De janvier à avril, 75 restaurants au Québec, dont 57 de services complets, ont éteint leurs fourneaux pour de bon. C'est 23% de plus qu'à la même période l'an dernier. Alors qu'on note une diminution de faillites en Ontario de 24% (56 établissements), il semble probable qu'on dépasse en 2011 le seuil des 174 fermetures de l'an dernier dans la Belle Province.

En 2008 et 2009, on avait enregistré beaucoup plus de faillites au Québec, soit respectivement 336 et 282. Il reste que les quelque 21 000 restaurants au Québec se dépatouillent dans un contexte économique encore difficile.

Au cours des quatre premiers mois de 2011, les recettes ont augmenté de 3,2% par rapport à l'an dernier, mais le secteur est plombé par un taux d'inflation de 2,9%. «On le voit quand on fait son marché que le prix des denrées a augmenté, note François Meunier, vice-président, affaires publiques de l'Association des restaurateurs du Québec. C'est la même choses pour les restaurateurs qui doivent acheter farine, viande, oeufs et produits laitiers. La rentabilité des établissements qui n'ont pas vu leurs prix augmenter est alors touchée.»

«Pas en santé»

«Je suis mal placé pour parler, mais je ne pense pas que le milieu soit en santé, estime Carlos Ferreira, propriétaire des Ferreira Café, Vasco da Gama et F Bar. En général, ce n'est pas l'eldorado. Il y a trop de permis de restauration. La facture moyenne à Montréal ne peut pas augmenter énormément. Tout le monde se bat pour les mêmes clients. C'est celui qui a le plus d'imagination qui réussit.»

Pour Carlos Ferreira, tout comme d'autres restaurateurs, c'est un travail de tous les instants de rentabiliser les activités. «Pour chaque dollar qu'on reçoit d'un client, on garde 10 cents si le taux d'occupation dans le restaurant est bon, explique Carlos Ferreira. Le total baisse à sept cents si ça va moyennement bien et 3 cents si on a moins de chance. Déjà, 30 cents part pour la nourriture, 35 cents pour la main-d'oeuvre. Si on est chanceux, le loyer ne représente que 10%.»

Et si les astres sont alignés, un restaurant est une destination beau temps, mauvais temps, été comme hiver. Il est fréquenté tant par la clientèle locale que touristique. «Au début de l'été, ceux qui n'ont pas de terrasses ont bien apprécié, car les barbecues n'ont pas fonctionné beaucoup, souligne François Meunier. Mais ce n'était pas bon pour les artères à vocation touristique.»

Congestion...

La rue Prince-Arthur, entre le boulevard Saint-Laurent et la rue Saint-Denis, a écopé pour toute la pluie tombée à la fin du printemps et pour la baisse du nombre de touristes due à la force du dollar. Si Les Deux Gamins tire son épingle du jeu, quatre locaux où logeaient des restaurants indiens, français et grecs sont à louer. «Tout de suite après le Grand Prix, c'était vraiment mort, comparativement à l'année précédente, mentionne Tim Maheras, copropriétaire des Deux Gamins. Les touristes n'y étaient pas. Mais depuis la toute fin de juin, c'est très bien.»

La rue piétonne a bien changé depuis 1990... «Il y a une transition, mais elle s'opère très lentement, dit Tim Maheras. Prince-Arthur était un endroit, il y a 20 ans, où on faisait la file devant les restos grecs « apportez votre vin «. Aujourd'hui, la restauration y est plus relevée. Mais ce qui me tracasse, c'est que la Ville de Montréal dit encore que Prince-Arthur est une rue d'abord touristique, dans ses propres guides! Ça n'aide personne.»

Les chantiers et cônes orangés, désormais si populaires dans l'île de Montréal, n'ont pas de quoi réjouir non plus les restaurateurs. «On ne peut pas dire qu'on se dirige vers une année fantastique dans la restauration, dit François Meunier. Depuis un mois, on annonce que c'est Beyrouth ici, qu'il y a trop de bouchons. Ces indicateurs peuvent faire peur à ceux qui demeurent à l'extérieur de Montréal.»