Moins de six semaines après avoir sondé le marché pour une location de deux à six ans, la Commission scolaire de Montréal (CSDM) envisageait déjà de négocier un bail de long terme d'une durée de 20 ans avec les soumissionnaires, indique un document préparé par l'administration de la commission scolaire à l'intention de ses employés.

« Et même si notre appel d'avis d'intérêt porte sur le volet temporaire de la délocalisation du CA [centre administratif], mais nous évaluerons les propositions dans l'éventualité qu'elles puissent devenir permanentes », lit-on dans le communiqué interne Délocalisation et appel d'avis d'intérêt, daté du 20 avril 2017, que La Presse a obtenu.

Mais ce n'est pourtant qu'à la séance du 8 novembre que le conseil des commissaires a été mis au courant de l'option du bail à long terme, confirme le commissaire indépendant Jean-François Gosselin, à qui on a demandé de réagir.

« Aujourd'hui, je prends connaissance de documents et je constate que l'option de la location à long terme est retenue sérieusement depuis plusieurs mois, dit le commissaire du district La Petite-Patrie-Rosemont-Ouest. Des orientations majeures et définitives se prennent sans transparence, sans en informer l'ensemble des élus et sans consultation. »

UNE DIFFÉRENCE IMPORTANTE

Les enjeux financiers sont fort différents entre un bail de 180 000 pi2 d'une durée de 2 ans et un autre de la même superficie, mais d'une durée de 20 ans. Dans une présentation faite aux employés du centre administratif le 7 juillet, la CSDM parle d'un projet pouvant atteindre 130 millions. Elle envisage de vendre jusqu'à 12 bâtiments excédentaires pour payer le futur loyer.

L'avis d'appel d'intérêt sur une location de deux à six ans, qui contenait une clause de résiliation en faveur de la CSDM sans pénalité après deux ans, a suscité bien peu de réponses sur le marché. Seulement deux offres ont été formulées, dont celle de Cominar pour son immeuble du 5100, Sherbrooke Est.

« Ce n'est pas un détail de changer le terme de 2 à 20 ans. Avec un bail de 20 ans, il y a même du monde qui va proposer de construire des bureaux sur mesure. » - Christian Guay, président de l'agence Immobilière Nationale

La Commission scolaire réplique qu'elle s'est adjoint les services d'une firme spécialisée, Terramont, pour l'aider dans ses négociations avec les bailleurs. Elle soutient aussi que Terramont a le mandat d'exercer une vigie de marché et « de nous aviser de toutes les possibilités dans le marché immobilier ».

Pourtant, la semaine dernière, deux des plus importants promoteurs de Montréal ont indiqué à La Presse ignorer que la CSDM cherchait des bureaux à long terme. Les deux ont soutenu qu'ils auraient un grand intérêt à répondre aux besoins d'un client d'une telle qualité. L'un d'eux est Broccolini, la société qui a remporté l'appel d'offres pour offrir une nouvelle Maison à Radio-Canada. L'autre est le Groupe Montoni.

« Je n'étais pas au courant, dit Mike Jagger, directeur développement des affaires chez Montoni. On a différents terrains à Montréal. Si nos terrains tombent dans le secteur recherché par la CSDM, ça nous intéresse de soumissionner, c'est sûr. »

Bon an, mal an, Montoni acquiert entre 2 et 4 millions de pieds carrés de terrains et construit pour 2,5 millions de pieds carrés de bâtiments.

RAPPEL DES FAITS

Le centre administratif actuel, au 3737, rue Sherbrooke Est, est en piteux état. Les employés doivent quitter les lieux à plus ou moins brève échéance pour leur santé et leur sécurité. Après avoir fait un appel d'offres pour un bail de 2 à 6 ans, la Commission scolaire a décidé de négocier un bail de 20 ans avec le soumissionnaire retenu pour l'option court terme. La CSDM rétorque qu'elle n'est pas obligée de publier un appel d'offres pour la location d'immeubles selon la Loi sur les contrats des organismes publics.