La réunion de la banque centrale des États-Unis qui s'ouvre mardi a fait couler de l'encre comme rarement depuis le début de la crise, alors que l'assouplissement monétaire auquel elle pourrait ouvrir la voie suscite autant d'espoirs que de craintes.

Le comité de politique monétaire (FOMC) de la Fed entame à la mi-journée une réunion de deux jours à Washington, pour discuter de nouvelles mesures de soutien à l'économie.

Celle-ci commence alors que les Américains sont appelés aux urnes pour des élections législatives qui s'annoncent mal pour les démocrates du président Barack Obama, victimes de la morosité économique ambiante.

La banque centrale américaine, selon l'expression du vice-président du FOMC William Dudley, trouve aujourd'hui «inacceptables» les niveaux du chômage, trop élevé, et de l'inflation, trop basse. Elle devrait donc mettre son poids dans la balance pour stimuler l'activité économique.

Les jours passant, la question n'est plus de savoir si la Fed va «mener un assouplissement supplémentaire si nécessaire pour soutenir la reprise économique», comme le disait le FOMC à l'issue de sa dernière réunion en septembre. C'est sous quelle forme et pour quel montant.

La banque d'affaires Goldman Sachs parie pour «l'annonce d'environ 500 milliards de dollars d'achats» de titres de dette du Trésor, «ou un programme équivalent traduit par un rythme de 100 milliards de dollars par mois».

Un indicateur économique très favorable lundi, avec une croissance de l'activité de l'industrie manufacturière élevée en octobre (indice ISM à 56,9%), n'y a rien changé.

«La hausse inattendue de l'indice ISM en octobre ne menace pas le projet de la Fed d'engager un deuxième cycle d'assouplissement quantitatif», ont estimé mardi les analystes de Mizuho Securities.

L'assouplissement quantitatif consiste à injecter directement de la monnaie dans le système financier, dans l'espoir qu'elle soit prêtée aux agents économiques et suscite investissements et consommation.

La Fed est contrainte d'employer cette méthode en lieu et place de l'instrument plus classique de la politique monétaire, la baisse du taux d'intérêt directeur, car celui-ci est proche de zéro depuis décembre 2008.

Mais l'idée de recourir à l'injection monétaire, instrument déjà employé lors de la récession qui s'est achevée en juin 2009, a valu des critiques à la Fed, parfois véhémentes.

En interne, plusieurs dirigeants de la banque centrale ont exprimé ouvertement la crainte que cet afflux de dollars réveille une inflation indésirable, et qu'il ait un effet limité sur l'activité. Ils restent minoritaires.

En externe, des économistes ont estimé qu'avec 981 milliards de dollars de réserves non utilisées dans le système bancaire et 943 milliards de trésorerie disponible dans les entreprises américaines, imprimer quelques centaines de milliards de plus pourrait revenir à jeter de l'argent dans un puits.

«Les entreprises sont déjà assises sur des montagnes d'argent et n'investissent pas. Les prêts aux consommateurs sont déjà plutôt bon marché et la consommation n'augmente pas», souligne l'économiste Mark Thoma, de l'Université de l'Oregon.

À l'étranger, la Fed a été parfois accusée de déstabiliser l'économie mondiale en l'inondant de dollars. La monnaie américaine a déjà beaucoup reculé ces dernières semaines, «victime collatérale» de l'annonce d'un nouvel assouplissement, selon les analystes d'Aurel-ETC Pollak.