De grands noms de l'industrie américaine taillent dans leurs effectifs et ferment des usines, notamment en Europe, pour réduire leurs coûts face à la crise du Vieux Continent, au ralentissement en Chine et aux incertitudes aux États-Unis.

En pleine saison de publications de leurs résultats trimestriels, les entreprises américaines annoncent en grand nombre un ralentissement de leur activité qui devrait s'accentuer dans les mois à venir.

«Les entreprises s'inquiètent de la croissance mondiale, pas nécessairement aux États-Unis mais plutôt en Asie et en Europe», constate l'économiste indépendant Joel Naroff.

«Elles n'ont pas de perspectives de croissance en Asie et en Europe à court terme. Le seul marché où il y a encore un tout petit peu de croissance, c'est les États-Unis, mais ils ne savent pas à quelle sauce ils vont être mangés après les élections (présidentielles du 6 novembre) en termes de taxation des revenus et des dividendes, ou en termes de dépenses publiques», renchérit Gregori Volokhine, stratège de Meeschaert New York.

«Alors pour préserver leurs bénéfices elles n'ont pas d'autre choix que de se replier» là où la croissance présente les plus mauvaises perspectives, ajoute-t-il.

Ford a annoncé ces deux derniers jours la fermeture de trois usines, deux en Grande-Bretagne et une en Belgique, soit plus de 6000 postes supprimés, alors qu'il s'attend à perdre au moins 1,5 milliard de dollars sur le Vieux Continent cette année.

Mardi, le groupe de chimie Dow Chemical avait averti de 2400 suppressions d'emplois et de la fermeture de 20 usines, dont au moins quatre en Europe.

Mercredi, c'est un fabricant de mouchoirs en papier Kimberly-Clark qui déclarait vouloir éliminer 1300 à 1500 postes en Europe.

Sans compter le fabricant de microprocesseurs AMD, le géant de la chimie Dupont ou encore le groupe de produits de grande consommation Colgate, qui ont tous annoncé des réductions d'effectifs dans le monde, sans préciser où.

«Sur les années 2007-2008, l'ajustement s'était fait sur le territoire américain», à la fois en termes d'emplois, de capacité de production et de salaires, remarque Evariste Lefeuvre, économiste de Natixis. «Maintenant les perspectives de croissance en Europe sont déplorables» ce qui fait que le Vieux Continent est à son tour touché.

Outre la chute de l'activité, les multinationales ont pâti d'un taux de change défavorable en Europe alors que le billet vert s'est renforcé face à l'euro sur un an, ce qui diminue ménaniquement la valeur des recettes en Europe.

Elles s'attendent à ce que la morosité en Europe dure.

Le fabricant d'engins de chantier Caterpillar, qui n'a pas annoncé de licenciements, table sur une embellie aux États-Unis, en Chine et dans les pays en développement l'an prochain, mais sur «des difficultés persistantes en Europe».

Joel Naroff remarque que les entreprises «ne vont pas forcément mener à bien toutes les mesures annoncées», car elles ont évoqué des horizons très longs, jusqu'à 18 mois, pour les mener à bien. «Elles se protègent», conclut-il.

Les mauvaises nouvelles ne sont cependant probablement pas finies, en particulier dans l'automobile, où la majorité des constructeurs disent pâtir de surcapacités de production qui alourdissent considérablement leurs coûts et minent leur rentabilité.

Morgan Stanley note, à propos des fermetures d'usines de Ford, que «la plus grande question est de savoir si d'autres peuvent lui emboiter» le pas et prendre «les décisions difficiles qui paieront sur le long terme».

Le numéro un américain de l'automobile GM, dont les résultats sont également plombés par des pertes en Europe, a déjà fait savoir qu'il annoncerait des mesures cet automne pour y diminuer sa capacité de production.