Il faut s'armer de patience si on veut un jour percer le marché brésilien. Des fonctionnaires pointilleux qui multiplient les démarches pour l'obtention d'un permis ou d'éventuels partenaires d'affaires qui veulent d'abord que vous deveniez amis avant d'être un jour associés sont des obstacles inévitables que seul le temps peut permettre de franchir.

C'est avec plein de bonne volonté que la cinquantaine de dirigeants d'entreprises québécoises ont décidé de participer à la Mission Brésil.

Après quatre jours de rencontres, de démarchage et de discussions, nous avons demandé à quatre d'entre eux de nous expliquer comment ils vivaient l'expérience et comment ils entrevoyaient leur conquête espérée de ce marché de 200 millions d'individus.

Christian Déry, directeur des ventes et du marketing de DCM Aéronautique, n'en est pas à son premier voyage au Brésil. Il cumule avec cette mission 38 séjours en huit ans à São Paulo, là où DCM est un fournisseur d'Embraer, fabricant d'avions régionaux et de jets d'affaires brésilien.

Établi à Boisbriand, DCM est un concepteur et un fabricant d'outillage et de composantes d'aéronefs qui dessert notamment Bombardier, Boeing et Embraer.

«Ça m'a pris 15 voyages en trois ans avant qu'Embraer accepte de nous certifier comme fournisseur. À un moment donné, quand ils ont vu qu'on était assez bons pour desservir Bombardier en outillage, ils ont accepté de nous prendre», relate Christian Déry.

S'il apprécie les similarités culturelles entre le Brésil et le Québec, Christian Déry constate qu'il faut absolument établir un lien de confiance et même d'amitié pour nouer une relation durable.

«On prévoit même ouvrir un bureau à São Paulo dans les prochaines semaines pour être plus proches de nos interlocuteurs. Il faut avoir des échanges toutes les semaines», observe-t-il.

Fait à souligner, cette mission commerciale au Brésil a intéressé un large éventail d'entreprises québécoises de tous les secteurs économiques, dont le fabricant beauceron de planchers en bois Dava, l'entreprise qui a usiné le bois pour la construction de la nouvelle salle de concert de l'OSM.

Alnoor Sheriff et Simon Girard sont les deux attachés d'affaires de Dava au Brésil. Il leur a fallu deux ans et une présence sur place pour traverser toutes les étapes qui ont mené à la première livraison de planchers de bois destinés à un projet résidentiel à l'extérieur de São Paulo. «On a fait des études de marché et on a vu que la moitié du bois qui sert à la construction au Brésil est illégale, parce que la forêt amazonienne est protégée», explique Alnoor Sheriff.

«On a rencontré tous les plus grands architectes de São Paulo et ils ont vraiment aimé les produits de Dava. On parle ici de bois haut de gamme, mais il y a beaucoup de millionnaires ici qui ne regardent pas les prix. On a une première livraison en route et on est sur le point de signer quatre nouvelles commandes», ajoute Simon Girard.

Ce dernier a survécu à l'enregistrement de tous les permis possibles et imaginables qu'exigeaient les fonctionnaires brésiliens. De plus, les exportations de bois de Dava sont soumises à des droits de douane de 120%.

Jacques Charron est PDG de K2 Geospatial, une firme qui conçoit et développe des solutions pour la gestion d'actifs municipaux, portuaires, miniers et d'infrastructure. «On a mis en place un logiciel qui permet de gérer ces infrastructures par cartographie spatiale. Au lieu d'avoir 50 systèmes pour gérer un réseau d'eau, on a une solution qui permet aux gestionnaires de tout contrôler à partir d'un iPad», explique le spécialiste en géomatique.

K2 Geospatial est en train de mettre en place à Montréal son système qui va permettre aux gestionnaires de la Ville d'avoir une vue d'ensemble de son réseau sous-terrain où s'entremêlent les fils du câble, du téléphone, d'Hydro-Québec, de Gaz Métro et le réseau d'eau.

«C'est ma sixième visite au Brésil en trois ans. J'avais un distributeur pour vendre nos produits et là, je viens de signer avec trois autres. On a déjà un contrat avec la société OI Telecom. Plus de 35 000 de leurs gestionnaires à l'interne vont utiliser notre logiciel», résume Jaques Charron qui voit un immense potentiel au Brésil, où les importants travaux d'infrastructures en cour pourront profiter de ses systèmes de gestion.

Enfin, Sebastien Plourde, PDG de Super Décapant, débarque pour la première fois au Brésil. Il veut y faire fabriquer sa recette de décapants pour meubles qui obtient un véritable succès au Canada et la faire distribuer dans toutes les quincailleries du Brésil. «C'est ce qu'on a fait au Canada où on est distribué dans toutes les quincailleries au pays et je veux utiliser la même méthode au Brésil qui est un fabuleux marché», souligne Sébastien Plourde.

Au moment de notre rencontre, il venait tout juste de passer une heure et demie avec le président d'Abrafati, l'association brésilienne des fabricants de peinture. «La rencontre devait durer 15 minutes, mais le gars aimait ce que je lui racontais. J'ai un rendez-vous demain avec un fabricant qui pourrait préparer ma recette», explique-t-il. Visiblement, Sébastien Plourde est convaincu que son projet ne tardera pas à se mettre en marche.