Quand un important acteur du forage minier est venu jouer dans les plates-bandes de l'entreprise familiale dans le camp minier de Chibougamau - il vendait sous le prix coûtant pour «tuer» la concurrence -, Steve Larouche a pris sa voiture et son bâton de pèlerin. Il est allé faire le tour des projets miniers en Ontario pour offrir les services de Forages Chibougamau. Il a réussi à placer deux foreuses dans un projet, ce qui a permis à l'entreprise de rester en vie.

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C'était en 1984. Forages Chibougamau, dirigée par les frères Serge et Steve Larouche et fondée par leur père il y a 45 ans, emploie aujourd'hui 200 personnes et fait tourner 35 foreuses. C'est devenu une société reconnue dans le milieu et spécialisée dans les longs trous de forage (plus de 2500 mètres).

Mais comme en 1984, tout n'est pas devenu facile pour la société bien établie. Le marché se concentre. La concurrence est forte. Et la main-d'oeuvre est rare.

«Je me fais voler des foreurs par de grandes sociétés internationales établies dans des endroits où les foreurs paient moins d'impôt», soutient Steve Larouche, qui nous accueille au siège de l'entreprise.

Or, on ne remplace pas un bon foreur en claquant des doigts, explique M. Larouche. «Le bon foreur, c'est quelqu'un de fort, habitué à travailler physiquement, et qui connaît sa machine.» Pour y arriver, il faut des années de formation, précise M. Larouche.

Les salaires sont élevés: de 100 000$ à 120 000$ pour un horaire qui comprend des séquences de 28 jours de service sur des quarts de 12 heures suivis de 14 jours de congé.

Pour augmenter les chances de garder son monde dans un contexte ultracompétitif, Forages Chibougamau a dû y mettre du sien: des assurances collectives, une caisse de retraite et... un avion. La société a en effet acheté un avion de neuf places pour faciliter la vie des foreurs et les transporter de leur lieu de résidence à leur travail.

Forages Chibougamau a des foreuses en Ontario, notamment dans le camp de Red Lake, où l'entreprise a acheté une ancienne école pour loger son monde.

Elle a aussi des foreuses dans le nord du Québec, comme au projet diamantifère Renard, où elle a dû envoyer les machines par avion, en pièces détachées.

«Nous avons aussi de la demande en masse du Labrador, mais on manque de main-d'oeuvre», déplore Steve Larouche.

Davantage que des forages

En 1987, Forages Chibougamau a créé, à proximité de son siège social, un atelier d'usinage de pièces pour les foreuses. «On fabrique toutes nos foreuses ici, dit fièrement Steve Larouche en montrant les machines à découper le métal. Nous avons investi des millions dans la recherche pour améliorer nos foreuses.»

Tout près des ateliers, on trouve des dizaines de tablettes où sont alignées les moindres pièces utilisées dans les foreuses de la société. Quand il en manque, nul besoin d'attendre un fournisseur. L'atelier peut fabriquer la pièce rapidement.

Au fil du temps, l'atelier a diversifié sa clientèle. «Pendant le boom forestier, 70% des pièces qu'on fabriquait étaient destinées au secteur de la forêt et le reste pour les foreuses, note Steve Larouche. Aujourd'hui, c'est l'inverse.»