La Banque centrale européenne (BCE) a sans surprise maintenu jeudi son principal taux directeur à 0,05%, son plus bas niveau historique auquel il avait été abaissé en septembre, a annoncé jeudi un porte-parole à Francfort.

La grande majorité des analystes misaient sur le statu-quo pour ce taux, qui sert de référence pour le crédit en zone euro, et ne peut de toute façon guère aller plus bas.

Toute hausse était également exclue, alors que l'institution monétaire de Francfort tente ces derniers mois - en vain jusqu'à présent - de faire repartir l'inflation en zone euro. Selon une première estimation, la hausse des prix dans la région a affiché le très bas niveau de 0,4% en octobre, soit très loin de l'objectif des banquiers centraux d'un peu moins de 2%.

Les observateurs attendaient désormais la conférence de presse à partir de 8h30 (heure de Montréal) du président de l'institution monétaire, Mario Draghi, qui pourrait se révéler «très excitante», selon Carsten Brzeski, chef économiste chez ING.

Le style Draghi critiqué

Les analystes n'attendent certes aucune annonce nouvelle de la part de l'institution, qui devrait se garder d'agir davantage avant d'avoir pu évaluer l'impact d'un vaste arsenal de mesures dévoilé en juin et en septembre. Celui-ci comprend des prêts de long-terme très bon marché pour les banques (TLTRO) ainsi que des achats de produits financiers, destinés à fluidifier le crédit au secteur privé de la zone euro et par ricochet à redynamiser l'activité économique.

En outre, «la BCE espère avec ferveur que le résultat de ses tests européens de résistance bancaire dévoilé le 26 octobre renforcera la confiance dans le système bancaire en Europe et encouragera les banques» à ouvrir plus largement les vannes du crédit, pointe Howard Archer, chef économiste Europe pour le cabinet IHS.

La séance de questions-réponses entre les journalistes et le président devrait en revanche être au centre de l'attention, après des informations de presse faisant état de tensions fortes entre certains gouverneurs et M. Draghi, critiqué pour sa gestion trop personnelle et sa communication imprévisible.

La grogne cible notamment un commentaire de l'Italien, indiquant que la BCE entend gonfler d'environ 1000 milliards d'euros son bilan via ses mesures de soutien à l'économie.

«Ce chiffre est sur les marchés et l'action de la BCE est désormais mesurée à cette aune», fait remarquer Carsten Brzeski.

Appels à faire plus

Les observateurs seront par conséquent à l'affût de tout commentaire sur de possibles rachats par la BCE d'obligations d'entreprises, après des rumeurs évoquant une décision en ce sens pour le mois de décembre.

En dépit de leur activisme ces derniers mois, les banquiers centraux européens restent soumis à une forte pression pour agir plus, face à une économie chancelante en zone euro.

Mardi, la Commission européenne a abaissé drastiquement ses prévisions de croissance et d'inflation en zone euro pour cette année et les deux suivantes, nourrissant de plus belle les craintes de déflation sur le Vieux continent.

«Je rappelle à tout le monde, à tout le monde, que la BCE est un organisme indépendant et qu'il est interdit à toute personne d'avoir l'air de vouloir faire pression sur les décisions de la banque centrale indépendante», avait martelé mardi le ministre français des Finances Michel Sapin lors d'une conférence de presse.

Nonobstant cette mise en garde, l'organisation des pays développés OCDE a appelé jeudi l'institution à renforcer sa politique de soutien à l'économie, évoquant spécifiquementt des rachats d'obligations d'Etat. La BCE s'y est refusée jusqu'à présent, en raison notamment de l'opposition virulente de certains de ses membres.

«La BCE a peu de chance de céder aux pressions l'incitant à se lancer sur la route d'un assouplissement quantitatif», terme désignant un programme de rachat de dette publique, souligne Jennifer McKeown, analyste chez Capital Economics.

«Mais nous continuons à penser que (les mesures déjà annoncées) risquent de ne pas être suffisantes pour relancer l'économie et éliminer les risques de déflation», ajoute-t-elle.

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