Les récoltes ne sont pas très bonnes dans les universités. Le nombre d'étudiants recrutés dans les trois programmes de sciences de l'agriculture de l'Université Laval a reculé de 25 à 30% dans la dernière décennie. Une tendance que la faculté peine à freiner, et qui érodera à long terme le bassin de spécialistes en agronomie.

La faculté des sciences de l'agriculture et de l'alimentation de l'Université Laval (FSAA) forme la bonne majorité des agronomes du Québec, à travers ses programmes d'agronomie, génie agroenvironnemental, agroéconomie, et de sciences et technologies des aliments. Il y a des problèmes de recrutement dans toutes ces disciplines, mais particulièrement dans les deux premières.

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Au tournant des années 90, les programmes agricoles avaient aussi connu une baisse importante des effectifs étudiants. À cette époque, les perspectives d'emploi n'étaient pas très attrayantes dans le secteur.

Ce n'est plus du tout le cas. Dans tous les programmes, le taux de placement frôle les 100%. «Depuis un bon nombre d'années, le marché de l'emploi est très bon et le secteur est très dynamique, souligne le doyen de la FSAA. Jean-Paul Laforest. C'est assez curieux de voir que malgré cela, le pouvoir d'attraction reste très faible.» Si faible que le nombre d'étudiants diminue un peu chaque année, causant un problème qui s'alourdit avec le temps.

«On entre dans une période où on ne forme pas un nombre suffisant de gens pour remplacer ceux qui vont partir à la retraite», note Luc Cyr, responsable du recrutement de la FSAA.

La situation préoccupe l'Ordre des agronomes du Québec. Les agronomes jouent un rôle essentiel pour accompagner et conseiller les agriculteurs sur les plans technologique, financier et environnemental, explique le président de l'Ordre, René Mongeau.

Problème de perception

Les changements démographiques jouent contre les métiers agricoles. Le bassin de recrutement traditionnel des programmes de la FSAA est le Québec des régions, tandis que ce sont les milieux urbains qui enregistrent les plus fortes croissances.

«Mais c'est plus difficile de rejoindre les jeunes urbains, dit Jean-Paul Laforest. On réussit mal à faire comprendre le dynamisme de nos secteurs.»

L'agriculture, avec laquelle les gens ont de moins en moins de contacts, souffre d'un problème de perception. «Les jeunes ne sont pas conscients que l'agriculture touche tant à l'informatique, l'environnement, la mondialisation, les biotechnologies», déplore M. Laforest.

Il fait aussi valoir que les jeunes pensent que les emplois en agroalimentaire sont nécessairement en région, ce qui n'est pas le cas. Près d'un agronome sur quatre est établi à Montréal, Québec ou Laval.

Cercle vicieux

La FSAA fait des efforts pour faire connaître ses programmes. «On essaie d'être de plus en plus présent à Montréal, mais on obtient un effet mitigé, malheureusement», note Jean-Paul Laforest.

La faculté tente aussi de travailler conjointement avec les programmes collégiaux, et de se faire mieux connaître auprès des conseillers en orientation.

Mais avec un budget de marketing limité à 50 000$ pour la faculté, il est difficile de renverser la vapeur. La FSAA est prise dans un cercle vicieux: moins d'étudiants, moins de budget, donc moins d'argent pour attirer de nouveaux étudiants.

La FSAA compte près d'un millier d'étudiants de baccalauréat, dont la moitié sont inscrits dans les programmes agricoles.

À l'Université McGill, 105 étudiants sont inscrits aux programmes spécifiquement agricoles menant à un baccalauréat de Sciences de l'agriculture et de l'environnement. L'université anglophone enregistre aussi une baisse de la fréquentation de 10 à 15% dans les cinq dernières années.