L'économie espagnole a connu au quatrième trimestre son recul le plus marqué depuis plus de trois ans, plombée par la contraction de la demande intérieure dans un contexte de chômage massif et de rigueur historique, selon la Banque d'Espagne.

Au cours des trois derniers mois de 2012, le produit intérieur brut (PIB) de la quatrième économie de la zone euro a baissé de 0,6% par rapport au troisième trimestre, note la banque centrale mercredi dans son bulletin mensuel.

Il s'agit du repli le plus marqué sur un trimestre depuis le deuxième trimestre 2009, lorsque l'économie du pays s'était contractée de 1,1%, en pleine tourmente liée à la crise financière mondiale et à l'effondrement de la bulle immobilière.

L'Espagne, qui a renoué avec la récession depuis fin 2011, a accusé une baisse du PIB de 0,4% aux premier et deuxième trimestres 2012, puis de 0,3% au troisième trimestre.

Cette «trajectoire récessive» s'est «accentuée au cours de la période allant d'octobre à décembre», souligne la Banque d'Espagne.

L'institution monétaire note en particulier que la demande des ménages et des entreprises a chuté de 1,9% par rapport au troisième trimestre.

La consommation a notamment été affectée par la hausse de la TVA depuis le 1er septembre et par la suppression de la prime de fin d'année des fonctionnaires.

Dans le même temps, le resserrement du crédit bancaire, dans un contexte de crise du secteur financier, ainsi que le niveau record du chômage, qui touche un quart des actifs, ont contribué à affaiblir la demande intérieure.

A la veille de la publication des chiffres de l'emploi, la Banque d'Espagne estime même que l'on peut s'attendre à «une nouvelle augmentation» du chômage au quatrième trimestre, à «environ 26%», contre 25,02% au troisième trimestre.

Sur l'ensemble de 2012, la banque centrale estime que le PIB a reculé de 1,3% par rapport à 2011, un chiffre moins élevé que la prévision officielle du gouvernement conservateur qui table sur un repli de 1,5%.

Les chiffres officiels provisoires de la croissance pour 2012 seront publiés le 30 janvier.

«La contraction de 0,6% du PIB espagnol au quatrième trimestre arrive à point pour rappeler que, si la pression des marchés sur le pays s'est allégée depuis la promesse d'intervention de la BCE, les fondamentaux de l'économie restent très fragiles», commente le cabinet d'analyse Capital Economics.

L'Espagne a fait l'objet en 2012 d'une grande défiance de la part des investisseurs, la pression ayant atteint des niveaux record durant l'été lorsque beaucoup pensaient que le pays serait forcé de demander le sauvetage de son économie.

Depuis, Madrid y a échappé, notamment grâce à l'annonce par la Banque centrale européenne (BCE) en septembre du lancement d'un instrument de rachat de dette souveraine sur le marché secondaire, qui a contribué à détendre la pression pesant sur les finances du pays.

Sous la pression des marchés et de l'Union européenne, le gouvernement a multiplié les coupes budgétaires et les hausses d'impôts, pour tenter de ramener son déficit public de 9,4% du PIB en 2011 à 6,3% en 2012, puis à 4,5% en 2013 et à 2,8% en 2014.

Mais selon les analystes, cet objectif est difficilement tenable et cette cure d'austérité repousse un peu plus la reprise économique. Le gouvernement s'est lui-même résigné à une nouvelle année de récession en 2013, en tablant sur un repli du PIB de 0,5%.

Si l'Espagne s'acharne à respecter son objectif de déficit pour 2013, «la récession de l'économie va s'agraver», estime ainsi mercredi Josep Comajuncosa, économiste à l'école de commerce Esade.

«Exiger une réduction drastique du déficit public en peu de temps peut être contre-productif», avertit l'économiste.

La Commission européenne a estimé mardi qu'il serait «très difficile» pour l'Espagne de respecter son objectif de déficit pour 2012, en raison notamment du dérapage des comptes de la Sécurité sociale et de certaines régions autonomes.

Bruxelles a toutefois salué à plusieurs reprises les efforts de rigueur de l'Espagne et souligné qu'elle ne réclamerait pas de nouvelles mesures d'austérité. L'Union européenne avait imposé des conditions au pays en échange de l'aide accordée en juin à son secteur bancaire, en grande difficulté.