Les syndiqués en lock-out de l'aluminerie de Bécancour (ABI) demandent à François Legault de se rendre à Pittsburgh afin de convaincre les dirigeants d'Alcoa - « une multinationale américaine qui nous rentre dedans » - de négocier avec eux de bonne foi.

Les travailleurs, en lock-out depuis 14 mois, ont tenu ces derniers jours une « marche de l'énergie » qui les a menés de Bécancour à l'Assemblée nationale. Une rencontre avec le premier ministre François Legault doit se tenir lundi prochain, mais ce dernier n'entend pas s'interposer dans le conflit.

« Pour l'instant, c'est un conflit qui est privé. Je vais rencontrer le syndicat lundi, je vais rencontrer les représentants patronaux. Je vais essayer de demander aux deux parties de faire un effort spécial, peut-être me faire une idée aussi sur quelle partie est la moins raisonnable », a dit M. Legault mercredi.

Aux yeux de Donald Martel, député caquiste de Nicolet-Bécancour, le gouvernement ne peut imposer un règlement au lock-out, ce qui n'enverrait pas un bon message pour attirer des investisseurs dans la région.

« Est-ce que c'est dans l'intérêt du développement économique au Québec [d'imposer une fin de lock-out] ? Je ne suis pas certain. Prenons en exemple le parc industriel de Bécancour. On essaie d'attirer des entreprises. Si on commence à légiférer des conditions de travail [à ABI], je ne suis pas sûr que c'est un bon message qu'on envoie pour les investisseurs potentiels », a-t-il déclaré mercredi.

Un long conflit 

Le 11 mars dernier, les travailleurs d'ABI ont rejeté à la hauteur de 82 % l'offre patronale pour mettre fin au lock-out. Le Syndicat des métallos jugeait alors que la proposition-qui n'avait pas été négociée-était moins généreuse que celle qui avait été faite avant le conflit de travail.

À l'heure actuelle, selon un contrat qui lie ABI à Hydro-Québec, l'entreprise américaine n'a pas à payer pour le bloc d'électricité qui lui est réservée en raison d'une clause de force majeure. Cette clause a coûté des millions à la société d'État depuis le début du lock-out.

« Il va falloir que le gouvernement sorte de sa fausse neutralité et renégocie ces clauses-là dans le contrat d'énergie avec ABI », a dit mercredi Alexandre Leduc, député de Québec solidaire (QS).

« Le contrat d'Hydro-Québec, c'est du stuff de junior. Je n'en reviens pas que le gouvernement libéral ait signé un contrat comme ça. Je suis tombé en bas de ma chaise de voir qu'on peut utiliser un lock-out comme supposée situation de force majeure pour annuler un contrat qui va faire perdre plus de 200 millions par année à Hydro-Québec, donc aux Québécois. Mais le contrat est blindé, a été signé sous le gouvernement libéral. C'est un contrat en bonne et due forme », a toutefois dit quelques instants plus tard François Legault 

« Il y a du monde, des hommes et des femmes, des familles et des couples [en lock-out]. C'est 14 mois, 14 mois intenses de vivre ça, de vivre ce lock-out... J'aimerais ça qu'on pense à ces gens-là, à ces familles-là qui sont touchées par ce qui arrive », a pour sa part affirmé le député péquiste Harold Lebel.

-Avec Tommy Chouinard, La Presse