Ce n'est qu'un aspect des fautes commises par Vincent Lacroix qui a été jugé lors de son procès au pénal. Pour juger le cas en entier, incluant l'aspect des fraudes, il faut absolument un procès au criminel.

C'est, en résumé, ce que la procureure Julie Riendeau a fait valoir, hier, en réplique à la requête de Vincent Lacroix. Par une requête en res judicata, le président déchu de Norbourg et auteur d'un des plus grands scandales financiers du Québec, tente de s'extirper du procès criminel qu'il doit subir en septembre, conjointement avec cinq ex-collaborateurs.

Les accusations vont de fraude à blanchiment d'argent, en passant par la fabrication de faux et complot. Lacroix prétend qu'il a déjà été jugé pour ses agissements lors du procès pénal devant le juge Robert Leblond, en 2007. Au terme de ce procès, il avait été déclaré coupable de 51 infractions à la Loi sur les valeurs mobilières, pour avoir détourné 115 millions des Fonds communs Norbourg. Ce qui lui a valu une peine de prison de 12 ans, réduite à 8 ans et demi en appel.

Me Marie-Hélène Giroux, l'une des avocates de Lacroix, a plaidé hier qu'il serait contraire à la Charte canadienne des droits et libertés de juger deux fois Lacroix pour les mêmes crimes.

La Couronne ne voit pas les choses du même oeil. «La preuve ne sera pas la même. La base factuelle est différente. Il y a des témoins qui n'ont pas été entendus à l'autre procès qui vont venir témoigner. Devant le juge Leblond, il n'était pas accusé de fraude», a expliqué la procureure de la Couronne, Julie Riendeau.

Pour décider du mérite de la requête de Lacroix, Me Riendeau a invité le juge Richard Wagner à faire abstraction de la peine qui lui avait été imposée lors de ce précédent procès. La lourdeur de cette peine pourra être plaidée au terme du procès criminel, à l'étape de la sentence, a-t-elle, fait valoir.

Le juge Wagner a finalement mis sa décision en délibéré, mais n'a pas donné de date pour la rendre. Le 8 juillet, il doit entendre la requête en mise en liberté de Lacroix. Emprisonné depuis janvier 2008, Lacroix pourrait jouir d'une libération conditionnelle à partir de dimanche. Il irait alors en maison de transition et ferait du bénévolat dans une ressource pour personnes handicapées et défavorisées. Le problème, c'est qu'il est détenu dans la cause criminelle.

Vincent Lacroix ne veut pas avoir un procès au criminel. Mais s'il doit absolument en avoir un, il préférerait que ce soit devant un juge seul, plutôt que devant un jury. C'est ce qui se dégage des commentaires que Me Giroux a livrés, hier, en sortant de la salle d'audience. Un des coaccusés de Lacroix, Jean Renaud, qui se défend sans avocat (l'aide juridique lui a été refusée), a fait valoir qu'il aimerait mieux être jugé par un juge seul, hier.

Cette avenue n'est pas du tout envisagée par la Couronne, qui a d'ailleurs procédé par acte d'accusation privilégiée. Cette façon de faire permet d'aller directement au procès devant la Cour supérieure, avec juge et jury, sans passer par l'enquête préliminaire. «C'est nous qui prenons la décision. Et on ne la prendra pas (celle d'aller devant juge seul)», a signalé Me Julie Riendeau.

Le procès de Lacroix et de ses coaccusés doit débuter le 14 septembre prochain.