Un jeune sur trois ne connaît pas le taux d'intérêt de sa carte de crédit et un sur quatre fait fréquemment son épicerie à crédit. Espérons que ce ne sont pas les mêmes.

Ces données proviennent d'un sondage dévoilé hier par la Coalition des associations de consommateurs du Québec (CACQ). Il marque le lancement de la sixième campagne de sensibilisation «Dans la marge jusqu'au cou», orientée cette année vers la prévention de l'endettement chez les jeunes.

Réalisé auprès de 356 répondants âgés de 18 à 29 ans, le sondage révèle notamment que 71% des jeunes possèdent une carte de crédit. Le tiers des détenteurs de cartes en détiennent deux ou plus. La dette moyenne s'établit à 1700$.

Pour le tiers des répondants, la limite de crédit excède 5000$ - avec le risque de s'en servir.

Ces constats suscitent l'inquiétude chez les associations de consommateurs, qui en voient quotidiennement les conséquences.

«Les jeunes qu'on voit dans nos bureaux sont pris au piège avec leurs cartes, affirme la consultante budgétaire Sophie Racine. Les soldes sont parfois tellement élevés qu'ils ne voient pas le jour où ils finiront de payer.»

Tout n'est pas noir, pourtant: la dette se maintient entre 0 et 1000$ chez les trois quarts des répondants.

Les jeunes ne sont pas encore surendettés, observe Mme Racine. «Toutefois, dit-elle, avec la frénésie de la surconsommation actuelle, ils sont à risque de le devenir d'ici quelques années.»

Si 73% des jeunes ont eux-mêmes pris la décision de demander une carte, 22% ont cédé à la pression des émetteurs. La CACQ demande d'ailleurs au gouvernement d'interdire la sollicitation et la publicité sur le crédit auprès des jeunes de moins de 18 ans, dans les lieux que fréquentent les jeunes, ou par la poste, le téléphone et l'internet.

Ce sondage Omnibus, limité à 10 questions, n'a pas vérifié quelle proportion des jeunes maintenait un solde impayé. Dans son étude sur l'endettement des jeunes réalisée en 2004, Marie Lachance, professeure agrégée en sciences de la consommation à l'Université Laval, avait relevé que c'était le cas de la moitié des jeunes détenteurs de cartes, pour une dette moyenne d'environ 1100$.

«Les jeunes savent que le crédit peut être dangereux, mais ils ne sont pas convaincus que ça l'est pour eux», constate-t-elle. Les jeunes utilisent la carte de crédit comme outil de paiement, avec des perceptions et des valeurs différentes de celles de leurs aînés. Elle croit qu'il faudra raffiner les prochaines études pour bien saisir ces nuances.

Quelques conseils

La CACQ ne jette pas l'anathème sur la carte de crédit pour les jeunes.

«Ce qu'on leur dit, c'est d'être prudent, insiste la porte-parole Caroline Toupin. Une carte suffit. Il n'est pas nécessaire d'avoir une limite de crédit au-dessus de ses moyens. La carte de crédit ne sert pas à acheter des choses qu'on n'est pas capable de se payer. Elle sert à payer des choses qu'on est capable de rembourser.»

Comment évaluer la limite de crédit nécessaire? «Il faut juger soi-même, répond-elle. Si on a une limite de crédit de 2000$ et qu'on la remplit, sera-t-on capable de la payer au bout du mois?»

De son côté, Sophie Racine réfute l'argument d'une carte de crédit précoce pour établir un dossier de crédit favorable.

Le paiement régulier de ses divers comptes et la constitution d'une épargne sont aussi des moyens d'étoffer son dossier de crédit - sans risque d'endettement.

En chiffres

71%

Pourcentage des jeunes (18-29 ans) qui possèdent au moins une carte de crédit.

2200$

L'endettement moyen sur carte de crédit des jeunes est de 1700$ et passe à 2200$ pour les 25-29 ans.

30%

Près du tiers des jeunes ne sont pas capables de faire face à un imprévu de plus de 250$ et doivent utiliser leur carte.