L'économie chinoise devrait s'être essoufflée au troisième trimestre, plombée par le ralentissement des investissements et la guerre commerciale qui s'intensifie avec les États-Unis de Donald Trump, selon un groupe d'experts sondés par l'AFP.

D'après la prévision médiane de 12 analystes, la croissance du produit intérieur brut (PIB) de la Chine s'est établie à 6,5 % sur un an sur la période juillet-septembre. Elle serait ainsi en nette baisse après avoir résisté durant les deuxième (+6,7 %) et premier trimestres (+6,8 %).

Le chiffre officiel du gouvernement chinois sera annoncé ce vendredi.  

Ce rythme de croissance modeste serait le plus lent depuis le premier trimestre 2009, lorsque la crise financière avait frappé les marchés mondiaux et fermé les débouchés pour les exportations chinoises. Il resterait cependant conforme à l'objectif du gouvernement pour 2018 (« environ 6,5 % »). En 2017, la croissance s'était établie à 6,9 %.

L'actuelle guerre commerciale avec Washington survient cependant à un moment déjà délicat pour l'économie chinoise.  

Car Pékin a fait de la lutte contre la dette (publique et privée) une priorité. Or son durcissement a freiné drastiquement la progression du crédit et donc contribué à assécher le financement des collectivités locales et des entreprises étatiques.  

Le ralentissement de la croissance au troisième trimestre pourrait être le résultat de la combinaison de la guerre commerciale et de la lutte contre l'endettement, juge Betty Wang, analyste de la banque ANZ.

Forte incertitude

Certes, les exportations chinoises vers les États-Unis se sont intensifiées cette année, les exportateurs s'empressant d'acheminer leurs marchandises à travers le Pacifique avant l'imposition des droits de douane américains.  

Mais la guerre commerciale génère surtout un fort niveau d'incertitude et « cet état d'esprit a déjà nettement miné le marché », souligne Mme Wang.

Illustration avec l'indice composite de la Bourse de Shanghai, qui a chuté de 22 % depuis le début de l'année. Dans le même temps, le yuan a perdu 9 % par rapport au dollar.

De fait, Pékin fait face à une équation difficile : faciliter l'accès au crédit pour les entreprises privées en manque d'argent, sans pour autant gonfler la dette.

La banque centrale chinoise (PBOC) a réduit plusieurs fois cette année le taux de réserves obligatoires des banques, afin de leur permettre de prêter davantage.

Mais les efforts de désendettement de Pékin ont déjà entraîné un net tassement des investissements dans les infrastructures. Et les collectivités locales ont gelé ou annulé des projets.

Ces mesures ont porté un coup de frein à l'économie, soulignent des analystes. Mais un changement d'état d'esprit serait en cours.  

« Nous sommes convaincus que les autorités donnent déjà la priorité au redressement de l'économie nationale au détriment de la stabilité du yuan et du désendettement », assure Liu Ligang, analyste chez Citibank.

Le FMI pessimiste

Si une politique de relance est appliquée, la croissance pourrait se stabiliser aux alentours de 6,5 % au quatrième trimestre, selon lui.

« Mais la guerre commerciale pourrait encore s'aggraver et l'impact sur l'économie chinoise être plus tangible dans les trimestres qui viennent », estime M. Liu.

Le président américain Donald Trump est engagé dans un bras de fer avec Pékin, qu'il veut contraindre à des concessions en matière de commerce.

Les États-Unis imposent des droits de douane supplémentaires sur des marchandises chinoises représentant 250 milliards de dollars d'importations annuelles. La Chine a rétorqué en imposant des tarifs douaniers sur 110 milliards de dollars de biens « made in USA ».

Or, les exportations constituent toujours un des moteurs de l'économie chinoise. Et les taxes américaines visant les voitures, les machines ou l'électroménager chinois ont poussé des entreprises à délocaliser leur production ou geler les investissements en Chine.

Le Fonds monétaire international (FMI) a averti samedi que la fenêtre d'opportunité pour stimuler la croissance mondiale « se refermait », notamment en raison de cette guerre commerciale.

L'institution a abaissé ses prévisions de croissance 2019 pour la Chine - prévoyant un plus bas depuis 1990 - tout comme pour les États-Unis et pour l'économie mondiale.