Malgré la déprime économique dans plusieurs pays, le tourisme croît à un rythme surprenant dans le monde, éclipsant plusieurs autres industries. Et tout le monde fait les yeux doux aux Chinois, en particulier, les nouveaux big spenders de la planète touristique.

L'été est derrière nous, et on rapporte une affluence touristique record dans plusieurs pays, notamment en Grèce et en Espagne. En fait, très peu d'industries connaissent une croissance aussi rapide que le tourisme malgré une économie morose dans plusieurs régions.

Selon l'Organisation mondiale du tourisme (OMT), les arrivées de touristes internationaux - dans tous les pays - ont augmenté de 5% au premier semestre (variation annuelle) pour approcher les 500 millions. Un sommet. Les flux touristiques augmentent même plus vite que ne l'avait escompté l'OMT, qui tablait sur une croissance de 3 à 4% cette année.

Même si la conjoncture économique demeure contrastée sur la planète, toutes les régions affichent des résultats positifs. Faisant fi de la morosité, l'Europe (+5%) a mieux fait que prévu. La région Asie-Pacifique (+6%) dépasse aussi les espérances. En revanche, les résultats sont un peu décevants dans les Amériques (+2%).

Au chapitre des dépenses, les touristes internationaux affichent une étonnante vigueur, surtout ceux des économies émergentes qui fournissent les plus fortes progressions. Or, les touristes chinois font saliver le milieu touristique, avec une hausse spectaculaire de leurs dépenses de 31% au premier semestre.

Une manne

Aux États-Unis, on n'en revient pas: non seulement l'affluence de visiteurs est-elle à la hausse - +6,4% au premier trimestre, selon les chiffres officiels -, mais encore ceux qui viennent dépensent plus que jamais. Les Chinois en particulier.

Les touristes étrangers ont dépensé 10,6% de plus que pour la même période l'an passé, selon le département du Commerce. C'est quatre fois plus que la croissance espérée de l'économie cette année.

«C'est un apport incroyablement important», renchérit David Huether, chef recherchiste à la US Travel Association (USTA) dans une note sur le web.

En juin seulement, les étrangers ont laissé 14,9 milliards US - un record - dans les magasins de la 5e Avenue, à Manhattan, les chics boutiques de Rodeo Drive, à Beverly Hills, ou ailleurs aux États-Unis.

Il y a fort à parier que les Asiatiques ont droit au traitement royal chez les détaillants, et pour cause. Selon la USTA, les Chinois et les Indiens dépenseront chacun 6200$US en moyenne durant leur visite aux États-Unis. C'est presque le double des débours des visiteurs français (3650$US), à titre d'exemple.

Un portrait confirmé par l'OMT, qui ajoute que les Chinois sont devenus les big spenders de la planète touristique. En 2012, ils ont dépensé 102 milliards US à l'étranger, soit un bond de 40% en un an, et ils devancent pour la première fois les Allemands et les Américains, respectivement aux deuxième et troisième rangs.

Les voyageurs chinois sont surtout de plus en plus nombreux, étant passés de 10 millions en 2000 à 83 millions en 2012, selon l'OMT. Et ce n'est pas fini. On devrait dénombrer 100 millions de touristes chinois en 2015, prédit l'organisme.

Des courbettes

Entre-temps, plusieurs ont pris bonne note du phénomène et font des courbettes devant la clientèle chinoise.

Il y a 10 jours, à Pékin, le gouvernement britannique a annoncé en grande pompe des mesures qui accéléreront les demandes de visa pour les Chinois. Autrement dit, on ouvre grand les portes du royaume.

En France, pour attirer la meute des pays émergents, les Galeries Lafayette a noué des accords cette année avec des agences de voyages pour insérer un «Galeries Lafayette Tour» dans les circuits d'Asiatiques à Paris. Les guides encouragent la clientèle à dépenser... contre des commissions atteignant 10% des achats effectués.

En Suisse, des détaillants ont glissé dans les allées de «faux clients chinois» qui achètent tout ce qui leur tombe sous la main afin de créer une ambiance euphorique et inciter les «vrais» touristes à consommer, racontent des médias locaux. Une tactique connue du milieu et pratiquée ailleurs dans le monde, se défendent des agences de voyages helvétiques.

À New York et à Los Angeles, des grands magasins embauchent de plus en plus de vendeurs qui parlent le mandarin; des boutiques ont même un maître de thé pour servir une tasse parfaite aux clients, a constaté CNN...

Bref, c'est la «Grande Sinoduction». Les Chinois veulent découvrir le monde, et les avions déversent partout ces nouveaux conquérants aux poches bien remplies. Un cadeau du ciel pour l'industrie touristique.