Pour préserver l'euro, l'Europe n'a qu'à prendre exemple sur l'Allemagne: telle est l'essence du message délivré par la chancelière Angela Merkel mercredi aux députés, dans un appel aux accents dramatiques à sauver la monnaie unique et avec elle tout le projet européen.

«L'euro est en danger, et si nous ne parons pas ce danger, les conséquences pour l'Europe sont incalculables et les conséquences au-delà de l'Europe sont incalculables», a déclaré la chancelière conservatrice. «Si l'euro échoue, l'Europe échoue», a-t-elle martelé.

Elle défendait devant les députés du Bundestag, chambre basse du Parlement, le projet de loi sur la participation de l'Allemagne au plan européen de plusieurs centaines de milliards d'euros de soutien à la zone euro.

Première économie européenne, l'Allemagne contribuera jusqu'à 150 milliards d'euros au vaste dispositif mis en place par l'Union européenne et le Fonds monétaire international (FMI) pour renflouer les caisses des pays de la zone euro très endettés, qui n'accèdent que difficilement au marché du crédit.

«Je veux que l'Europe s'engage à (adopter) une nouvelle culture de stabilité», a déclaré la chancelière. Et le modèle en est tout trouvé, c'est l'Allemagne elle-même: «Notre culture de stabilité a plus que fait ses preuves».

«Les règles ne doivent pas s'orienter sur les plus faibles, mais sur les plus forts», a-t-elle encore dit, un appel aux autres membres de l'union monétaire à prendre exemple sur l'Allemagne.

Celle-ci, avec un déficit public attendu à près de 6% du produit intérieur brut (PIB) cette année, n'est pourtant pas un parangon de vertu puisque le pacte européen de stabilité fixe la limite à 3%.

«Nous aussi nous vivons à crédit», a reconnu Mme Merkel. Mais par rapport aux taux de 14% et 7,3% prévus par la Grèce et le Portugal par exemple, Berlin fait figure de bon élève.

Et surtout, «nous avons adopté dans notre Constitution le plafond d'endettement», une mesure qui entrera en vigueur l'an prochain et que Berlin aimerait voir étendue à ses partenaires.

Si les contrevenants persistent à «vivre au-dessus de leurs moyens», Mme Merkel n'est pas à cours d'idées pour les punir: retrait de l'accès aux fonds structurels européens, retrait des droits de vote dans les institutions européennes et, au pire, mise en faillite, pour laquelle devra être élaborée «une procédure ordonnée».

Le ministre des Finances Wolfgang Schäuble présentera toutes ces propositions à ses homologues européens vendredi à Bruxelles. Car «à long terme, la stabilité n'est pas concevable sans finances publiques saines», fait valoir Mme Merkel.

Le Bundestag, où la coalition gouvernementale détient la majorité, devrait adopter cette semaine le projet de loi, qui, quoique de nettement plus grande ampleur, fait beaucoup moins de remous dans l'opinion publique que l'aide à la Grèce votée au début du mois.

Mais les députés ont posé un certain nombre de conditions à leur aval, notamment un engagement de Berlin à défendre une taxation des activités financières dans le cadre du G20, qui réunira le mois prochain à Toronto les dirigeants des 20 pays les plus puissants de la planète.

Mme Merkel leur a redit mercredi qu'elle allait s'engager pour un tel impôt, sans en préciser la forme.

L'Allemagne va aussi faire des propositions visant à renforcer la discipline budgétaire dans la zone euro, comme la suspension du versement de fonds structurels européens aux pays qui ne respectent pas leurs objectifs de réduction des déficits, ou encore le retrait temporaire du droit de vote pour ceux qui commettent des infractions graves aux règles de l'Union monétaire.