L'incertitude qui plane sur le budget américain de la défense ne plaît pas à l'industrie canadienne, mais un analyste minimise les impacts d'éventuelles compressions sur des entreprises comme CAE et Héroux-Devtek.

«Les dernières grandes compressions du budget de la défense ont eu lieu dans les années 90, rappelle Benoît Poirier, de Valeurs mobilières Desjardins, dans un rapport d'analyse. Le point important à retenir est que ces compressions n'ont pas eu un impact significatif sur les entreprises de la défense.»

À moins d'une entente entre les congressistes républicains et démocrates et le président américain, le couperet tombera automatiquement sur le budget américain le 2 janvier prochain. On parle de compressions de 1200 milliards de dollars US qui s'appliqueront tant du côté des dépenses militaires que des dépenses civiles au cours des 10 prochaines années.

Cette question constitue évidemment un des thèmes majeurs de la campagne électorale américaine actuelle. Les parties sont bien loin d'une entente: les républicains veulent minimiser les compressions dans le budget de la défense, quitte à augmenter les compressions dans les programmes sociaux. Les démocrates s'opposent fermement à cette suggestion.

Si les élections du 6 novembre prochain reconduisent le statu quo, soit une Chambre des représentants républicaine, un Sénat démocrate et Barack Obama à la présidence, le conflit risque de perdurer.

«Toute cette incertitude cause une confusion qui n'aide en rien l'industrie de la défense et l'économie nord-américaine, déplore Tim Page, le président de l'Association des industries canadiennes de défense et de sécurité, dans une entrevue téléphonique avec La Presse Affaires. Nous avons hâte que tout cela soit résolu.»

Il rappelle que 68% des exportations de l'industrie canadienne de la défense prennent le chemin des États-Unis.

«Toute compression au budget américain aura un impact, affirme-t-il. Mais nous ne sommes pas capables de quantifier cet impact parce que nous ne connaissons pas la teneur des compressions et les programmes qui seront touchés.»

L'analyste Benoît Poirier croit toutefois que cet impact ne sera pas significatif sur les entreprises canadiennes de la défense inscrites en bourse qu'il suit, soit CAE, Héroux-Devtek et Hélicoptères canadiens.

Il note que CAE offre des simulateurs de vol et des services de formation par simulation, soit une façon de diminuer les coûts liés à la formation des pilotes et des équipages. Selon les forces aériennes américaines, la formation sur simulateur est 10 fois moins onéreuse que la formation en vol.

M. Poirier souligne aussi que CAE est impliquée dans des programmes qui ont une longue durée de vie, comme l'avion de transport C-130J et l'hélicoptère CH-47 Chinook.

Il ajoute que CAE est de plus en plus présente à l'extérieur des États-Unis, notamment dans des régions émergentes comme l'Asie et le Moyen-Orient, ce qui lui permet de réduire sa dépendance vis-à-vis de la défense américaine.

M. Poirier estime qu'Héroux-Devtek, qui vient de se départir de sa division d'aérostructures, est bien positionnée dans le domaine des trains d'atterrissage, autant du côté militaire que du côté civil.

Il note aussi que cette entreprise de Longueuil est très présente dans le marché de l'entretien et de la réparation, des secteurs qui sont généralement moins touchés par les compressions budgétaires.

M. Poirier souligne finalement la solidité financière du transporteur Hélicoptères canadiens, qui pourrait lui permettre de procéder à des acquisitions. Il indique que des occasions intéressantes devraient se présenter, comme le Plan Nord québécois, qui devrait augmenter les besoins en transport, et la possibilité de récupérer le contrat des hélicoptères ambulances en Ontario.

«Nous croyons que les titres de ces entreprises, notamment CAE et Héroux-Devtek, sont attrayants parce qu'ils se négocient en dessous des moyennes historiques, écrit-il. Alors que nous nous approchons des élections, et que nous aurons plus d'informations sur le débat actuel [le président Obama devrait donner plus de détails le 8 septembre], la valeur des titres devrait augmenter.»