Les salariés d'Alitalia ont rejeté lundi un plan de relance drastique présenté comme celui de la dernière chance pour la compagnie aérienne italienne qui risque désormais la liquidation, rapportent les médias italiens.

Près de 90% des quelque 12 500 membres du personnel ont participé à la consultation entre jeudi et lundi après-midi. Dans la soirée, le non a dépassé la barre des 50% bien avant la fin du dépouillement.

Les salariés ont ainsi rejeté ce plan prévoyant 1700 suppressions d'emploi et une baisse de salaire de 8%, alors que le gouvernement, qui a fait office de médiation ces dernières semaines, avait répété tout le week-end qu'il n'y avait pas d'alternative.

En effet, les caisses de la compagnie sont à sec et les actionnaires (Etihad Airways qui détient 49%, UniCredit, Intesa Sanpaolo, etc.) n'entendaient pas remettre la main à la poche en cas de rejet de l'accord.

Selon la presse, le conseil d'administration d'Alitalia pourrait se réunir dès mardi -- férié en Italie -- pour demander à l'État la mise en place d'une «administration extraordinaire» en vue d'une hypothétique reprise ou d'une liquidation.

«Ils nous ont fait payer à nous toutes les crises. Nous sommes en colère. Ce nouveau plan ne sert à rien», a expliqué un pilote de ligne à La Stampa, assurant que la compagnie se retrouverait «au même point dans neuf mois».

«Mieux vaut être tous ensemble dans la rue à demander un coup de main que de perdre 2000 personnes maintenant, puis encore 2000 bientôt et ainsi de suite», a renchéri un salarié à la télévision.

Le syndidat USB a réclamé dans un communiqué «la réouverture immédiate des négociations» après «le non des salariés».

Le chef du gouvernement italien, Paolo Gentiloni, avait pourtant été clair samedi: «Je sais bien que l'on demande des sacrifices aux salariés, mais sans un accord sur le nouveau plan industriel, Alitalia ne pourra pas survivre».

M. Gentiloni a d'ailleurs réuni lundi après-midi plusieurs ministres concernés pour attendre les résultats de la consultation.

«Accompagnement vers la liquidation»

La semaine dernière, Carlo Calenda, ministre du Développement économique, avait insisté: «Ceux qui espèrent une intervention de l'État se leurrent». La période d'administration extraordinaire sera «très très brève, environ 6 mois», avant un «accompagnement vers la liquidation de la compagnie».

Cette mesure risque d'ailleurs de coûter «plus d'un milliard d'euros» à l'État italien en rejetant sur lui «tous les coûts de la gestion ou de la liquidation» de la compagnie, avait-il ajouté.

Alitalia subit de plein fouet la concurrence des compagnies à bas coût et accumule les pertes depuis des années, et ce malgré l'entrée à son capital en 2014 de son homologue émiratie Etihad et des fonds injectés par celle-ci.

La direction d'Unicredit, l'un des actionnaires d'Alitalia, avait souligné la semaine dernière que la banque avait perdu «près de 500 millions d'euros» dans la compagnie et ne pouvait pas continuer à la soutenir sans «une solution durable dans une perspective de long terme».

Dans le cadre d'un vaste plan de relance, la direction d'Alitalia avait annoncé mi-mars des mesures particulièrement sévères avec plus de 2000 suppressions d'emplois et des baisses de salaires allant jusqu'à 30%.

Mais sous la houlette du gouvernement, qui envisageait une garantie publique du plan de relance sur 200 millions d'euros, le volet social avait été re-négocié mi-avril entre les syndicats et la direction.

Si la plupart des syndicats appelaient à contre-coeur à voter oui, un «comité pour le non» avait vu le jour.

«Comment peut-on penser qu'une compagnie qui transporte 24 millions de personnes avec 120 avions puisse être mise en liquidation ? Nous croyons qu'Alitalia pourra quand même rester sur le marché, mais avec une forte rupture avec le passé et la direction qui l'a réduite à ça», avait insisté Francesco Staccioli, membre du syndicat USB.