Les tableaux noirs dispersés dans l'agence autant que le positionnement réfléchi des salles de bains provoquent aussi les échanges. «Beaucoup d'idées se sont développées dans les couloirs ici, dit Yanik Deschenes. On engage des gens pour dessiner sur les tableaux noirs. C'est la marque de commerce de tous nos bureaux.»

Agriculture urbaine

Chez Cossette, à Québec, la terrasse s'apprête à retrouver ses couleurs... et ses légumes, qu'on distribue gratuitement aux 105 employés de cette autre agence de publicité. «Un tiers des employés en profitent, affirme le vice-président Louis Duchesne. C'est agréable de partir à 17h avec du basilic, des tomates et des concombres! L'entreprise Urbainculteurs fait les plantations et l'entretien. L'agriculture urbaine est une idée assez simple.

«La terrasse est un prolongement de notre bureau, ajoute Louis Duchesne. Il fallait absolument exploiter cet espace extérieur. C'est une obligation d'offrir un environnement de travail stimulant et performant. Cela dit, les tomates... c'est une attention.»

Chez la firme d'architecture et de design Aedifica, la salle à manger, spacieuse et éclairée, est un composant essentiel de l'entreprise de 115 employés. Un chef y travaille à temps plein et y mitonne des plats différents chaque jour. Le prix? Huit dollars pour les employés (le reste est payé par l'employeur). «Les salles à manger, c'est une tendance, surtout pour les bureaux éloignés du centre-ville», note Gina Iaquinta, vice-présidente, développement des affaires, aménagement corporatif, d'Aedifica, qui offre aussi laissez-passer de bus, cartes de BIXI et remise en état des vélos. «Chez nous, ça montre qu'on tient à s'occuper de la santé des gens et de leur équilibre familial.»

Le chef François Gagnon prépare de 7000 à 8000 repas par an, que les employés peuvent aussi rapporter à la maison. Coût pour l'entreprise: 0,5% de son chiffre d'affaires. «On économise de l'argent, car bien des réunions avec clients ont lieu ici plutôt qu'au resto, souligne le président Michel Dubuc. Notre budget de représentation a fondu de moitié.»

Même lorsqu'elles exigent une dépense de l'ordre de 100 000$, ces attentions ne sont pas considérées comme exorbitantes par les entreprises. «La possibilité de repartir à la maison avec un repas le soir, ça a de la valeur, note Florent Francoeur, PDG de l'Ordre des conseillers en ressources humaines agréés. On règle souvent les choses par la simple ouverture d'esprit. De telles attentions sont généralement peu coûteuses.»

Mais elles créent de l'envie, comme l'observe Sylvain Hardy, directeur, aménagement corporatif, d'Aedifica: «Ma blonde est très jalouse de mon chef!»