Qualifié de « Viagra féminin », le médicament contre la sécheresse vaginale de l'entreprise québécoise EndoCeutics a été approuvé par la Food and Drug Administration (FDA) aux États-Unis. Celui qui l'a inventé, le Dr Fernand Labrie, affirme que sa fabrication se fera au Québec et créera des centaines d'emplois.

Appelé Intrarosa, le médicament d'EndoCeutics s'adresse aux femmes ménopausées ayant des douleurs lors des relations sexuelles (50 % d'entre elles). Présenté sous forme de suppositoire vaginal, il contient de la DHEA (déhydroépiandrostérone), une molécule naturelle qui améliore l'hydratation et réduit ainsi l'irritation.

« C'est la première fois que la DHEA est commercialisée dans le monde. Avant, ce n'était pas reconnu. [...] C'est un très gros coup. Ça n'arrive pas souvent. C'est bon pour la réputation du Québec, de l'Université Laval et du CHU. C'est encourageant pour les entrepreneurs du Québec. Et pour les femmes, c'est une amélioration très importante », a déclaré à La Presse Fernand Labrie.

Pour fabriquer son médicament à grande échelle, le fondateur d'EndoCeutics prévoit « acheter une usine qui existe déjà et en augmenter de beaucoup la capacité de production, qui est actuellement assez limitée ». Le chercheur et PDG n'a pas voulu dire à qui appartient cette usine, ni dans quelle ville elle se trouve, pour ne pas nuire aux négociations.

Il estime que la production de l'Intrarosa pourrait y commencer vers la fin de 2017. D'ici là, le médicament sera fabriqué « ailleurs » (dans environ trois mois).

Il ne faut pas confondre ce médicament avec celui créé par Sprout Pharmaceuticals, appelé Addyi et acquis l'an dernier par l'entreprise lavalloise Valeant Canada. Ce médicament censé augmenter la libido féminine a aussi été surnommé le « Viagra féminin ». Notons aussi que l'Intrarosa a déjà porté le nom de Vaginorm et que l'entente de commercialisation annoncée avec Bayer en 2010 a été dissoute depuis.

Notons également que la Cour suprême du Canada a forcé, en avril dernier, EndoCeutics à partager les redevances de son médicament avec l'Université Laval et le Centre hospitalier universitaire de Québec (CHU). Quel sera l'impact concret de la commercialisation de l'Intrarosa aux États-Unis ? L'Université Laval n'a pas voulu commenter « car des négociations sont présentement en cours avec EndoCeutics concernant les modalités d'application dudit jugement », a fait savoir un porte-parole.

JUSQU'À 1000 EMPLOYÉS

Chose certaine, le nombre d'employés d'EndoCeutics est appelé à croître. La société pharmaceutique emploie actuellement 50 personnes. Ce nombre pourrait « être multiplié par 5, par 10 ou par 20 », dit Fernand Labrie. Il estime en effet qu'il n'est « pas impossible » que les effectifs grimpent à 1000 personnes.

Les applicateurs de plastique seront eux aussi fabriqués au Québec, souligne le dirigeant. Étant donné que l'Interosa doit être administré tous les jours, et qu'aux États-Unis les applicateurs ne seront utilisés qu'une fois (ailleurs dans le monde, les femmes pourraient utiliser un applicateur par semaine), on parle d'un très grand nombre d'applicateurs.

Fernand Labrie rappelle que le nombre de clientes potentielles est immense. Seulement aux États-Unis, 32 millions de femmes ménopausées souffrent d'atrophie vaginale (à l'origine de la douleur). 

Du nombre, seulement 3 % sont actuellement traitées, car l'actuel médicament est à base d'oestrogène et cette hormone est associée à certains cancers, explique le DLabrie. La DHEA, en revanche, ne provoque pas d'effets secondaires, fait-il valoir.

8,8 MILLIONS DE FEMMES

Fernand Labrie espère vendre son médicament à 25 % des femmes souffrant d'atrophie vaginale. « C'est un minimum, ça veut dire 8 millions de femmes aux États-Unis et 800 000 au Canada ». Le prix de vente au détail du médicament n'aurait pas été fixé. Le traitement actuel à l'oestrogène coûte 4 $ par jour.

L'Intrarosa n'a pas encore été approuvé au Canada, mais Fernand Labrie s'attend à obtenir une réponse à la fin de 2017. Entre-temps, il recevra la réponse de l'Europe, prévoit-il. La réponse favorable de la FDA devrait jouer en sa faveur.

EndoCeutics prévoit par ailleurs effectuer d'autres études afin d'établir si l'Intrarosa peut également améliorer le niveau de désir et l'atteinte de l'orgasme. Jusqu'ici, 265 millions de dollars ont été investis en recherche et développement.

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