Simon Gervais se rappelle encore avec quelle difficulté il avait dû annoncer à sa centaine d'employés qu'il fallait mettre la clé sous la porte. Il se rappelle les angoisses d'avoir à gérer la fin de son entreprise. Émotivement, on voit qu'il n'est pas sorti indemne de tout cela. Mais ça ne l'empêche pas de se retrouver aujourd'hui derrière le comptoir de sa nouvelle pizzeria, déterminé à faire vivre ses idées et convaincu que l'échec a fait de lui un meilleur entrepreneur.

Simon Gervais nous accueille chez F"F Pizza, ouvert il y a à peine deux mois, rue Notre-Dame Ouest à Montréal (à ne pas confondre avec F&F, de la rue Bernard). F"F, pour frais et fabuleux, un concept de pizzeria au menu original, une formule bistro et de la nourriture fraîche, explique-t-il. «On monte le niveau de qualité de la pizza de livraison», affirme l'entrepreneur gastronome.

Simon Gervais croit que le concept a ce qu'il faut pour qu'il entraîne la création de franchises. Mais il faut gérer la croissance avec prudence. «Je suis maintenant beaucoup plus patient comme entrepreneur», raconte M. Gervais, qui avait confondé Let's Go Design, fabricant de kiosques de foires commerciales, au tournant des années 2000. Le chiffre d'affaires est passé de 0 à 5 millions en cinq ans, mais il n'a pas été possible de stabiliser le bilan de l'entreprise pendant cette croissance trop rapide. Même s'il s'est bien battu, avait constaté son banquier, la fin des émissions a eu lieu en 2005.

M. Gervais a constaté la perception négative et péjorative des gens par rapport à la faillite. «Mais on ne peut pas s'arrêter à ça, dit-il, il faut s'en détacher.»

Ce n'est pas toujours évident, certes. Mais l'entourage immédiat de l'entrepreneur l'a toujours soutenu, et M. Gervais se remémore avec gratitude les encouragements de personnes significatives, qui ont suivi de près le parcours de l'homme à travers la vie de son entreprise.

Par la suite, M. Gervais est passé par quelques emplois et quelques projets jusqu'à relancer cette idée qu'il caresse depuis longtemps. Patiemment, compte tenu des difficultés de crédit qui suivent la faillite, il a amassé assez d'argent pour lancer F"F.

Simon Gervais admet lui-même qu'il est un homme d'idées, mais qu'il n'était peut-être pas le meilleur administrateur à l'époque de Let's Go Design. Aujourd'hui, il dit s'être mieux entouré à ce chapitre. Connaître ses faiblesses est un atout, comprend-on de son témoignage. Il est en discussion avec un éventuel partenaire connu dans le milieu de la restauration à Montréal pour faire grandir le concept.

L'entrepreneur est relancé. Il aurait pu trouver un job régulier, avec un salaire régulier. Il aurait pu abandonner l'entrepreneuriat, une vie qu'il avait embrassée quand il a ouvert un kiosque de bonbons sur sa rue, à l'âge de dix ans. Mais à quoi bon avoir de bonnes idées si elles ne sont pas exécutées, réfléchit-il. «Si je ne les concrétise pas, qui va le faire à ma place?»

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