Les Européens vont tenter mercredi de convaincre l'Autriche et le Luxembourg de lever leurs restrictions dans la lutte contre l'évasion fiscale et le secret bancaire, lors d'un sommet à Bruxelles également consacré à l'énergie et où la question de la lutte contre le chômage pourrait s'inviter.

S'ils parviennent à rallier Luxembourg et Vienne à leur cause, les chefs d'État et de gouvernement de l'UE afficheront un front uni dans la lutte contre l'évasion et la fraude fiscales, un fléau qui représente un manque à gagner de 1 000 milliards d'euros (1316 milliards de dollars canadiens) par an, selon les estimations de Bruxelles.

Mais les chances d'y parvenir sont très faibles. Le Premier ministre luxembourgeois Jean-Claude Juncker a déjà douché les attentes, estimant qu'il ne serait «pas possible mercredi à Bruxelles d'élargir les décisions sur lesquelles les ministres des Finances se sont mis d'accord» la semaine passée.

Les ministres des Finances des 27 ont décidé mardi dernier de confier un mandat à la Commission européenne pour renégocier les accords fiscaux avec la Suisse, Andorre, Monaco, Saint-Marin et le Liechtenstein. Mais ils ont échoué à se mettre d'accord sur le point le plus important: faire adopter à l'unanimité la révision d'une loi européenne, en souffrance depuis 2008, sur la fiscalité de l'épargne.

Cette loi prévoit l'échange automatique d'informations de certaines données bancaires. L'idée est à terme de la renforcer et d'en étendre le champ d'application, notamment à l'assurance-vie.

Or, l'Autriche et le Luxembourg, farouches défenseurs du secret bancaire, n'ont pas complètement levé leurs restrictions, contrairement à ce qu'espéraient leurs partenaires, arguant qu'il fallait au préalable des négociations abouties avec les pays tiers comme la Suisse, ce qui va prendre du temps.

«Nous espérons beaucoup que ces deux pays (Autriche et Luxembourg) vont bouger lors du sommet», a toutefois affirmé un responsable européen sous couvert d'anonymat. «Il est très important que nous fassions front commun en tant qu'Union européenne sur l'évasion fiscale» dans l'optique du G8 qui aura lieu en juin en Irlande, mais malheureusement c'est «difficile», poursuit-il, car «certains pays, Grande-Bretagne en tête, préfèrent miser sur des accords bilatéraux ou régionaux».

La lutte contre l'évasion fiscale a été imposée comme thème principal du sommet par le président du Conseil européen, Herman Van Rompuy, qui voulait «profiter de l'élan politique actuel», dans la foulée de l'affaire Cahuzac en France et des révélations de l'Offshore leaks sur les paradis fiscaux. Le sujet s'est également imposé dans le contexte de la crise persistante en Europe.

Face au chômage de masse, qui touche de plein fouet les jeunes, les dirigeants européens pourraient d'ailleurs profiter du sommet pour mettre de nouvelles idées sur la table ou pour accélérer la mise en place de mesures déjà prises, avant le prochain sommet prévu fin juin qui sera consacré à la croissance et à l'emploi. L'idéal serait de pouvoir «donner une nouvelle impulsion politique» à la lutte contre le chômage des jeunes sans attendre le sommet de juin, a confié une source communautaire.

Les chefs de gouvernement espagnol et portugais, Mariano Rajoy et Pedro Passos Coelho, se sont montrés récemment disposés à soutenir «tout plan» visant à lutter contre le chômage des jeunes qui affecte particulièrement leur pays. Madrid détient le record en la matière avec plus d'un jeune sur deux sans emploi.

L'Union européenne s'est déjà accordée pour allouer 6 milliards d'euros d'ici 2020 à la lutte contre le chômage des jeunes, mais réfléchit actuellement à accélérer le déblocage d'une partie de cette somme.

Outre ce dossier, les chefs d'État et de gouvernement des 27 vont se pencher sur les questions énergétiques. Leur ambition est de prendre des engagements pour réduire la facture des importations, assurer une production domestique continue et garantir des prix abordables pour les consommateurs.