La reprise dans la zone euro se confirme, comme en témoigne un taux de chômage au plus bas en avril, mais le net ralentissement de l'inflation en mai devrait pousser la Banque centrale européenne (BCE) à la prudence.

«La situation est compliquée pour la BCE, entre une croissance robuste et une pression faible sur les prix, qui entraînent des attentes divergentes au niveau de sa politique», résume Bert Colijn, analyste de la banque néerlandaise ING.

De fait, les signes de bonne santé de l'économie se multiplient dans la zone euro, qui a enregistré au premier trimestre 2017 une croissance solide de 0,5%, le même niveau qu'au dernier trimestre 2016.

Quant au taux de chômage, il poursuit sa baisse mois après mois. Selon l'Office européen de statistiques Eurostat mercredi, il est même descendu à 9,3% en avril, son taux le plus bas depuis huit ans. Encore une bonne nouvelle.

Sauf que dans le même temps, l'inflation reste instable et n'atteint pas les niveaux espérés: pas plus de 1,4% en mai, selon une estimation d'Eurostat mercredi, soit un net recul par rapport avril, où elle s'était portée à 1,9%.

Ce ralentissement avait été anticipé par les analystes interrogés par le fournisseur de services financiers Factset, qui tablaient sur une hausse des prix à la consommation de 1,5%.

Le chiffre ne concorde pas avec les signaux positifs enregistrés par ailleurs. Et il reste très éloigné de l'objectif d'une inflation légèrement inférieure à 2,0% sur un an, considérée par la BCE comme un signe de bonne santé de l'économie.

Plus embêtant encore, l'inflation reposant sur la hausse des salaires, c'est-à-dire l'inflation sous-jacente, redescend à 0,9% en mai, après 1,2% en avril.

Nouvelle communication

Une réunion de politique monétaire de la BCE est prévue le 8 juin à Tallin en Estonie, durant laquelle l'institution pourra affiner son jugement à l'aune de ses nouvelles prévisions macro-économiques.

Elle devra en particulier évaluer le degré de risques pesant sur la croissance et l'inflation, avant de décider du bon calibrage de son action pour la période à venir.

Mais étant donné le niveau de l'inflation, l'institution basée à Francfort devrait continuer à maintenir ses taux d'intérêt à des niveaux historiquement bas et à effectuer des rachats massifs d'actifs afin d'injecter de l'argent bon marché dans le système, et par ricochet redynamiser la machine économique européenne.

«La BCE va rester prudente», anticipe Bert Colijn, qui estime qu'«une inflation plus faible en 2017 est plus probable qu'un rebond à 2,0%».

«Nous restons fermement convaincus qu'un soutien extraordinaire de la politique monétaire (...) est encore nécessaire pour remédier au niveau présent de sous-emploi des ressources (dans l'économie) et pour que l'inflation retourne de manière stable autour de niveaux proches de 2,0% sur le moyen terme», a d'ailleurs déjà prévenu le président de l'institution Mario Draghi lundi devant des eurodéputés.

Si la BCE ne devrait pas faire évoluer sa politique à court terme, elle pourrait cependant, selon certains analystes, se montrer plus optimiste dans sa communication, notamment en ne considérant plus une nouvelle baisse des taux d'intérêt comme une perspective envisageable.

«Nous nous attendons à ce que la BCE supprime la référence à une possible baisse des taux d'intérêt», estime ainsi Jack Allen, analyste chez Capital Economics.

«La BCE pourrait anticiper, avec une confiance grandissante, la poursuite de la reprise économique et une hausse progressive de l'inflation», ajoute-t-il.