Les récentes révélations sur le rôle joué par la prestigieuse banque américaine Goldman Sachs dans la crise grecque ont mis en évidence certaines astuces de la finance, basées sur des failles de la réglementation et des produits opaques, pour générer des profits colossaux.

D'après les journaux américains New York Times et Risk Magazine, et le quotidien allemand Der Spiegel, Goldman Sachs, conseil d'Athènes, a permis à l'État grec de maquiller la réalité de sa dette.

En 2002, sur les conseils de la banque, Athènes a emprunté un milliard d'euros en usant d'un produit financier complexe qui lui a permis de ne pas inscrire cette opération dans ses comptes. Grosso modo, la banque a déguisé un emprunt à long terme.

Cet artifice, jugé légal, a permis non seulement à Athènes de répondre aux exigences du pacte de stabilité de la zone euro, mais aussi de repousser les échéances de remboursement de ses créances.

Selon le quotidien Financial Times, dans l'accord entre Goldman Sachs et Athènes, cette transaction devait rester secrète et n'être reportée dans les comptes que l'année suivante.

«Goldman Sachs a recommandé à la banque grecque d'utiliser des produits dérivés pour essayer d'échelonner les déficits», explique à l'AFP Sophie van Straelen spécialiste des Hedge Funds chez Asterias, société d'analyse sur ces fonds spéculatifs.

Selon elle, la banque «a en quelque sorte maquillé une partie de la dette grecque».

«Ce sont des pratiques extrêmement répandues. Ces opérations n'ont pas été faites pour masquer la dette, mais pour reporter celle-ci à plus tard», explique de son côté Pierre Antoine Dusoulier, président de Saxo Banque France. Selon lui, il est «normal de rendre la mariée plus belle avant de faire une opération».

Pour le ministre grec des Finances, Georges Papaconstantinou, l'opération était «légale à l'époque», même si elle ne l'est plus aujourd'hui.

Mais d'après le porte-parole du parti chrétien démocrate allemand d'Angela Merkel, «Goldman Sachs a violé l'esprit du traité de Maastricht, bien qu'il ne soit pas certain qu'ils aient violé la loi».

Contacté par l'AFP, la banque américaine n'a pas souhaité faire de commentaire.

Au delà de Goldman Sachs, sont visés les différents produits financiers conçus par les banques d'investissement contre de juteuses commissions pour permettre aux États d'embellir leurs finances.

Nombre de pays en Europe ont recours à divers subterfuges, qui ne violent pas la réglementation européenne, pour financer leur endettement.

Les banques proposent par exemple aux États un procédé qui consiste à utiliser des actifs publics pour garantir des obligations d'État, ce qui permet de ne pas comptabiliser celles-ci dans la comptabilité nationale.

Une banque encouragerait par exemple un pays à adosser ses obligations à de futures taxes d'aéroport à percevoir.

«De telles opérations sont légales et ont été réalisées par des pays partout en Europe avec le concours des banques de Wall Street», confie à l'AFP une source financière, sans citer de nom.

D'autant plus qu'il est «très difficile de vérifier les comptes de l'État», dont la sincérité est rarement mise en cause, confie une source financière, ayant requis l'anonymat.

Selon le FT, les banques d'investissement suisse UBS et japonaise Nomura sont par exemple très actives en Italie.

«S'il y a une possibilité de gagner beaucoup d'argent, Goldman est toujours dessus. Leur créneau, c'est de faire des trucs un peu malins», ajoute M. Dusoulier.

Pourtant, «je ne suis qu'un banquier faisant le travail de Dieu», avait déclaré début novembre au journal britannique Sunday Times Lloyd Blankfein, PDG de Goldman Sachs.