Un coup de pouce pour la défense, des coupes claires pour l'aide sociale et la diplomatie: le premier budget de l'ère Trump promet un retour à l'équilibre au prix d'une cure d'austérité décriée par les démocrates.

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Baptisé «Une nouvelle fondation pour la grandeur américaine», le projet de loi de finances 2018 dévoilé mardi a peu de chances d'être adopté en l'état par le Congrès, mais il fait la part belle à la doctrine de «l'Amérique d'abord» qui a permis à l'homme d'affaires de conquérir la Maison-Blanche.

L'exécutif prévoit ainsi de couper de 31,5% les ressources allouées au département d'État, responsable de la diplomatie américaine, et à son agence de développement international USAID.

«Je veux l'appeler le budget du «contribuable d'abord». (...) Nous avons regardé ce budget avec les yeux de ceux qui payent les factures», a commenté Mick Mulvaney, le directeur du budget à la Maison-Blanche, devant la presse.

Conformément aux promesses du candidat Donald Trump, ce budget de 4100 milliards de dollars prévoit également une hausse de 10% des dépenses militaires sur un an, et 2,6 milliards de dollars supplémentaires pour la protection des frontières.

«Dans ces temps dangereux, notre attention accrue portée à la sécurité publique et nationale envoie un message clair au monde: un message de force et de détermination», écrit en préface de ce document Donald Trump.

L'administration entend notamment consacrer 1,6 milliard de dollars à la construction du mur que le président Trump veut ériger le long de la frontière américano-mexicaine. Le coût de ce chantier colossal est estimé à au moins 20 milliards de dollars.

Coupes drastiques

Dans le même temps, ce budget censé financer l'État fédéral après la fin de l'exercice actuel fin septembre se veut vertueux et opère des coupes drastiques pour espérer renouer avec un excédent en 2027.

C'est le signe d'un «retour à une certaine discipline budgétaire», a plaidé M. Mulvaney.

Sur les dix prochaines années, l'exécutif veut ainsi économiser 1700 milliards de dollars dans les programmes sociaux en réduisant de 610 milliards le programme d'accès aux soins des plus pauvres (Medicaid) et en baissant les dotations sur les coupons alimentaires (-193 milliards).

Pour regarnir ses caisses, le budget propose également de mettre en vente d'ici 2027 la moitié des réserves stratégiques de pétrole accumulées par les États-Unis.

Honni des républicains et de l'industrie pétrolière, l'agence fédérale de protection de l'environnement (EPA) fait également les frais de cette cure d'austérité avec des dotations en chute libre de 31,4%. L'éducation est à peine mieux lotie (-13,5%).

Ces coupes dans les programmes sociaux ont provoqué une levée de boucliers de l'opposition démocrate. Ce budget «est extrémiste et représente l'antithèse de ce que les Américains disent attendre de leur gouvernement», a réagi John Yarmuth représentant du Kentucky.

Centre de réflexion indépendant, le Center on Budget and Policy Priorities a lui aussi estimé que le budget «enterrait définitivement l'idée que le président Trump entendait prendre soin des millions de personnes que l'économie a laissées sur le bas-côté».

L'administration Trump se défend de manquer de «compassion».

«La compassion doit se trouver des deux côtés de l'équation. Oui nous devons avoir de la compassion pour les gens qui reçoivent des fonds fédéraux, mais nous devons également avoir de la compassion pour les gens qui les financent», a assuré M. Mulvaney, en ajoutant qu'«aucune personne qui en a vraiment besoin ne sera écartée des programmes» d'assistance sociale.

L'administration, fait-il valoir, laisse par ailleurs intacte la couverture santé pour les plus de 65 ans (Medicare) et les retraites (Social Security) et introduit un congé parental payé de six semaines, une proposition défendue par la fille aînée du président, Ivanka Trump.

Le budget est également critiqué pour son manque de réalisme: il est bâti sur une croissance économique de 3%, soit quasiment le double de celle atteinte en 2016 (1,6%).

«C'est incroyable de penser qu'avoir 3% de croissance de l'économie américaine semble absurde pour certains (...) Il y a dix ans, c'était normal», s'est défendu M. Mulvaney.

Ancien secrétaire au Trésor de Bill Clinton, le démocrate Larry Summers n'a pas été convaincu. «On ne peut être d'accord qu'à condition de croire aux contes de fées».