Le gouvernement irlandais, en fin de règne, présente ce mardi au Parlement le budget d'austérité le plus sévère de l'histoire du pays, un tour de vis exigé par l'UE et le FMI en échange du sauvetage de l'île, mais qui pourrait faire capoter sa fragile reprise.

Le ministre des Finances Brian Lenihan doit annoncer à 15H45 GMT (10h45 heure de Montréal) les détails de ce budget de rigueur, qui vise à dégager 6 milliards d'euros, pour un tiers via des hausses d'impôts et pour les deux-tiers grâce à des coupes dans les dépenses.

Ce tour de vis, d'ampleur inédite selon des médias irlandais, doit permettre à lui seul de réaliser 40% du programme d'austérité de 15 milliards d'euros sur quatre ans annoncé le mois dernier par Dublin pour ramener le déficit irlandais de 32% du PIB cette année à moins de 3% en 2014.

Le gouvernement, qui vit ses derniers mois, s'étant engagé à convoquer des élections une fois le budget adopté, a promis cette cure d'austérité en échange du plan de sauvetage de 85 milliards d'euros négocié avec l'Union européenne et le Fonds monétaire international.

Les grandes lignes du budget 2011 sont largement connues. Il inclura des tailles sévères dans les dépenses sociales, une augmentation de l'impôt sur le revenu, des suppressions de postes de fonctionnaires et une hausse des frais d'université. Les ministres pourraient montrer l'exemple en diminuant leur propre paye.

Après une manifestation qui avait rassemblé entre 50 000 et 150 000 personnes il y a deux semaines dans la capitale, les mesures annoncées ce mardi pourraient soulever un nouveau vent de colère au sein d'une population lassée de multiplier les sacrifices et ulcérée par un plan d'aide international qu'elle perçoit comme une atteinte à une indépendance chèrement acquise. Un rassemblement est prévu en fin d'après-midi devant le Parlement.

La rigueur devrait aussi accroître l'impopularité déjà record du Premier ministre Brian Cowen (sa cote est tombée à 8% d'opinion favorables selon un sondage récent), et renforcer d'autant les chances de victoire de l'opposition, menée par le parti de centre-droit Fine Gael, aux prochaines législatives.

Mais alors que la communauté internationale s'inquiétait d'un rejet du budget, vu la majorité très ténue (deux voix seulement) dont dispose le gouvernement au Parlement, son adoption semble désormais a priori assurée.

Lundi soir, un des deux députés sans étiquette qui assurent au gouvernement sa majorité, et qui avaient menacé de faire défection, a en effet indiqué qu'il approuverait le budget, et a laissé entendre que son collègue ferait de même.

Il faudra cependant attendre début 2011 pour que le budget soit définitivement bouclé.

Après le discours mardi de M. Lenihan, les députés se borneront en effet de voter dans la soirée sur un train de mesures techniques, puis ils se prononceront d'ici jeudi sur le volant social du budget. Mais le gros de la législation budgétaire, la loi de finances proprement dite, ne sera examinée qu'à partir de la mi-janvier.

Au-delà des lourds enjeux politiques et sociaux, ce budget risque aussi de peser lourdement sur l'économie irlandaise, qui peine à se remettre de sa pire crise depuis l'indépendance.

Après une brève flambée d'activité au début de l'année, la croissance a calé dans l'ex-Tigre celtique au deuxième trimestre, faisant craindre un retour dans la récession, et la potion amère administrée par Brian Cowen risque d'aggraver la situation. «Les temps vont être durs pour le consommateur irlandais», a résumé Barry Dixon, économiste de la maison de courtage Davy.