La crise pourrait faire grimper le nombre de chômeurs dans le monde jusqu'au chiffre record de 239 millions de personnes, a estimé jeudi le Bureau international du travail qui a revu à la hausse ses prévisions.

«Le marché du travail a continué de se détériorer depuis le début de la crise financière», a expliqué le directeur général du BIT, Juan Somavia.

«Nos projections actuelles suggèrent que (le nombre de chômeurs) augmentera de 39 à 59 millions de personnes» en 2009 par rapport à 2007, a ajouté le responsable.

Sur cette base, le nombre total de chômeurs enregistrés sur la planète pourrait atteindre «210 à 239 millions de personnes» à la fin de l'année, constituant un record absolu, selon le BIT.

Ce dernier chiffre correspond à un taux de chômage mondial de 7,4%, dépassant de loin le taux de 6,5% enregistré en 2003, le niveau le plus élevé depuis 1991.

Dans ses dernières prévisions de mars, le BIT tablait sur une augmentation du nombre de chômeurs de 52 millions sur deux ans, pour atteindre, dans son précédent «scénario du pire» 230 millions de personnes. Ces chiffres étaient en partie fondés sur les prévisions de croissance du Fonds monétaire international (FMI) qui ont depuis été revues à la baisse vers une récession d'environ 1,3%.

Selon le BIT, les pays développés devraient porter le plus lourd tribut de la montée actuelle du chômage mondial, avec «35 à 40% de la hausse totale» alors qu'ils «ne représentent que 16% de la main d'oeuvre globale».

Les pays de l'Est verront pour leur part leur taux de chômage bondir de 35%, tandis que ceux du Moyen-Orient pourrait avoir une poussée de 25%, parmi les plus élevés au monde.

Par ailleurs, le BIT estime que les jeunes seront parmi les principales victimes de la crise de l'emploi avec un taux de chômage passant de 12% en 2008 à 14-15% en 2009.

Quelque 200 millions de travailleurs pauvres risquent de plus, selon le BIT, de rejoindre les rangs des populations les plus défavorisées vivant avec moins de 2 dollars par jour.

Enfin, le BIT souligne que 2009 «correspondra à la pire performance mondiale jamais enregistrée en termes de création d'emplois», alors que la croissance démographique implique l'arrivée chaque année de 45 millions de personnes sur le marché du travail.

Un tel tableau appelle à agir au plus vite, a estimé M. Somavia faisant valoir que «des populations souffraient aujourd'hui».

Il a reconnu que les plans de relance économique engagés par un certain nombre de pays riches avaient commencé à «donner des signes d'impact» mais estimé qu'ils n'étaient pas suffisants.

Le directeur du BIT a rappelé la nécessité d'orienter ces plans sur le marché du travail, faisant la promotion d'un Pacte mondial pour l'emploi qui doit être discuté lors de l'assemblée annuelle du BIT qui démarre le 3 juin à Genève.

Ce pacte vise à «placer la création d'emplois et la protection sociale au centre des politiques de reprise» afin de «réduire le temps» entre le redémarrage de l'économie et celui de l'emploi, a encore expliqué M. Somavia.

«Si des mesures audacieuses ne sont pas prises rapidement, la crise de l'emploi persistera bien après (...) que l'économie mondiale aura renoué avec la croissance», a-t-il insisté. Le directeur du BIT a aussi prévenu: «la crise mondiale du travail (...) pourrait durer 6 à 8 ans si aucune action concrète n'est prise.»