Les prix des matières premières, récemment grimpés à des sommets, se sont effondrés de concert cette semaine, métaux et pétrole dégringolant sur un marché gagné par l'affolement, pâtissant d'un rebond du dollar et inquiet de l'économie américaine.

Sur la seule journée de jeudi, les cours du brut ont plongé de quelque 10 dollars à Londres comme à New York, alors que dans le même temps, les prix du cuivre et de l'aluminium chutaient de 5% et que l'étain dévissait de 7%.

«Une série d'indicateurs macroéconomiques médiocres aux États-Unis et en Allemagne ont inquiété le marché, déjà échaudé par les fortes hausses des stocks pétroliers aux États-Unis», a expliqué à l'AFP Amrita Sen, de Barclays Capital.

Une forte augmentation des nouvelles inscriptions hebdomadaires au chômage aux États-Unis est ainsi venue exacerber les craintes des opérateurs sur la résistance de la demande pétrolière américaine face au niveau élevé des prix du baril.

«On a alors assisté à un vent de panique et des ventes massives sur toutes les matières premières, alors que dans le même temps un net rebond du dollar accroissait la pression sur les marchés», relate Myrto Sokou, du courtier Sucden.

Le renchérissement du billet vert face à l'euro, après des propos plus prudents qu'attendu du président de la Banque centrale européenne (BCE) Jean-Claude Trichet, rendait encore moins attractifs les achats de matières premières libellés en dollars pour des investisseurs aux abois.

«Ces inquiétudes sur l'économie ne justifiaient absolument pas un plongeon aussi violent», a commenté Mme Sen, mettant en cause «une certaine irrationalité».

«Les indicateurs économiques ou les fluctuations du dollar n'avaient pas à eux seuls le pouvoir de faire chuter les cours du brut de 10 dollars... La raison la plus importante, c'est simplement qu'une correction était nécessaire» après la récente flambée des prix, suggère de son côté le cabinet JBC Energy.

Quelques jours plus tôt, les métaux précieux avaient donné le ton: dès lundi, l'argent avait vu son éclat se ternir brutalement, avec une chute de 12% en l'espace de quelques minutes.

Le prix de l'argent, qui avait doublé en l'espace de six mois, a perdu plus de 30% sur l'ensemble de la semaine, tombant non loin de 33 dollars l'once vendredi six jours après avoir tutoyé le sommet historique des 50 dollars.

Ce violent retournement n'a guère surpris les analystes, dont beaucoup avaient récemment mis en garde contre une éventuelle bulle sur le métal gris.

Cette chute, et dans une moindre mesure celle de l'or, a effrayé les investisseurs les plus prudents «pour qui faire face à une telle volatilité des prix, c'est se retrouver au Far West», ont souligné les analystes de RBS.

L'annonce par les médias financiers que le milliardaire américain George Soros lui-même, investisseur avisé, liquidait ses positions longues sur l'or n'a guère contribué à rassurer les opérateurs.

Ceux-ci sont partagés entre le scénario d'un «super-cycle» -qui verrait les prix des matières premières grimper de manière continue grâce à la reprise économique occidentale et l'appétit robuste de la Chine- et l'éventualité d'une bulle sur le point d'éclater.

Cependant, l'or devrait rester protégé par son statut de valeur refuge face aux menaces inflationnistes, et un déclin prolongé des cours du pétrole paraît peu probable.

La demande mondiale reste solide et l'offre sous la menace des tensions dans le monde arabe, le brut léger de Libye faisant encore cruellement défaut, a insisté Amrita Sen.