La salle de conférence Création, dans l'usine Louis Garneau, à Saint-Augustin, est décorée de façon éclectique - meubles de pays étrangers, toile de maître ancien, statue d'ange, oiseau aux ailes déployées... Tout pour inspirer l'esprit qui prend son vol.

«On veut envoyer aux jeunes qui viennent travailler chez nous le message que nous mettons l'innovation en avant», explique le président Louis Garneau. «Quand tu veux être une entreprise internationale, comme nous qui vendons dans 45 pays, tu ne peux pas faire du me too, du look alike. Il faut faire de la création.»

Une maxime est affichée au mur: as-tu une histoire à raconter sur ton produit?

Des histoires, Louis Garneau peut en raconter plusieurs. Il y a encore deux ans, il concevait lui-même les casques de vélo de son entreprise. Il travaillait alors avec un patroniste, qui modelait directement la matière sur des modèles de tête en bois. Louis Garneau mettait à profit sa formation en arts plastiques pour mener le projet à la manière d'un sculpteur guidant les artisans de son atelier. Il a depuis passé la main à une équipe de designers passionnés de vélo -un impératif à l'embauche!-, qui utilisent tous les outils de conception numérique.

Un exemple? Deux des plus récents modèles de casques, le X-Lite et le Edge, se caractérisent par leur entrelacs de minces parois, à la manière des meneaux d'un vitrail gothique. Les nervures de leur coquille de plastique sont étagées et comportent six plis, pour augmenter leur rigidité et permettre ce fin réseau.

Même souci d'innovation avec le nouveau casque de course contre la montre Vorttice. Pour pousser son aérodynamisme au-delà du traditionnel carénage en goutte d'eau, l'entreprise a fait appel à une entreprise montréalaise spécialisée dans le design d'hélice. L'hémisphère frontal du Verttice est parcouru de dépressions, à la manière d'une balle de golf et dans le même objectif de réduire la friction grâce aux perturbations de surface créées par ces petits cratères.

Au milieu du casque, une série de minuscules crêtes disposées en arceau provoquent de petits vortex sur la partie arrière, réduisant ainsi la traînée - une technologie inspirée des pales d'éolienne, indique Louis Garneau.

«C'est le casque le plus rapide du monde», soutient-il. Le président et ancien champion cycliste n'exagère pas: des tests comparatifs ont été menés en soufflerie avec tous les produits concurrents.

Même la marque a été épurée, comme si elle aussi avait été profilée en soufflerie. Louis Garneau, trop long et trop difficile à prononcer pour des langues peu rompues au français, est devenu simplement Garneau. Les graphistes de l'entreprise y ont accolé la petite tête de flèche qui complétait le logo LG - l'équivalent, espère-t-on, du crochet Swoosh de Nike. Car Louis Garneau ne vise pas seulement le marché mondial - il y est déjà - mais la plus fine élite du cyclisme.

Les casques, vêtements, chaussures et autres accessoires de haute compétition, comme ceux que portait Thomas Voeckler dans ses deux victoires d'étape au dernier Paris-Nice, ne constituent qu'un premier tour de roue. Avant trois ans, Louis Garneau veut voir ses propres vélos sur la grande boucle du Tour de France.

Ces vélos existent: ce sont les nouveaux Gennix en fibres de carbone, entièrement conçus à Saint-Augustin - à quelque 5470 km du col du Tourmalet.

Le vélo de route Gennix R1 réussit le délicat équilibre entre rigidité et confort. Sur le Gennix T1 Pro pour le contre-la-montre, la moindre pièce a été profilée, dans le respect des très contraignants règlements, avant des tests en soufflerie.

«Au niveau du design, j'en suis très fier, confie Louis Garneau. La semaine dernière, lors des essais en Floride, des Américains prenaient des photos du vélo juste parce qu'il est beau.»

Une autre histoire à raconter.